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Les films québécois rayonnent jusqu’à l’autre bout du Canada 

Joëlle Desjardins Paquette (à gauche) a réalisé et coscénarisé avec Sarah Lévesque (à droite) le film Rodéo, qui prendra l'affiche le 3 février. Il a remporté le Borsos de Meilleure réalisation et une mention honorable pour l’interprétation de Lilou Roy-Lanouette. Photo: Whistler Film Festival

La 22e édition du Whistler Film Festival s’est conclue dimanche dans les montagnes de la Colombie-Britannique avec la remise des prix Borsos. Parmi les six catégories destinées aux longs métrages de fiction, cinq ont récompensé des films québécois, qui ne représentaient que 10% de la programmation du festival.  

Ainsi, le cinéma anglo-canadien a dû se contenter du prix de Meilleure direction photo pour Polaris de Kristen Carthew (qui a aussi reçu une mention honorable pour l’interprétation de Viva Lee), distinction partagée avec Exile de Jason James, qui a obtenu une mention honorable. 

Métro a donc voulu mieux comprendre comment le cinéma québécois est perçu dans le reste du pays et quels sont les enjeux de découvrabilité pour les films francophones et anglophones au Canada.  

Les gagnants québécois des Borsos 2022 

Le Coyote, premier long métrage de Katherine Jerkovic qui prendra l’affiche en mars, a remporté les honneurs en mettant la main sur le prix du Meilleur film canadien et de la Meilleure interprétation pour la touchante performance de Jorge Martinez Colorado; 

Rodéo de Joëlle Desjardins Paquette, également un premier long métrage, est reparti avec le titre de Meilleure réalisation et une mention honorable pour l’interprétation de Lilou Roy-Lanouette; 

Niagara de Guillaume Lambert a gagné pour le Meilleur scénario; 

Les 12 travaux d’Imelda de Martin Villeneuve a mérité le prix du Meilleur montage.

Katherine Jerkovic a été récompensée pour son film Le Coyote, qui a remporté le Borsos du Meilleur film canadien et celui de la Meilleure interprétation pour la performance de Jorge Martinez Colorado. Photo: Whistler Film Festival.

Entre jalousie et reconnaissance  

«Parmi les films qui ont gagné des prix Borsos à Whistler au fil des années, la présence du cinéma québécois est disproportionnée», s’exclame d’entrée de jeu Paul Gratton, directeur de la programmation du Whistler Film Festival. À titre d’exemple, dans les 19 années où le Borsos du Meilleur film a été remis, il est allé 12 fois à des films québécois, qui sont pourtant en minorité dans la programmation! 

Le programmateur ajoute qu’il «y a une incroyable jalousie en regardant les recettes en salle». Citant en exemple Confessions de Luc Picard, gagnant du Borsos de la Meilleure réalisation en 2021 qui a dépassé le million au box-office québécois, il assure que «ce sont des recettes presque inconcevables pour la majorité du cinéma anglo-canadien.» 

«On sait que les films canadiens ne gagnent pas beaucoup d’argent… sauf au Québec, confirme Francesca Accinelli, la directrice générale de Téléfilm Canada. Les films québécois ont trouvé un auditoire très fidèle.» 

Selon Paul Gratton, l’absence de lois qui favorisent le contenu anglo-canadien nuit au cinéma du pays, qui se retrouve dans un marché libre avec les films américains. Quand on pense que le budget annuel total de Téléfilm, qui finance plus ou moins 80 longs métrages par année, est moins que celui d’un seul film de Marvel, on comprend que la compétition peut être déloyale.  

Paul Gratton, le directeur de la programmation du Whistler Film Festival. Photo: Métro.

Au Québec, un écosystème différent s’est développé: le public va en salle et consomme la culture d’ici, même si les cinémas ne roulent pas aussi bien qu’à l’époque pré-pandémique et qu’on pourrait toujours espérer une plus grande affluence.  

La découvrabilité au cœur des préoccupation 

Dans la belle province, le problème est souvent que la vie en salle est relativement brève, et qu’une fois qu’elle est terminée, on peine à trouver les films depuis la fermeture des clubs vidéo.  

Dans cette perspective, Téléfilm a lancé le site Plein la vue qui, sans être parfait, aide à savoir (en français!) sur quelle plateforme différents films d’ici sont disponibles. Le principe est le même avec la version anglophone, appelée See it all. Il reste qu’il faut un abonnement séparé pour chacune des plateformes et que ce ne sont pas tous les longs métrages qui s’y trouvent. 

«C’est notre but d’assurer que ce soit plus facile de trouver le contenu canadien et québécois. On peut présenter les films canadiens partout: au cinéma, dans les festivals, sur les plateformes… on veut rejoindre l’auditoire où il est», assure Madame Accinelli.  

La découvrabilité, c’est l’étape de la promotion: Téléfilm finance des festivals canadiens, aide à la distribution alternative et à l’export des films canadiens choisis par des distributeurs internationaux en plus de financer les voyages de talents canadiens dans des festivals ailleurs dans le monde.   

Francesca Accinelli, directrice générale de Téléfilm Canada 

Les festivals canadiens, qui sont d’ailleurs en partie financés par le budget de Téléfilm, jouent en effet un rôle important dans la découvrabilité du cinéma au pays, peu importe la langue. Et À Whistler, cette découvrabilité est propulsée par deux choses: l’amour de la montagne, qui attire les touristes enthousiastes de tomber en même temps sur un festival, ainsi que les films populaires de Netflix, qui permettent de programmer des productions qui s’adressent davantage à des cinéphiles.  

Paul Gratton, fier de dire qu’environ 60% de la programmation du festival de Whistler est canadienne – un nombre élevé pour un événement international -, souligne une nouvelle initiative en partenariat avec Variety, le Top 10 Canadians to watch, où figure la Québécoise Sophie Dupuis, gagnante d’un Borsos en 2020 pour Souterrain.  

Les 10 Canadien.ne.s à surveiller, selon Variety: l’actrice Bilal Baig, le compositeur Justin Delorme, la productrice et scénariste Sasha Leigh Henry, la productrice Britt Kerr, la réalisatrice Jules Koostachin et son fils, l’acteur Asivak Koostachin, la réalisatrice Chandler Levack, l’actrice Kelly McCormack et le documentariste Daniel Roher. Sont absentes de la photo l’actrice Gail Maurice et la réalisatrice Sophie Dupuis. Photo: Whistler Film Festival

«C’est une façon de faire la promotion du talent canadien en dehors de notre pays», souligne-t-il avant d’admettre que la barrière linguistique reste un défi pour le cinéma québécois en dehors de la province.  

Le Whistler Film Festival se poursuit en ligne jusqu’au 5 janvier. Seulement un des quatre longs métrages québécois – Les 12 travaux d’Imelda est accessible dans la province, question de droits de distribution, mais tous peuvent être découverts par le public ailleurs au Canada. Pour les Québécois.es, c’est l’occasion de voir ce qui se fait dans le reste du pays, 15 longs métrages et 29 courts canadiens étant accessibles en ligne, juste ici.  

Le festival pour les cinéastes 

Nancy Pettinicchio a présenté à Whistler son premier court métrage en tant que réalisatrice, Falena, qui met en vedette Nahéma Ricci. En entrevue avec Métro, celle qui a participé à quelques festivals au Québec (dont Image+Nation, où elle a gagné le prix du Meilleur court métrage québécois) ainsi qu’au Palm Springs International ShortFest explique ce que ce genre d’événement implique pour les cinéastes débutant.e.s.  

«Je ne m’attendais aucunement à ce que mon film ait si une belle vie en festival», avoue celle qui a passé le week-end à Whistler pour aller à la rencontre du public et parler aux programmateur.rice.s. «Je sais maintenant que je fais partie d’une communauté et j’espère que ça me donnera des opportunités pour mes prochains films, comme avoir du financement ou garder un lien avec certains festivals. Ça peut être intimidant, mais c’est une ambiance qui n’existe pas vraiment ailleurs; le plaisir vient en premier, on est là pour célébrer le cinéma.» 

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