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Oui, le couvre-feu est efficace contre la COVID-19, montrent des données

Le pont Jacques-Cartier après le couvre-feu de 20h, sous l'oeil de patrouilleurs du SPVM. Photo: Josie Desmarais/Métro

Le couvre-feu a provoqué une baisse significative des déplacements dans la région de Montréal, un indice clair que la mesure très coercitive a permis de réduire les contacts et est donc efficace contre la COVID-19, selon une spécialiste en santé publique.

Métro a obtenu des données auprès du ministère des Transports (MTQ) et de la Société de transport de Montréal (STM). Celles-ci montrent que le couvre-feu a provoqué une diminution d’achalandage sur les routes et dans les transports collectifs.

Sur les routes

Le MTQ observe périodiquement le débit de trafic sur plusieurs tronçons d’autoroutes à Montréal. Métro a sélectionné quatre points d’observation, soit l’autoroute Décarie (entre Jean-Talon et l’autoroute 40), le pont Charles-de-Gaulle, le pont Médéric-Martin et le pont Papineau-Leblanc.

Nous avons pris comme points de référence le lundi 23 novembre, alors que Montréal était en zone rouge depuis près de deux mois, et le lundi 11 janvier, journée où un couvre-feu était imposé au Québec depuis 48 heures.

Résultats: sur 24 heures, la circulation a baissé de 13,1%. Cela s’explique sans surprise par la baisse d’achalandage après 20h, qui s’élève à 63,2%. Cette baisse du nombre de véhicules sur les routes est considérée comme «significative» par le professeur titulaire en transports à Polytechnique Montréal, Nicolas Saunier.

«On voit que l’effet du couvre-feu est clair, commente-t-il. La variation sur une journée serait comparable à une période de vacances versus une période d’activité économique. C’est de cet ordre de grandeur là.»

Pour lui, ce sont les données après 20h qui sont cependant les plus impressionnantes.

«C’est intéressant de voir quelque chose d’aussi drastique. À ma connaissance, il y a peu d’autres événements qui peuvent provoquer une baisse aussi importante, à part des catastrophes naturelles ou des travaux majeurs.» -Nicolas Saunier, professeur titulaire en transports à Polytechnique Montréal

Ceux qui croient que ces déplacements ont simplement eu lieu tout juste avant le couvre-feu se trompent. Entre 19h et 20h, la diminution est de 16,5%, toujours en comparant ces deux mêmes dates.

Toutefois, en termes d’impacts sur les déplacements sur les routes, le couvre-feu n’est pas aussi efficace contre la COVID-19 que les mesures draconiennes de mars 2020, lorsque le Québec a été «mis sur pause». Le 23 mars 2020, il y avait 43,6% moins de véhicules sur les points de passages analysés que le 11 janvier 2021.

À la STM

La STM n’a pu nous fournir des données d’achalandage de ses autobus. Cependant, nous avons pu obtenir les statistiques du métro de Montréal, qui offre un autre indice que le couvre-feu est efficace pour réduire l’usage du transport en commun et lutter contre la COVID-19.

Si l’on considère que l’achalandage prépandémie de la STM représente 100%, le couvre-feu a fait passer le nombre de passages dans le métro à 25%. Pendant la pandémie, mais avant le couvre-feu, l’utilisation de ce mode de transport souterrain était plutôt à 35%.

Après 20h, où seuls les déplacements essentiels sont permis, l’achalandage du métro est à seulement 10% de son achalandage normal pour cette plage horaire. La STM «a retrouvé niveau d’achalandage que nous avions connu lors du premier confinement en avril 2020 où seulement les déplacements essentiels étaient permis», explique Amélie Régis, porte-parole de la STM.

Encore une fois, l’augmentation appréhendée entre 19h et 20h ne semble pas se matérialiser selon les chiffres de la STM. La moyenne de passages par jour la première du couvre-feu a diminué de 10% par rapport à la semaine précédente pour cette heure précise.

Un «effet réel» sur les contacts

Jeudi, le premier ministre François Legault défendait à nouveau l’efficacité du couvre-feu pour prévenir la transmission du coronavirus. «Depuis qu’on applique le couvre-feu, il y a moins de visites dans les maisons, il y a moins de contagion, en particulier chez les personnes de 65 ans et plus. Donc, en tout cas, le modèle, au total, qu’on a actuellement donne de bons résultats», a-t-il dit lors d’une conférence de presse.

Plus tôt cette semaine, des experts affirmaient à Radio-Canada qu’on ne saurait «jamais» l’impact réel du couvre-feu sur le nombre de cas, puisqu’un ensemble de mesures est actuellement déployé.

La professeure de l’École de santé publique de l’Université de Montréal Roxane Borgès Da Silva est d’accord sur un point: il est impossible de calculer statistiquement quelle portion de la baisse du nombre de cas provient du couvre-feu. Mais il ne fait aucun doute pour elle que la mesure fonctionne. La baisse observée des déplacements dans la région de Montréal est un indice que la mesure a «un effet réel» sur les contacts, soutient-elle.

«Forcément, si le nombre de personnes qui sort de chez soi diminue, ça veut dire que le nombre de contacts va diminuer. C’est très, très sûr qu’une mesure comme le couvre-feu permet de minimiser les contacts en soirée et de nuit, explique-t-elle. Mme Borgès Da Silva souligne qu’une étude scientifique sur l’impact du couvre-feu en France est arrivée à une conclusion similaire.

«C’est une mesure très coercitive qui force les gens à rester chez eux. Contrairement aux mesures incitatives qu’on avait auparavant qui demandaient aux gens de rester chez eux, mais pour lesquelles il était difficile de vérifier.»  -Roxane Borgès Da Silva, professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal

L’économiste explique également que la mesure vient prévenir plus efficacement les rassemblements illégaux, qui se déroulent surtout en soirée, selon elle. «Ça n’a réellement un effet que sur les réfractaires», souligne-t-elle.

En collaboration avec Sami Bouabdellah, Katrine Désautels et François Lemieux

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