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Revisiter l’histoire des métiers d’art

Perrette Subtil, directrice du MUMAQ. Photo: Amine Esseghir

Fermé au public depuis un an à cause de la pandémie, le Musée des métiers d’arts du Québec rouvre ses portes le 8 juin avec des nouveautés. Sa directrice Perrette Subtil explique comment la pause forcée a été mise à profit.

Comment se fait la réouverture du Musée?

On ouvre avec des nouveautés qui étaient en préparation depuis longtemps, une exposition permanente et des salles. On devait fermer en février, juste avant la pandémie pour trois ou quatre mois, mais à cause de la COVID tout a changé.

Comment avez-vous vécu la fermeture?

On a pris cela comme une opportunité. Nous avons gagné du temps. Nous avons pu régler toutes sortes de problèmes. Nous avons pu aller en profondeur.

Qu’était-il nécessaire de changer?

Notre musée date des années 1960. Il n’avait pas beaucoup évolué depuis 15 ou 20 ans.

La dénomination a changé. On s’appelait le Musée des maitres artisans du Québec, on est devenu le Musée des métiers d’art du Québec le MUMAQ. On l’a sorti l’été passé, en pleine pandémie après une réflexion en 2019. Les gens ne comprenaient pas exactement ce qu’il y avait chez nous. On voulait éclaircir les choses.

Au-delà du nom, qu’est-ce que les visiteurs découvriront?

On a voulu favoriser l’expérience du lieu. Avant, on présentait l’exposition par matériaux, métier du bois, du verre, du cuir, etc. On a changé tout cela. On voulait que les métiers d’art se parlent.

Les métiers d’art sont une discipline en soi, mais il y a toutes sortes d’arts connexes qui sont en silos. On voulait en sortir pour que les gens puissent comprendre la transformation. On voulait qu’il y’ait une confrontation.

Et puis les artistes actuels sont dans l’interdisciplinaire. On le voit dans les périodes récentes.

Après une aussi longue fermeture, vous risquiez de vous faire oublier…

On s’est demandé comment garder le lien avec le public en attendant la réouverture. Le numérique est arrivé et il est devenu une nécessité. On a organisé une exposition virtuelle de Paulette Marie Sauvé qui sera en ligne jusqu’à 31 décembre.

Quelles nouveautés technologiques avez-vous introduites?

En salle, quand il n’y a pas de médiateur, on a une relation privilégiée avec l’œuvre. Le numérique nous permet de mettre des entrevues vidéo de l’artiste par exemple.

On va lancer aussi une application avec des photos et des textes. Avec la crise sanitaire, on ne peut pas faire de visites guidées, donc on a trouvé une façon pour que les gens soient autonomes.

Le musée, c’est aussi l’ancienne église presbytérienne Saint-Paul…

Ce bâtiment date de 1867, il était avant au centre-ville et il a été démonté dans les années 1930 pierre par pierre pour être remonté sur une structure de béton qui deviendra la salle Émile Legault, un lieu de création théâtrale extraordinaire.

On trouvait que la relation avec le bâtiment n’était pas assez exploitée. On a pris un designer et un scénographe du milieu du théâtre qui nous ont aidés à mettre en relief les éléments architecturaux distinctifs. Les métiers d’art sont aussi au-dessus de nos têtes.

On est allé chercher une subvention de PME MTL centre ouest pour faire une mise en lumière à l’intérieur des voutes, des orgues, du chemin de croix.

Vous parlez de nouvelles salles. Qu’avez-vous ajouté?

On a créé une salle qu’on a appelée «savoir-faire». On veut que les gens puissent expérimenter, toucher, avoir entre les mains des échantillons de matériaux. Voir par exemple le cycle de la laine, du mouton jusqu’au tissu filé. C’est beaucoup cela, les métiers d’arts. C’est la transformation de la matière.

Un musée renvoie aussi au passé. Qu’est-ce qu’on apprend sur l’histoire, chez vous ?

Il n’y a pas de réflexion sur l’histoire des métiers d’art au Québec. On s’est demandé si notre collection pouvait soutenir ce propos historique. L’arrivée des vagues d’immigration fait que chacun amène les savoir-faire de son pays d’origine et c’est majeur.

Il y’a eu l’évolution technologique, les manufactures, la période industrielle. Les artisans faisaient des pièces uniques pour leur principal client, l’église, et puis tout d’un coup ils se sont mis à faire de la série. Arrivent aussi les écoles dans les années 1940. Il y avait une volonté politique pour former des artisans. Ainsi est née l’école du meuble de Montréal avec Jean-Marie Gauvreau, des écoles locales comme pour la céramique de Beauce, ou pour la poterie laurentienne qui formeront des générations entières d’artisans.

Pour nous, l’objet des métiers d’art n’est pas une fin en soi. Il est la résultante d’une période, d’une époque. Les métiers d’art racontent l’histoire à leur manière. Ils sont le reflet de bouleversements, de mouvements sociaux, de l’évolution d’une société. C’est pour cela que l’exposition s’appelle objets témoins.

Les chaises berçantes sont une invention américaine, mais la babiche [lanière de cuir fabriquée à partir de nerfs d’animaux] était déjà utilisée par les Amérindiens.

Est-ce que votre musée se penche sur les métiers d’art autochtones?

Notre collection ne peut pas répondre à ce propos. Nous n’avons pas assez d’objets représentatifs de la diversité de tous les peuples des Premières Nations. On ne veut pas évacuer le propos, on en est conscient, mais c’est quelque chose qu’il faudra travailler dans l’avenir.

Faites-vous encore des acquisitions?

On reçoit beaucoup de propositions depuis un an ou deux. Nous avons un comité qui se réunit deux ou trois fois par an pour étudier tous les dossiers. C’est sûr qu’on doit être sélectifs. On ne peut pas tout prendre. Nous ne sommes pas des brocanteurs.

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