Chasse aux «mal voilées» en Iran

Un péché mignon? Non, un crime! Lequel? Avoir publié des photos de mannequins non voilées sur Instagram. En Iran, c’est bien connu, on ne badine pas avec la tenue vestimentaire des femmes.

Depuis deux ans, tous les recoins du réseau social sont minutieusement inspectés dans le cadre de l’opération Araignée II, visant à prendre dans ses filets les «mécréants» qui diffusent des photos «anti-islamiques».

Il y a quelques jours encore, huit personnes liées au milieu de la mode ont été interpellées. Au total, près de 200 mannequins, photographes, maquilleurs et responsables de maisons de couture ont été arrêtés, et relâchés avec des amendes, ces derniers mois. Depuis la révolution islamique de 1979, exprimer sa féminité sans porter le voile est un combat de tous les jours en Iran.

Heureusement, le code vestimentaire n’est pas aussi strict que celui prévalant dans les territoires syriens et irakiens contrôlés par le groupe armé État islamique (EI), où le voile doit être épais, non transparent et, surtout, non parfumé.

Certes, dans les campagnes et les quartiers populaires de Téhéran, le tchador noir, qui couvre la femme de la tête aux pieds, demeure la norme mais, les jeunes Iraniennes de la classe moyenne de la capitale portent souvent des foulards légers de couleurs vives laissant largement apparaître leur chevelure.

La police de la moralité les traque. Elle vient même d’ajouter 7 000 agents à ses effectifs. Cette chasse aux «mal voilées» s’accentue malgré la victoire au Parlement en février des réformistes et des modérés, alliés du président Hassan Rohani, élu en 2013,
Si, en juillet dernier, il a réussi à conclure un accord historique sur le nucléaire et à lever ainsi les sanctions économiques contre son pays, ses demandes de réformes politiques, y compris celles qui accorderaient plus de droits aux femmes, restent lettre morte.

Au-dessus de lui, il y a l’ayatollah Ali Khamenei. Depuis 1989, c’est l’homme fort du pays. Il est loin d’incarner les espoirs de réformes politiques, réclamées surtout par les jeunes adultes. Près de 70 % des 78 millions d’Iraniens ont moins de 35 ans. Ils veulent des changements et leurs tenues vestimentaires «débridées» sont un moyen de protester contre l’obscurantisme de la République islamique.

Bien sûr, la transgression continue des interdits dans la vie de tous les jours, surtout dans les grandes villes, est aussi une manière de s’affirmer en tant que «jeunes» face au «monde adulte». Ce sont là des réflexes naturels et universels.

À l’évidence, le débat sur le port du voile n’est pas nouveau. Actualisé par les réseaux sociaux, il expose au grand jour les contradictions d’une société iranienne à l’heure d’une balbutiante ouverture politique.

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