Duel d’avocats entourant les aveux de Martin Dumont
Martin Dumont a eu un moment de répit mardi. Son avocate a réussi à faire suspendre le contre-interrogatoire, jusqu’à mercredi 14 heures, le temps d’en appeler à la Cour supérieure.
On a eu droit à une joute d’avocats à la commission Charbonneau, mardi matin. L’enjeu : l’avocate de Martin Dumont, Me Suzanne Gagné, veut contre-interroger Robert Pigeon, directeur des opérations et enquêtes pour la commission.
Me Gagné s’intéressait particulièrement au contexte entourant les aveux de M. Dumont aux enquêteurs, le 11 décembre dernier. L’ancien organisateur politique d’Union Montréal avait admis alors que son témoignage d’octobre devant la commission comportait des erreurs. Ces aveux avaient été enregistrés et ont été diffusés lors des audiences de la commission, lundi.
L’avocate de M. Dumont demandait que la vidéo ne soit pas retenue en preuve puisque les droits fondamentaux de son client auraient été bafoués dans le processus d’obtention des aveux.
Le litige tenait au fait que M. Dumont n’est pas accusé de quoi que ce soit et qu’il n’a pas un statut de participant à la commission, mais bien de témoin. Son avocate ne peut donc pas contre-interroger les témoins ou en citer à comparaitre.
Le procureur adjoint de la commission, Me Denis Gallant s’est questionné sur la pertinence de la démarche et a dit craindre que l’on détourne la mission de la commission.
Il a expliqué que, si M. Dumont était accusé de parjure, les circonstances entourant les aveux sur vidéo seraient pertinentes pour la défense, mais que cette situation est pour le moment hypothétique.
Les avocats des deux côtés ont semblé s’impatienter à plusieurs reprises. La présidente France Charbonneau avait de la difficulté à masquer son exaspération. «Je vais vous demander de baisser le ton,» s’est même interposée la juge Charbonneau à Me Gagné. Cette dernière a toutefois défendu ses arguments sans relâche et a finalement été autorisée à questionner M. Pigeon, créant ainsi un précédent pour d’autres témoins.
Me Gagné a tenté de démontrer que M. Dumont aurait fait des aveux sous la pression et la menace d’accusations de parjure. Me Gagné a même affirmé que M. Dumont a été hospitalisé dans les heures qui ont suivi son interrogatoire.
Me Gagné a souhaité faire entendre d’autres témoins, dont Célina Machado la femme de M. Dumont, qui a été interrogée également par les enquêteurs de la commission, le 11 décembre. Mme Machado travaillait pour Union Montréal en 2005.
C’est à ce moment que la présidente a jugé que la situation avait assez duré et a refusé la demande de l’avocate. Me Gagné en appelle donc de cette décision à la Cour supérieure et a obtenu une suspension du contre-interrogatoire de près de 24 heures, afin de préparer cette requête.
Les différents aveux au cœur du débat
- En octobre, Martin Dumont avait affirmé devant la commission qu’Alexandra Pion, réceptionniste pour Union Montréal en 2005, avait reçu la directive de compter 850 000$ en petites coupures à la demande de Bernard Trépanier, argentier du parti. Elle s’en serait plainte à M. Dumont le lendemain.
- Sur la vidéo du 11 décembre, on entend clairement M. Dumont dire «c’était une fausseté de ma part» en ce qui concerne l’histoire d’une personne qui aurait compté les 850 000$ pour Union Montréal. Puis il ajoute : «j’aurais tout simplement dû dire la vérité».
- Le 21 décembre, Martin Dumont déclare cette fois que l’épisode du 850 000$ a bien eu lieu, mais qu’il n’aurait pas dû nommer le nom de Mme Pion. «J’aurais pas dû, car ce n’était pas sûr à 100%», a-t-il reconnu. «Est-ce que j’ai mélangé des histoires? Peut-être que oui», a-t-il ajouté. Il a insisté qu’il maintenait son témoignage.
Le Faubourg Contrecoeur sous la loupe
Mardi après-midi, Me Claude-Armand Sheppard, avocat de Frank Zampino, a demandé et obtenu une ordonnance de non-publication pour le témoignage d’Isabelle Toupin, sergente superviseure à la Sureté du Québec. Mme Toupin a enquêté sur le Faubourg Contrecoeur, dossier dans lequel M. Zampino, ancien président du comité exécutif de Montréal, est accusé. Me Sheppard souhaite ainsi protéger le droit de M. Zampino a un projet juste et équitable. L’ordonnance est préventive, la commission décidera ensuite du moment où le témoignage pourrait être libéré.