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L’angoisse des vacances

Photo: Métro

Êtes-vous de ceux qui font des «X» sur leur calendrier jusqu’au jour fatidique où le mot VACANCES est écrit en grosses lettres au feutre sur les cases des jours de votre délivrance d’un quotidien au bureau?

Une grande majorité de travailleurs considère les vacances comme un moment heureux, une grande joie et un temps pour se retrouver en famille, ou seul, sans les contraintes du boulot. C’est, après tout, la norme et l’image qu’on projette massivement des vacances, surtout qu’une demande fréquente dans les conditions d’emploi est la possibilité de profiter de plus de vacances.

Mais il existe une autre partie de la population, plus discrète, qui anticipe la venue des vacances estivales comme une grande angoisse. J’en suis et, d’une année à l’autre, c’est un petit combat intérieur pour ne pas sombrer dans un blues qui affecterait ma fille qui, par exemple, savoure chaque moment loin des bancs de l’école comme une bénédiction sans fin.

La première étape, pour ne pas se sentir enseveli par l’angoisse des vacances, c’est d’admettre qu’elle existe et qu’on n’est pas forcément seul à la ressentir.

Évacuons, tout d’abord, un cliché. Non, l’angoisse des vacances n’est pas une phobie du voyage et de l’inconnu. Ce n’est pas non plus un rejet de l’idée de sortir du pays un temps pour découvrir de nouvelles choses, ou encore une fermeture sur le reste du monde.

Cette angoisse, elle est ancrée ailleurs et est propre à chacun. Pour certains, il s’agit d’une vieille cicatrice d’enfance, peut-être causée par des parents eux-mêmes peu enclins aux vacances festives. Pour d’autres, c’est un certain vertige devant l’absence de cadre et de routine pour façonner le passage des jours. Il y a aussi, d’un individu à l’autre, différents degrés de solitude qui se font un vrai festin à quelques jours d’un long congé sans personne à aller voir.

Il y a, dans le concept même de vacances, un vide à remplir qui n’est pas forcément réconfortant pour tout le monde.

Personnellement, il y a un écho perpétuel où je ressens la pression de l’extérieur d’être épanoui durant mes temps morts. Être au mieux de soi-même, un peu partout, à butiner du bonheur comme on épluche un catalogue de couleurs sur la pointe des pieds. Je vous en parle pour que mon écho devienne une forme de bouée si vous sentez la marée un brin trop haute à l’approche de vos vacances, seul ou en famille.

Un autre truc qui peut aider à passer au travers, c’est de changer la perception même du concept de vacances.

Au lieu de le voir comme l’obligation de voyager et de s’épanouir, on peut ramener le tout à la simple action de prendre du temps pour soi loin du travail. La fonction première des vacances, après tout, c’est de mettre en sourdine le boucan du boulot durant une période donnée pour que la voix dominante soit la nôtre, pour une fois. Ce qu’elle dit et les envies qu’elle exprime, sous cet angle, ça devient secondaire.

Il faut aussi s’enlever de la tête l’idée saugrenue que le train de notre travail déraillera durant notre absence. Tout peut attendre, sauf peut-être les questions de vie ou de mort et, le cas échéant, vous ne partirez pas en vacances sans établir un plan de substitution. Donc, si votre employeur vous fait vous sentir coupable de laisser s’empiler quelques dizaines de courriels durant votre semaine d’absence, envoyez-le silencieusement promener dans votre tête et dites-vous que tout cela attendra votre retour.

La terre ne cessera pas de tourner pour un tableau Excel.

Déjà, en évacuant le poids des responsabilités du travail, l’idée de prendre des vacances devient un peu moins stressante. Mais que faire de l’obligation de et du vertige qui vient avec la notion de remplir son temps?

Allez-y une journée à la fois, du moins c’est ce que je tente. Je diminue les gros plans élaborés et j’y vais un peu selon les envies au réveil. Dans le cas du train-train d’une petite famille, parfois le simple fait d’être présent est déjà une différence suffisante pour que le moment soit précieux.

On dit aussi qu’on peut aspirer à être, en tant que parents, tout ce qu’on aurait eu besoin d’avoir étant enfant. Ça devient un peu flou et élastique comme guide, mais si votre angoisse se régale de vos cicatrices d’enfance, c’est une bonne façon d’appliquer un baume le temps de trouver des solutions adaptées.

Il ne faut pas non plus se forcer à se conformer à un moule qui ne nous convient pas. Comme ce texte, par exemple. Si vos angoisses ne résonnent pas dans l’écho des miennes, sachez seulement que vous n’êtes pas seul.

Pour le reste, ça va bien aller.

Bonnes vacances à ceux qui attendent, comme moi, le retour des ouvriers de la construction pour profiter de l’île de Montréal et de ses nombreuses activités lors d’une période d’accalmie.

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