Double exclusion: itinérance chez les femmes
À Montréal, seulement 10 % des places en hébergement d’urgence sont réservées aux femmes et les logements abordables se font rares. Alors que la campagne électorale traverse sa dernière ligne droite, que promettent les partis montréalais pour réduire l’itinérance chez les femmes ?
Les promesses des partis montréalais
Le parti Ensemble Montréal de Denis Coderre a promis de construire 600 logements spécifiquement destinés aux femmes itinérantes. Il a également émis son intention d’investir 60 M$ sur quatre ans dans la lutte contre la pauvreté et l’itinérance.
Du côté de Projet Montréal, dirigé par Valérie Plante, on promet de doubler le budget consacré aux personnes itinérantes de 12 à 24 M$ sur quatre ans. On s’engage aussi à ajouter 300 logements par année et la mairesse est favorable à une approche 24/7, permettant de soutenir et d’accompagner les personnes itinérantes, de jour comme de nuit.
Interpellés le 21 octobre dernier lors d’un débat tenu au Pavillon Patricia Mackenzie sur la question de l’itinérance, trois candidats (Nathalie Goulet de Projet Montréal, Matthew Kerr de Mouvement Montréal et Benoit Langevin d’Ensemble Montréal) ont apporté des précisions sur les promesses de leurs partis.
Pour Matthew Kerr de Mouvement Montréal, il faut « augmenter les ressources dans la rue » et mieux encadrer les pratiques de plateformes comme Airbnb. « Il faut agir sur le système, a pour sa part répondu Nathalie Goulet de Projet Montréal. C’est pourquoi nous avons un règlement très ambitieux pour une métropole mixte qui oblige les projets de développement à intégrer 20 % de logements sociaux. » Ensemble Montréal, de son côté, s’engage à construire 10 000 logements sociaux et souhaite créer un fonds pour recueillir des investissements du secteur privé afin de mener des projets de développement.
Lors du débat, une résidente du Pavillon Mackenzie, l’une des plus grandes ressources pour femmes itinérantes au Canada, a demandé : « Êtes-vous prêts à céder des terrains et des bâtiments aux organismes communautaires pour transformer ces espaces en logements abordables ? » Cette question est demeurée sans réponse…
Pendant ce temps, à Québec…
Comme l’enjeu de l’itinérance ne concerne pas que Montréal, Valérie Plante appelait récemment les autres ordres de gouvernement à en faire plus. La demande semble avoir été en partie entendue. Du côté du gouvernement du Québec, le ministre Lionel Carmant s’est ainsi engagé à soutenir financièrement les ressources pour femmes itinérantes sur cinq ans. Cette contribution gouvernementale permettra à des organismes comme le nôtre d’avoir les coudées franches afin d’intervenir plus rapidement et de manière structurée, en offrant un accompagnement complet aux femmes dans le besoin.
De nouveaux logements communautaires
L’accès à un financement récurrent permettra aussi de mettre en place une structure permanente qui offrira la stabilité nécessaire à toutes les femmes itinérantes qui frappent à notre porte. Ainsi, nous accélérerons le développement de services d’habitations communautaires, pilotés par notre équipe interne, et offrirons plus de 330 logements dès le printemps prochain, assortis d’un soutien psychosocial.
Pour une véritable sortie de l’itinérance et une réintégration pleine et entière dans la communauté, nous proposons aux exclues de la société des lieux de vie décents, sécurisants et pérennes.
À la suite de violence conjugale ou familiale, d’instabilité financière, de problèmes de de toxicomanie ou de santé mentale, une femme peut se retrouver du jour au lendemain sans toit. Elle doit désormais composer avec une double exclusion : celle de la société, et celle de la rue et de sa violence. Voilà pourquoi il est important d’agir rapidement afin de lui offrir la sécurité et la stabilité d’un logement abordable.
Moins visible dans l’espace public, l’itinérance des femmes est néanmoins bien réelle. Notre rôle comme société : faire ce pas de plus pour que chacune puisse se réveiller dans un vrai logement.
Neila Ben Ayed, directrice des services aux femmes, Mission Old Brewery Valérie Pomerleau, vice-présidente, Ryan affaires publiques