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Un marathon par semaine pieds nus: le régime atypique de Sidy Diallo

Sidy Diallo
Au fil de ses entraînements et de ses 63 marathons pieds nus depuis 2015, Sidy Diallo s'est habitué aux regards et aux réactions, de sympathie ou d'hostilité. Photo: TIMOTHY A. CLARY / AFP
Agence France-Presse - Relaxnews

Sidy Diallo sillonne la planète, parfois au rythme d’un marathon par semaine comme à New York dimanche, pour porter son message: celui des bénéfices de la course à pieds nus, un mouvement qui tarde à se démocratiser parmi la population considérable des joggeurs.

«Je vois un homme sans chaussures. Faites attention à lui!» Le vélo taxi n’en crois pas ses yeux face à ce grand coureur filiforme qui remonte Central Park.

Au fil de ses entraînements et de ses 63 marathons pieds nus depuis 2015, Sidy Diallo s’est habitué aux regards et aux réactions, de sympathie ou d’hostilité.

«N’importe quoi. Il est fou!» a lancé une spectatrice sur son passage lors du marathon de Chicago, il y a trois semaines, se souvient ce diplomate français né en Guinée.

«Quand les gens me voient comme ça, ça leur rappelle l’animalité en eux, et il y en a qui se fâchent, (…) qui sont agressifs.»

D’autres s’inquiètent: «Qu’est-ce qu’il se fait mal aux pieds», entend-il. «Il y a des gens, je vois la peur sur leur visage.»

La douleur a bien été là, au début, lorsque ce médecin de formation, qui a ensuite bifurqué vers la diplomatie, a fait ses premières sorties sans chaussures, en 2015.

Venu à la course sur le tard, à 55 ans, il en avait alors 60 et cherchait un nouveau défi, après avoir déjà blouclé plus de 100 marathons depuis 2010.

«Il y a un prix à payer, (…) parce que ça fait mal au début. (…) Il faut se réapproprier le pied, les jambes. C’est tout le corps qu’il faut récupérer.»

Comme d’autres avant lui, Sidy Diallo est revenu à la foulée originelle, celle des premiers hommes, pour qui la course, pieds nus, était une question de survie, pas un loisir.

Beaucoup ont été inspirés par le livre de Chris McDougall, Né pour courir (2009), à l’origine d’une petite révolution dans le monde du «running».

L’Américain y allait à la rencontre des Tarahumaras, une tribu mexicaine dont les membres sont capables de courir des dizaines de kilomètres par jour avec aux pieds de simples sandales.

Il a réappris la course, et avec lui des millions d’adeptes, en privilégiant le premier contact au sol avec la partie avant du pied et non le talon, une technique inspirée de la course pieds nus.

«Quand on court avec des chaussures, à chaque foulée, l’impact [souvent avec le talon], c’est 100%», explique Sidy Diallo. «Quand on court pieds nus, l’amorti naturel réduit l’impact», à 10% de la valeur initiale, selon lui.

Plusieurs études scientifiques ont conclu que cette méthode était effectivement moins traumatisante pour le corps que le contact avec l’arrière du pied, que beaucoup relient à l’arrivée de l’amorti dans les chaussures de sport.

Sidy Diallo, Chris McDougall, ou Ira Rohde, président de la section new-yorkaise de la Barefoot Runners Society, attribuent tous à la course pieds nus l’absence de blessure majeure.

«Vous vous sentez bien»

Pourtant, malgré la publicité dont a bénéficié Né pour courir et la folie du jogging qui s’est emparée du monde occidentale depuis une dizaine d’années, le «barefoot running» reste une micro-niche.

«Aux États-Unis, la mode de la course pieds nus», qui commençait à prendre il y a dix ans, «est finie depuis longtemps», estime Ira Rhode, rabbin de son état.

Malgré une annonce fixant un rendez-vous dimanche dernier, il a été seul à effectuer son habituel tour de Central Park, sous un léger crachin.

Devenu spécialiste du trail pieds nus, Ken Posner court depuis plus de vingt ans à New York et ne se souvient que d’avoir croisé 7 «barefoot runners».

En plus de 80 marathons ou courses plus longues, il n’en a vu que trois.

Il attribue cette rareté au poids des conventions sociales. Pour courir sans chaussures, il faut «être prêt à devenir très visible», dit-il.

La technique pieds nus nécessite aussi de savoir ralentir, «or il semble que tout le monde soit toujours pressé aujourd’hui».

Pour autant, l’auteur du livre Running the Long Path (Courir sur le long sentier) croit à la popularisation de cette philosophie, notamment auprès de ceux qui utilisent déjà des chaussures dites minimalistes, aux modèles dépouillés.

Un constat partagé par Sidy Diallo, pour qui «beaucoup de gens s’y mettent» avec, à la clé, des sensations insoupçonnées.

«Imaginez vous en train de marcher sur une plage de sable fin, ou sur une pelouse. Vous vous sentez bien. C’est la même sensation, mais en XXXL.»

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