«Je n’aime pas travailler avec des femmes»
Lorsqu’on évolue dans le milieu tech, on constate rapidement qu’il y a peu de femmes. Si vous lisez ce blogue depuis quelques temps, je ne vous apprends rien. Dans le cadre professionnel, j’entends régulièrement des femmes me dire «je préfère travailler avec des hommes, les filles sont trop potineuses», ou encore «j’aime que mon supérieur soit un homme et non pas une femme». Et mon préféré: «trop de filles dans une équipe de travail et la productivité passe à la trappe».
Nul besoin de vous dire que j’éprouve toujours un malaise lorsqu’une femme me dit ça, mais, mea culpa, j’ai tenu une variante de ces propos lorsque j’étais dans ma vingtaine.
Je me demande quel est vraiment le problème d’avoir trop de femmes dans un groupe de travail, surtout si on considère leur nombre restreint dans les technologies de l’information. Au Québec, en 2016, les femmes représentent 20% des professionnels de ce milieu, selon le rapport de TECHNOCompétences paru au début du mois de février 2018.
Est-ce mieux de travailler avec une majorité d’hommes que de femmes? Ma réponse courte: le mieux, c’est de travailler dans un milieu diversifié.
Lorsqu’on évolue dans une entreprise diversifiée, avec des personnes de différents genres, de différentes origines, de différentes religions et de différentes orientations sexuelles, cela favorise une atmosphère de travail agréable où on se sent libre d’être soi-même.
Un sondage danois de Stepstone a révélé que 60% des répondants âgés de 30 à 50 ans disent qu’il est «important» ou «très important» que leur milieu de travail soit diversifié et inclusif. De plus, dans les entreprises où la diversité et l’inclusion sont ouvertes, les employés sont beaucoup plus susceptibles de se sentir engagés dans leur travail.
Une étude du Pew Research Center de 2013 démontre par ailleurs que la plupart des Américains avancent que le genre de leurs collègues de travail n’a pas d’importance, mais pour ceux qui ont une préférence, les hommes disent qu’ils préfèrent travailler avec des hommes et, évidemment, les femmes aussi.
Pourquoi les femmes acceptent mieux d’avoir un supérieur homme? La réponse va faire grincer des dents mais j’abonde dans le même sens qu’Anju Jain. Dans son article, elle explique qu’a priori, cette pensée est basée principalement sur des vieux stéréotypes et des préjugés, du genre les hommes sont davantage vus comme des leaders ou ils sont en mesure de mieux diriger une équipe. A contrario, les femmes manqueraient de confiance et se sentiraient menacées par les bonnes performances de leurs subalternes. Et pourtant en tant que femme, nous voulons plus de femmes dans les postes de direction! Voyez-vous l’aberration dans cette situation?
Parmi les autres raisons qui poussent certaines femmes à préférer travailler avec des hommes, on trouve:
- Les patrons masculins «parlent plus directement» et «sont moins enclins aux humeurs», selon les résultats d’un sondage britannique auprès de femmes.
- D’autres spécialistes ont découvert que les femmes excluent parfois les autres femmes des opportunités afin d’acquérir un avantage concurrentiel.
- Et enfin, les femmes ont tendance à intimider uniquement les autres femmes sur le lieu de travail et non pas les hommes.
Une grande partie de cette situation peut être attribuée à des décennies de discrimination sur le lieu de travail et dans la société. Les femmes ont tendance à faire face à ce que l’on appelle «l’effet de réaction», soit cette théorie selon laquelle les femmes ne peuvent avancer au travail que si elles agissent comme des hommes et donc discriminent les femmes. Cette situation est un cercle terriblement vicieux: pour s’extirper du lot, les femmes pilent sur les autres femmes.
Alors que doit-on faire? Si vous êtes une femme qui n’aime pas travailler avec d’autres femmes, demandez-vous quelles sont les vraies raisons. Avez-vous eu une mauvaise expérience avec une femme en particulier ou est-ce les femmes en général qui vous posent problème? Serait-ce différent si c’était un homme? C’est tout de même surprenant de constater que vous n’aimez pas travailler avec près de la moitié de la population québécoise! Ça fait beaucoup de personnes et ça fait surtout beaucoup de personnalités différentes.