Dépistage: des milliers d’employés de la santé en isolement
Le nombre d’employés du réseau de la santé qui manquent à l’appel augmente au fur et à mesure que le dépistage du coronavirus s’accélère, alors que des milliers d’entre eux sont placés en isolement. Une situation qui sème l’inquiétude au sein du personnel, comme en témoigne une infirmière de l’Hôpital du Sacré-Cœur.
Au moins 2300 employés du réseau de la santé sur l’île de Montréal manquent actuellement à l’appel parce qu’ils ont contracté le coronavirus, selon des chiffres obtenus par Métro.
Alors que la métropole est maintenant l’épicentre au pays de la crise du coronavirus, Métro a contacté tous les CIUSSS et autres institutions de la santé de l’île de Montréal pour savoir combien ceux-ci comptent d’employés atteints de la maladie. Ces employés sont alors placés en isolement pour éviter qu’ils ne contaminent d’autres collègues.
Nord de Montréal
Selon les données fournies, la situation est particulièrement problématique au CIUSSS-du-Nord-de-l’Île-de-Montréal. Ce dernier compte actuellement 799 employés infectés au coronavirus sur un total de 1333 ayant reçu un diagnostic positif depuis le début de la pandémie. C’est donc plus de 10% du personnel qui a contracté ce virus au cours des deux derniers mois.
Dans les dernières semaines, plusieurs éclosions de coronavirus sont survenues à l’Hôpital du Sacré-Cœur, qui compte actuellement 325 employés infectés à la COVID-19.
«On est déjà en manque de plus de 25% de personnel dans notre seule unité parce que plusieurs membres de l’équipe ont été testés positifs à la COVID-19, alors qu’on a testé largement le personnel récemment», confie une infirmière de l’établissement. Cette dernière a préféré conserver l’anonymat.
En entrevue à Métro, elle fait part de l’épuisement des employés toujours en poste, qui doivent compenser l’absence de plusieurs de leurs collègues en effectuant de nombreuses heures supplémentaires.
Par courriel, le CIUSSS indique qu’il fait notamment face à un manque d’infirmières et de préposés aux bénéficiaires. Le centre hospitalier a toutefois réussi, dans les dernières semaines, à recruter près de 700 employés grâce au site «Je contribue». Il a aussi bénéficié des renforts de l’armée dans deux de ses CHSLD.
Notre infirmière craint que les problèmes ne s’aggravent si le déconfinement amène une nouvelle vague de cas de coronavirus. Dans un rapport dévoilé la semaine dernière, l’Institut national de la santé publique souligne que les 41 à 69 ans – donc des travailleurs en grande partie – représentent 27% des hospitalisations et 2% des décès. À noter que c’est dans le Grand Montréal que se concentre l’essentiel du problème.
«Je ne vois pas comment on va pouvoir pallier ce manque de personnel et surtout traiter un nombre accru de patients qui auront besoin de soins spécialisés.» -Une infirmière de l’Hôpital du Sacré-Coeur
Tableau sombre dans l’Est
Le portrait est tout aussi sombre dans le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, qui compte actuellement 831 employés atteints du coronavirus sur un total de 1220 testés positifs depuis le début de la crise. Ceux-ci œuvrent notamment à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont ainsi qu’à l’Hôpital Santa Cabrini.
«Nous sommes continuellement en recrutement et le contexte de la pandémie amplifie nos besoins de main d’œuvre», souligne à Métro la conseillère aux communications du CIUSSS, Catherine Dion. En plus de se tourner vers des plateformes de recrutement de main-d’œuvre, le centre hospitalier a dû faire appel à des retraités du réseau de la santé, aux Forces armées canadiennes de même qu’à des employés du réseau «provenant des régions», ajoute-t-elle.
Le CIUSSS du Centre-Ouest compte pour sa part 351 employés testés positifs au coronavirus, dont 100 œuvrant au sein de l’Hôpital général juif de Montréal. Il a toutefois été impossible de savoir si le recrutement de main-d’œuvre permet actuellement de répondre aux besoins dans cet établissement.
«Nous gérons plusieurs mouvements internes à l’hôpital», indique un agent d’information, Barry Morgan.
Le CHUM comble ses besoins
Au CHUM, la situation semble davantage sous contrôle. En tout, plus de 2600 tests de dépistage y ont été effectués. L’établissement ne recense toutefois que 170 employés infectés au coronavirus depuis le début de la crise sur un total d’environ 14 000 personnes. Le CHUM a d’ailleurs réussi à recruter plus de 200 employés, notamment en faisant appel à des retraités et en utilisant la plateforme «Je contribue».
«Il faut toutefois considérer la formation et les qualifications de ces nouveaux employés en regard des besoins, qui sont eux-même variables au gré de l’évolution de la pandémie», note une porte-parole du CHUM, Lucie Dufresne.
Le CUSM recense pour sa part 172 employés diagnostiqués positifs au virus, tandis que le CHU Sainte-Justine en dénombre 48 depuis le début de la pandémie.
Le ministère de la Santé et des Services sociaux n’a pas donné suite aux demandes de Métro, mercredi.
Avec la collaboration de Marie-Claude Di-Lillo.