Le sens de la démocratie
La semaine dernière, deux nouvelles sur la scène politique québécoise ont beaucoup fait jaser. Vincent Marissal, ex-journaliste-chroniqueur au journal La Presse, et Ève Torres, activiste féministe et musulmane voilée, seront candidats à l’investiture de Québec solidaire dans Rosemont et Mont-Royal–Outremont respectivement. Puis, comme à l’habitude, les célèbres chroniqueurs et chroniqueuses vedettes du Journal de Montréal ont été unanimes: Québec solidaire est un parti radical, populiste, il veut miner le Parti québécois, ce sont des «islamo-gauchistes», ils divisent le vote, Marissal est un menteur, il n’est pas vraiment souverainiste, il n’est pas de gauche non plus; Ève Torres, comme Haroun Bouazzi, est une sympathisante islamiste, etc. Chez certains commentateurs et analystes pamphlétaires, tout ce qui vient de Québec solidaire est systématiquement suspect et douteux, ce qui entraîne invariablement des textes très négatifs par rapport au parti et à ses personnalités… C’est presque devenu une inside joke dans les médias sociaux: dans les jours qui suivent une nouvelle qui touche de près ou de loin Québec solidaire, tout le monde s’attend à un flot de chroniques négatives dans Le Journal. Et, de fait, on n’est jamais déçu. Il y a quand même quelque chose d’extrêmement troublant dans ce genre de réactions.
Je crois que Québec solidaire fait partie de la transformation évolutive de la démocratie québécoise. C’est un parti qui brasse les cartes, qui propose des idées novatrices et qui nous sort un peu des sentiers battus et du consensus libéral ambiant que représentent le PLQ, la CAQ et même le PQ. Il n’y a rien de radical à vouloir offrir une assurance dentaire publique à tous les Québécois. Il n’y a rien d’utopique à ce que l’État devienne producteur de médicaments génériques avec Pharma-Québec. Il n’y a rien de populiste à vouloir instaurer le mode de scrutin proportionnel… Cela a au moins le mérite de nous faire réfléchir.
Qu’un journaliste bien connu veuille rejoindre QS, c’est un très bon point pour la démocratie. Qu’une femme musulmane veuille militer pour ce parti, se porter candidate et briser certains tabous, c’est fantastique. C’est l’essence même de la vie démocratique. Avoir la conviction de ses idées, vouloir les défendre, militer pour changer les choses et pour les faire évoluer, s’impliquer, convaincre, débattre…
Je suis un puriste de la démocratie. Je crois sincèrement que c’est la meilleure forme de gouvernement. Pour moi, le pouvoir du peuple par le peuple est loin d’être un cliché, c’est un concept puissant, une idée extraordinaire, c’est le meilleur garant de nos libertés: celles de choisir, de penser, de s’exprimer, de croire, etc. J’admire ceux et celles qui décident de jouer le jeu en se lançant dans l’arène politique, je les trouve courageux, braves et valeureux. Et ça me trouble beaucoup de voir qu’on les attaque dans leur personne, ad hominem, et qu’on les dénigre pour leurs choix politiques ou pour ce qu’ils sont ou ont été.