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Des athlètes réclament l’égalité au soccer

L'Américaine Kelley O'hara Photo: Maja Hitij/Getty Images

La disparité dans le sport est apparue de façon manifeste durant la Coupe du monde féminine de la FIFA, remportée dimanche par les États-Unis. L’Américaine Megan Rapinoe, récipiendaire­ du Soulier d’or, a d’ailleurs profité de la tribune que la compétition lui offrait pour souligner ces enjeux la semaine dernière, mais la conversation est loin d’être terminée.

Le sport est un reflet de la société dans laquelle nous vivons, et la Coupe du monde féminine, organisée cette année en France, en est une nouvelle preuve. Une fois de plus, ce tournoi international a remis à l’avant-plan le problème de l’inégalité dans l’univers du sport, plus précisément dans le monde du soccer.

Toutefois, quelque chose vient de changer. Les joueuses ne sont plus silencieuses!

Cet événement sportif s’est tenu dans un contexte où les joueuses professionnelles ont exprimé leur insatisfaction en posant des gestes lourds de sens. Par exemple, à l’occasion de la Journée internationale des femmes, l’équipe féminine américaine a porté plainte contre sa propre fédération, l’USSF, en raison de l’inégalité des salaires et des conditions de travail qui y persistent. De son côté, la Norvégienne Ada Hegerberg, première femme à recevoir le Ballon d’or féminin, a renoncé à participer à la Coupe du monde pour protester contre la disparité qui existe au soccer féminin dans son pays.

«Conviction, structure et budget. Pour moi, ce sont les trois mots-clés.» Émilie Ros, influenceuse française qui a créé le mot-clic #MeufDeFoot en 2014

En France, le mouvement visant à donner aux femmes plus de place dans les sports se manifeste de manière latente. Selon Marie-Stéphanie Abouna, chercheuse spécialiste de la question de la féminisation du soccer, docteure en sociologie et enseignante à l’École supérieure des métiers du sport, il existe un engagement de la part des joueuses de soccer françaises, qui sont confrontées à un combat quotidien. Selon la spécialiste, elles travaillent dur pour que leurs revendications soient entendues à l’échelle des clubs et des fédérations.

«Je crois qu’on doit reconnaître ce travail. Ce ne sont peut-être pas des militantes qui vont organiser des protestations, mais ce mouvement est là, en dormance, et il va se poursuivre», a déclaré Mme Abouna à Métro.

Les salaires bas et la sous-représentation des femmes dans des postes de direction sont principalement à l’origine du mouvement.

«Il y a très peu de femmes dirigeantes dans le monde du sport, ce qui inclut le soccer. Les salaires des joueuses reflètent aussi l’immense écart entre les deux univers», a déclaré Mme Abouna.

Selon les données publiées par le magazine français Marianne, les primes prévues pour les 24 sélections de la Coupe du monde féminine 2019 s’élevaient à 30 M$. Cela représente le double d’il y a quatre ans, tout en demeurant bien loin des 400 M$ distribués lors de la Coupe du monde masculine, en 2018, en Russie.

«À chaque Coupe du monde féminine, il y a du progrès.»
L’équipe française a 11 commanditaires. Selon Syanie Dalmat, journaliste au quotidien sportif L’Équipe, «une douzaine de commanditaires sont présents à cette Coupe du monde. Un peu moins que pour l’édition masculine, mais à chaque nouvelle Coupe du monde féminine, il y a du progrès.»

À proximité du Parc des Princes, Dominique, une employée commerciale de 53 ans, commente : «Avant, il y avait moins de publicités aux matchs féminins, mais aujourd’hui, comme l’intérêt des spectateurs est plus grand, on en voit bien plus.»

Toutefois, dans les rues de Paris, l’affichage publicitaire et les zones de fans sont quasi inexistants en comparaison de l’Euro 2016, qui s’est également tenu en France.

Bonjour, les fans
Le match d’ouverture du tournoi, qui opposait la France à la Corée du Sud, a été suivi en direct par près de 10 millions de personnes, soit 10 fois plus que prévu.

De la même manière, le nombre de fans présents aux matchs de cette Coupe du monde a augmenté à chacune des phases du tournoi. Hasad, un spécialiste du marketing sportif âgé de 27 ans, croit «que la tendance est en train de changer, car nous commençons à voir la qualité des matchs, avec des joueuses professionnelles. Cela attire un plus grand nombre de fans.»

«J’ai vu plus d’enfants qu’aux matchs des hommes, et l’atmosphère était plus familiale, plus calme», rapporte Jean-Claude, un chauffeur d’autobus de 49 ans.
Traditionnellement, il y a plus de fans aux matchs des hommes, puisque ces derniers ont un avantage de plusieurs années sur les femmes. Toutefois, selon Syanie Dalmat, si on compare la situation en France à celle qui prévaut dans d’autres coins du monde, on constate qu’il y a des pays où le soccer féminin est beaucoup plus ancré dans la culture, et cela se voit dans les stades.

 

«Par exemple, j’ai eu l’occasion d’assister à la Coupe du monde féminine au Canada, en 2015, et j’ai été étonnée de voir le nombre de fans locaux présents dans les stades», raconte la journaliste sportive.

Un exemple de la manière dont le soccer féminin commence à se tailler une place de plus en plus importante, même dans le monde numérique, réside dans le mouvement suscité par l’influenceuse française Émilie Ros, qui a créé le mot-clic #MeufDeFoot en 2014. Un an plus tard, ce dernier est devenu le signe de ralliement pour les femmes qui suivent ce sport.

«Pour qu’il y ait égalité entre les hommes et les femmes dans le soccer, je crois qu’il va falloir attendre que le temps fasse son œuvre : on devra mettre sur pied des clubs féminins bien structurés et recevoir le budget nécessaire. Conviction, structure et budget. Pour moi, ce sont les trois mots-clés», a confié Mme Ros à Métro.

La voie vers la reconnaissance est ouverte, mais il reste à voir combien de temps il faudra encore attendre pour que les femmes rattrapent les hommes.

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