Histoire de la violence au hockey
On entend souvent dire que le hockey dans le temps était pas mal plus violent qu’aujourd’hui. À regarder Canadien qui a joué avec pas de goon cette année, on est tenté de dire que c’est vrai. Or, on entend souvent dire aussi que dans la société en général, la violence diminue depuis quelques années. Or, François Cusset, dans son livre Le déchaînement du monde: logique nouvelle de la violence (2018), affirme qu’au contraire, la violence n’a pas diminué. Elle a simplement changé de forme. Et si c’était la même chose au hockey?
Évidemment, François Cusset n’est qu’un historien des idées et je vous entends répliquer que si Dave Morissette dit dans son émission de télévision – c’est quoi, donc, le titre? – que la violence a diminué, ben elle doit avoir diminué parce que lui, il le sait, il a joué la game. Devoir de mémoire: rappelons-nous que Dave a joué seulement 11 matchs dans la LNH. Ça, c’est franchement pas si différent de Cusset, qui n’en a joué aucun – ça, je vous le concède.
Historiquement, il n’est pas rare de faire remonter l’apparition de la violence dans une perspective destructrice à la révolution néolithique au cours de laquelle l’humain est passé du stade de chasseur-cueilleur à l’agriculture et à la sédentarisation. Semblerait-il qu’à l’époque, la bagarre pognait souvent entre les cueilleurs et les guerriers qui protégeaient les champs. Certains diront que le hockey est resté pogné à ce stade-là de l’histoire; personnellement, je trouve ça exagéré.
Mais qu’en est-il aujourd’hui? Le maudit problème, dit François Cusset, c’est qu’on jette souvent un regard statistique sur la violence et qu’au final, les statistiques occultent tout un pan de la réalité. Par exemple, on a l’impression que la répression – qui est une forme de violence – augmente dans la société, mais on la mesure mal, ou pas. Pourtant, on dit que la violence diminue. Même chose au hockey : les commotions cérébrales sont plus nombreuses et dangereuses que jamais, mais on mesure encore mal leur impact sur les cerveaux des joueurs – certains experts le font, mais Bettman nie ces études. On continue toutefois de dire que le hockey est moins violent que dans le temps des palettes drettes. Serions-nous épas?
Puis, il y a le discours sur la violence au hockey qui donne l’impression que la game, malgré la rudesse sournoise et chienne sale qui est assurément en croissance, est devenue un jeu pour fillettes, comme l’affirmait jadis Plekanec. Mais comme le dit Geoffroy de Lagasnerie dans son essai Juger : l’État pénal face à la sociologie, il faut réinventer le discours sur la violence pour rendre compte de sa vraie réalité.
Quand on y pense, c’est pas fou. «Donner de la bande», comme l’a fait Chara envers Pacioretty y a quelques années, ça se rapproche drôlement d’une tentative de meurtre. Faudrait peut-être réapprendre à appeler les affaires par leur nom.
Price, on l’appelle-tu par son nom, lui? Oui? Ben, c’est ça que je dis.