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Le commissaire Ambrosie ne s’inquiète pas pour l’avenir des Alouettes

Jonathan Hayward / La Presse Canadienne Photo: Jonathan Hayward

MONTRÉAL — Les Alouettes ont beau perdre de l’argent et voir les assistances à leurs matchs locaux diminuer depuis 2015, le commissaire de la Ligue canadienne de football n’est pas inquiet de la situation financière de la concession montréalaise. Il estime même que sa ligue peut aller de l’avant avec ses projets d’expansion même si toutes ses équipes ne sont pas profitables.

C’est ce qu’a déclaré le commissaire Randy Ambrosie au cours d’un entretien avec La Presse canadienne, jeudi.

Le président des Alouettes, Patrick Boivin, avait reconnu lors du bilan de fin de saison que le club n’est pas rentable depuis un certain temps.

«Ce n’est pas une question d’être en danger financièrement, avait-il toutefois nuancé. Mais comme n’importe quelle entreprise, il faut que cela ait du sens à un moment donné.»

L’équipe, qui n’a pas participé aux éliminatoires depuis la saison 2014, a décidé de réduire la capacité maximale du stade Percival-Molson de quelque 5000 places et d’abaisser le prix moyen du billet individuel pour 2019 dans l’espoir de raviver l’intérêt des amateurs. La moyenne d’assistance s’est élevée à 17 332 spectateurs en 2018, soit 6498 de moins que la moyenne de la ligue et les Alouettes n’ont pas disputé un match local à guichets fermés depuis la saison 2009.

«C’est une stratégie classique en affaires: celle de réduire votre inventaire, a commenté Ambrosie. Si vous vendez moins de billets, vous voulez concentrer vos partisans dans moins de sièges. C’est fait afin de redonner du rythme à la franchise et j’applaudis ce genre de bonnes décisions stratégiques. Ça fait également partie d’une plus grande stratégie afin de regagner leur place dans le coeur des partisans.»

André Richelieu, professeur titulaire et expert en marketing sportif à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal, rejoint le commissaire sur ce point. Il a notamment vanté la campagne de marketing des Alouettes en 2018, qui rappelait l’attachement du club pour Montréal.

«Ils ont retravaillé leur mise en marché et ils ont joué sur l’histoire et la tradition, a-t-il expliqué. Les Alouettes traversent une mauvaise passe. (…) À mon avis, ils ont les fondations nécessaires pour survivre, mais également prospérer dans le marché sportif montréalais. Ça va prendre du travail, mais c’est tout à fait faisable.»

Le professeur Richelieu note avec justesse que dans le marché de Montréal, très axé sur le hockey et le Canadien, les Alouettes — comme l’Impact — sont condamnés à connaître du succès pour attirer aux guichets, une réalité que le Tricolore n’a vécue que récemment.

«Le défi à Montréal, c’est que nous sommes une ville de hockey et l’amour du hockey passe par le Canadien de Montréal. C’est tellement vrai que quand le CH n’est plus en séries ou en est exclu, on arrête de le regarder. Ce qui laisse peu de place et de marge de manoeuvre pour les autres équipes sportives montréalaises.

«Les Alouettes et l’Impact sont vraiment dans une obligation de résultats. Pour eux, c’est essentiel et nécessaire. Si on veut être sur le radar, si on veut qu’on parle de nous de façon positive, il faut gagner.»

«La famille Wetenhall a un long historique comme propriétaire des Alouettes, a rappelé Ambrosie, qui croit plus que jamais au niveau d’engagement d’Andrew Wetenhall envers le marché montréalais. L’équipe a connu l’une des plus belles séquences de succès dans l’histoire de la ligue. Malheureusement, les dernières années n’ont pas été aussi glorieuses. Mais je ne manquerai jamais de respect envers ce qu’ils ont fait avec cette équipe. Je sais qu’Andrew a la même passion pour les Alouettes que son père et qu’il souhaite leur succès.

«Bien sûr que ça vous inquiète quand une de vos formations ne génère pas autant d’intérêt que vous le souhaiteriez. Mais le marché québécois est très fort. Je suis convaincu qu’on pourra regagner notre place dans le coeur et la tête des amateurs de football de la province.»

Trois des neuf formations du circuit sont détenues par les communautés où elles évoluent: Edmonton, Saskatchewan et Winnipeg. Ces trois équipes ont généré des profits oscillants de 1,5 à 4,5 millions $ CAN, a souligné M. Richelieu. Malheureusement, pour les six autres équipes «privées», il n’est pas possible de connaître leur situation financière.

On sait par contre que les Argonauts de Toronto ont connu de gros ennuis aux guichets ces dernières années et les Alouettes ont confirmé être maintenant déficitaires.

Le commissaire n’a pas voulu parler spécifiquement de la situation de ces équipes et la LCF n’a jamais rendu public les montants qu’elle touche en vertu de son entente de télédiffusion avec Bell Média. Par contre, le professeur Richelieu avance qu’elle est très lucrative pour ses neuf équipes.

«Pour les droits de télédiffusion avec TSN, un accord débuté en 2014 et qui se terminera en 2021, c’est une entente qui rapporte 40 millions $ annuellement à la LCF. En divisant par neuf équipes, c’est environ 4,4 millions $ par an. Pour une ligue où le plafond salarial s’établit à 5,1 millions $ pour 56 joueurs. C’est tout de même une manne importante par rapport à la plus grande dépense des équipes. Même avec une cote-part prise par la ligue, disons 20 pour cent du montant, il reste tout de même 32 millions $, ce qui signifie plus de 3,5 millions $ par équipe.»

C’est sûrement l’une des raisons qui fait qu’Ambrosie ne craint pas d’aller de l’avant avec une éventuelle expansion. Le groupe Maritime Football, avec à sa tête Anthony LeBlanc, l’ex-proprio des Coyotes de l’Arizona, travaille d’arrache-pied afin d’amener une formation à Halifax.

«Je pense qu’on doit travailler sur plusieurs projets de front, a affirmé Ambrosie. Je ne crois pas que nous devions abandonner une bonne idée pour nous soucier d’une autre. Je pense qu’on peut travailler avec les Alouettes pour faire croître leurs affaires en même temps qu’on travaille sur d’autres dossiers, comme la croissance de notre ligue. Ce n’est pas un ou l’autre; on peut y aller de concert.

«Si nous voulons amener la LCF où nous croyons qu’elle peut aller, ça prendra plusieurs projets de front bien menés. Chaque entreprise à des aspects à améliorer. Parfait: travaillons sur les nôtres. Mais ne laissons pas cela interférer avec nos projets de croissance.»

André Richelieu abonde dans le même sens.

«La situation est délicate, mais sûrement pas désespérée. Si les dirigeants veulent demeurer à Montréal et développer leur produit, le faire croître pour l’ancrer dans la communauté et devenir un incontournable de l’offre sportive et du divertissement, ils ont tous les atouts pour réussir. Il y a quand même une tradition avec les Alouettes, malgré le hiatus à Baltimore. Il y a une histoire assez longue de la LCF à Montréal.»

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