Une fête nationale méconnaissable
Même si les mesures sanitaires sont assouplies, la plupart des Montréalais semblent envisager de se réunir seulement en petits groupes lors de la Fête nationale, qui sera loin d’être comme les précédentes.
Le déconfinement se fait un peu trop rapidement pour la Montréalaise Amanda Cantor, qui va s’abstenir de célébrer cette année. «Si j’étais dans une fête, je ne me sentirais pas à l’aise, même si les petits groupes sont permis», dit-elle, alors qu’elle avait l’habitude de participer aux diverses activités de la Saint-Jean.
«Les citoyens ne vont pas se lancer dans de grandes festivités. Cette année, ça va être à un niveau très, très local», mentionne le professeur au département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Frédérick Guillaume Dufour.
Fête virtuelle
Parmi les célébrations organisées par le Comité de la Fête nationale du Québec à Montréal (CFN), pour la 186e édition un grand spectacle intitulé Tout le Québec à l’unisson sera diffusé sur les quatre grands réseaux télévisés et plusieurs chaînes de radio.
Le 23 juin, à 19h, une quarantaine d’artistes offriront une prestation musicale animée par le duo Ariane Moffatt et Pierre Lapointe. «Habituellement, il y avait un million et demi de téléspectateurs à la fois […] et on compte bien que ce soit encore beaucoup plus imposant», mentionne Louise Harel, présidente du CFN.
Le lendemain à la même heure, les gens sont invités à sortir sur leur balcon ou dans leur jardin pour participer à ce qui se veut «la plus grande chorale québécoise jamais vue». Les participants chanteront le célèbre Gens du pays de Gilles Vigneault.
Ils pourront suivre la cadence entre autres grâce au Facebook livre du CFN. «Ce sera une belle occasion d’apprendre les couplets de la chanson, parce que tout le monde connaît le refrain bien sûr», lance Mme Harel.
Elle est d’avis que le sentiment d’unité nationale sera aussi vibrant cette année. La chorale du 24 juin permettra particulièrement de jouer ce rôle, croit-elle. On revivra de grands rassemblements pour fête la Saint-Jean-Baptiste, estime Mme Harel. «Une pandémie, ça a un début et une fin. Est-ce qu’on se rassemblera à nouveau l’an prochain? Je me croise les doigts», conclut-elle.
Par ailleurs, en raison de la sécheresse des derniers jours, il est interdit de faire des feux partout au Québec.
«On est plus Québécois que jamais. On achète local et on s’entraide.» – Rosemai Beauregard-Langelier, Montréalaise
Nouvelle génération
Sauf exception, contrairement aux autres provinces canadiennes, le Québec a toujours eu une approche différente quand vient le temps de fêter son anniversaire. «Il y a vraiment l’aspect canadien-français qui a toujours été très fort ici. C’est une fête qui a été portée par la Société Saint-Jean-Baptiste et le Parti québécois par la suite», indique Frédérick Guillaume Dufour.
Avec la baisse de la popularité de l’indépendance du Québec, le sens donné à l’événement a changé dans les dernières années, souligne M. Dufour. «La question de savoir si les porte-parole doivent faire la promotion de la souveraineté ou le message du ‘le Québec, un pays’, ça, on sent que ça doit titiller les organisateurs», explique-t-il.
Depuis la première célébration en 1834 à l’occasion d’un grand banquet organisé entre autres par Ludger Duvernay, fondateur de la CFN, en passant par les festivités agitées de 1968 lors du passage de Pierre-Elliott Trudeau à Montréal, les célébrations de cette année marqueront aussi à leur manière les pages de l’histoire.
1977
Alors que René Lévesque était le premier ministre du Québec, c’est l’année où il adopte un décret pour faire du 24 juin non plus seulement une fête patronale, mais la fête nationale de tous les Québécois.