Josée di Stasio veut «prendre ça cool»
Tout est parti de la couleur rouge. Josée di Stasio avait une obsession du rouge, un carnet rouge. Ce carnet, elle voulait le faire pour ses amis; pour leur offrir quelques recettes réconfortantes pendant leurs journées cocooning. Finalement, c’est le Québec en entier qui pourra profiter des nouvelles offrandes de Mme di Stasio contenues dans son Carnet Rouge.
Dans ce quatrième livre, elle voulait livrer un message, fidèle à elle-même: «On ne devient pas fou: on se calme et on prend le temps. Je pense que c’est un souhait, de prendre le temps. Même si c’est simplissime.»
Par un frisquet après-midi d’automne, Métro a pris le thé avec l’animatrice pour discuter, tranquillement, de son livre tout frais sorti des presses, de sa douzième saison télé et de la cuisine en général.
La tendance est plus aux livres de recettes simples et rapides, pour le quotidien pressé. Le vôtre fait plutôt l’éloge de la lenteur, l’apologie de l’apéro, de l’heure du thé, du cocooning…
Oui et non. Dans le sens de prendre le temps, oui. Mais en même temps, le côté extrêmement simple des recettes fait qu’on en a du temps, parce qu’on fait simple. À peu près toutes les recettes de l’apéro sont faciles et bonnes. Pour moi, c’est plus l’apologie de «On prend ça cool!».
Sur la couverture, on peut lire «Notes pour les temps de fête». Ce n’est donc pas un livre dans lequel on retrouvera des recettes pour les soupers de Noël par exemple?
Ce n’est pas un livre du temps des fêtes mais un livre qui couvre le temps des fêtes, le mois avant ou entre Noël et le jour de l’An, quand on écoute des séries ou qu’on cocoon à la maison. C’est beaucoup pour le lendemain de la fête. Le bouillon avec la carcasse de dinde ou la soupe rapide pour se replacer l’estomac. En même temps, si de la visite arrive à l’improviste, il y a moyen de trouver quelque chose. Il y a quelque chose d’easy going dans ce livre-là.
Contrairement à vos autres ouvrages, vous semblez accorder une grande importance au livre comme objet?
Il y a deux ans, je regardais mon agenda rouge et je me suis dit que j’aimerais vraiment ça avoir un livre rouge. Je faisais une fixation sur le rouge. Cette fois-ci, je voyais le contenant avant le contenu. Les coins ronds, le papier peint à l’intérieur… Je l’imaginais comme un livre que tu as envie de feuilleter le samedi matin avec ton café ou le jeudi soir, en prévision de la fin de semaine. C’est un petit livre à laisser traîner et à consulter.
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Vous êtes un peu la papesse des foodies du Québec, celle par qui les tendances arrivent. Êtes-vous consciente de ça?
Je l’entends, mais je ne pense pas que c’est quelque chose que j’intellectualise. Je me laisse beaucoup porter, je m’informe, je lis des magazines, je voyage. Dans ce sens-là, je suis curieuse et j’aime ça en parler. Mais je n’embarque pas dans tous les trains qui passent. J’accroche ce qui m’intéresse là-dedans.
Mais vous les créez aussi les tendances. Quand vous faites une recette de dinde, le lendemain, il n’y en a plus dans les boucheries.
Il y a eu un moment donné, quand j’étais à la télé à chaque semaine – maintenant je fais des demi-saisons – je me suis dit «Ayoye». Je prenais ça presque comme une responsabilité. Je ne l’intellectualise pas, je ne le planifie pas. Je le vois [que j’ai un certaine influence] parce que les gens me le disent.
La douzième saison d’À la di Stasio débutera la semaine prochaine. Où êtes-vous allée cette année?
Je me suis promenée beaucoup dans les quartiers de Montréal. C’était tellement cool! Il faisait un temps béni des dieux quand on tournait. Mon équipe et moi étions ravis de découvrir ces quartiers. La fin de semaine, j’aime ça faire ça. Si je vais chez un ami, je veux savoir où il y a du bon pain, où on mange bien dans son quartier.
Avez-vous eu un coup de cœur pour un quartier en particulier?
Honnêtement, et ce n’est pas pour être politically correct, ils étaient tellement différents. Ce qui m’a frappé, c’est qu’il avait tous leur personnalité. Quand on est arrivé dans Hochelaga-Maisonneuve, l’esprit communautaire était évident. Villeray: famille. Plus multiethnique aussi dans Villeray. Le Mile-End est clairement hipster, on se sentait quasiment à Brooklyn. À Saint-Henri, j’avais quasiment l’impression de voir pousser les restaurants et les boutiques tellement on était dans un boom. Et ce n’est pas fini. Le quartier italien, j’ai zéro objectivité, mais c’était chaleureux. Je l’ai fait avec Elena [Faita] la Petite-Italie.
On sort des sentiers battus. Vous n’êtes pas allée sur le Plateau ou au centre-ville ? Ça se passe ailleurs maintenant?
Oui et c’est le fun de savoir que [ça se développe ailleurs]. C’est remarquable. Tous ces quartiers que j’ai visités sont en train d’éclore. Dans cinq ans, ça ne sera plus ça.
Douze ans à la barre d’À la di Stasio… Quel est le secret de votre longévité télévisuelle?
Selon ma productrice, c’est parce que je me renouvelle. Je pense que c’est parce que j’aime ça être inspirée. Je veux continuer à être inspirée et si je ne l’étais pas, je ne serais pas capable de continuer. Je fais ce que j’ai envie de faire et j’espère que ça inspire aussi les gens.
D’avoir fait des voyages gourmands dans tellement d’endroits vous a-t-il permis de situer Montréal sur la carte mondiale de la gastronomie?
Je pense que les gens sont attirés à Montréal par la spontanéité et l’ouverture qu’on a. Il y a quelque chose, une signature, de complètement authentique. On commence à avoir des chefs qui ont une liberté en cuisine, une créativité et ça c’est remarqué. On a quand même pas une culture très longue ici en cuisine, mais comme on n’a pas de racines profondes, on a une espèce de spontanéité et de fraîcheur en cuisine, pas de carcans. On le voit dans les jeunes pays comme en Australie ou en Californie.
Le Carnet Rouge
Éditions Flammarion Québec
En librairie
À la di Stasio
Dès le 8 novembre, 20h
À Télé-Québec