Les mal-aimés
Le baromètre des professions les classe année après année en queue de peloton. Nos élus sont des mal-aimés. Il ne faut donc pas s’attendre à des acclamations de joie lorsque vient le temps de parler de leur rémunération.
Il aura fallu la démission du ministre aux multiples primes pour relancer le débat. La prime de départ d’Yves Bolduc aura suffisamment exaspéré le premier ministre Philippe Couillard pour qu’il demande à son ministre des Institutions démocratiques de dépoussiérer le rapport L’Heureux-Dubé. Commandé par le Bureau de l’Assemblée nationale en juin 2013, le groupe de l’ex-juge de la Cour suprême avait pour mandat d’analyser les conditions de travail et le régime de retraite des 125 élus de l’Assemblée nationale.
Le rapport déposé cinq mois plus tard proposait de revoir la rémunération globale des élus à coût nul. Cela voulait dire éliminer les primes des toutes sortes, augmenter la portion de salaire, moduler celui-ci en fonction des augmentations consenties à la fonction publique et ajuster les contributions aux régimes de pension. Tout en sagesse, le comité recommandait de créer un comité indépendant pour en assurer la mise en application. Chose certaine, ces propositions assuraient une plus grande transparence.
Le rôle du député est unique. Il est exigeant. Il mériterait d’être mieux connu de la population, car ce qu’on en voit se limite à la période des questions. Cela ne reflète pas la tâche que le député, homme ou femme, accomplit. Son mandat doit être valorisé parce qu’il est un pilier du processus démocratique. C’est le principe de l’œuf ou la poule. La reconnaissance s’appuie sur différents aspects, dont la rémunération. La proposition mise de l’avant par le comité offrait aux députés une rémunération inférieure à celle de plusieurs postes administratifs des secteurs public et parapublic québécois.
Si les élus veulent être cohérents avec les recommandations du rapport, ils devraient s’assurer que le projet qui est dans les cartons du gouvernement soit appliqué après la prochaine élection. Cela voudrait dire que les députés actuels auraient déterminé les conditions de travail de la prochaine cohorte d’élus, et non les leurs. Certains éléments, dont l’application de la motion adoptée à l’unanimité visant à amener à 50 % la contribution au fonds de pension, de même que l’abolition des allocations de transition, pourraient être appliqués dès maintenant.
Ce n’est jamais le bon moment pour parler du salaire des élus. Mais il faut mettre en place des mécanismes qui permettront de sortir du psychodrame constant associé à la rémunération des députés et d’éviter d’autres cas comme celui du Dr Bolduc, qui en bout de piste ne font qu’accroître un cynisme déjà trop grand.