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À l’épreuve de l’apathie

Photo: iStock

CHRONIQUE – Je suis entourée de personnes engagées qui consacrent un temps fou à de multiples causes. Dans le contexte actuel d’élections municipales, elles mènent des batailles locales, soirs et fins de semaine, déterminées à améliorer la vie dans leurs quartiers. 

L’engagement occupe une place importante dans ma vie également. J’y rencontre exaltations et innombrables déceptions. S’engager pour la justice sociale, c’est tendre l’oreille, prêter attention à ce qui ne va pas, et conséquemment éprouver souvent une espèce d’inconfort latent. Les situations injustes sont ressenties avec une intensité décuplée. 

Malgré tout, je ne me verrais pas faire autrement. 

Le déclic s’est produit au cégep. Une enseignante nous avait montré le documentaire Reel Bad Arabs, dans lequel le réalisateur Sut Jhally se penche sur la représentation des Arabes dans les films américains. Le racisme, à cette époque, restait pour moi quelque chose de nébuleux, qui faisait irruption dans ma vie une fois de temps en temps, et de manière plus soutenue les mois qui ont suivi le 11-Septembre, mais sans que je parvienne à le décoder. 

Après avoir visionné le film, j’ai choisi la pilule rouge. Je voulais, je devais, comprendre la mécanique des préjugés et des stéréotypes. Depuis, l’engagement n’a jamais tari. 

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Pourquoi s’imposer ça? Pourquoi passer des soirs et des fins de semaine dans des rencontres de réflexion et de planification, manifester, rédiger des textes engagés, documenter, revendiquer, plonger tête première dans l’univers angoissant des inégalités, des injustices, des violences symboliques et matérielles? Est-ce que ça en vaut vraiment la peine? 

Sans le moindre doute, oui. 

Passer à l’action et militer est une voie salvatrice qui permet de ne pas être assommé par le désespoir. On sait qu’on ne gagnera pas à tout coup, mais, au risque de reconduire un cliché, savoir qu’on s’est battu vaut aussi son pesant d’or. 

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La crise climatique est probablement l’exemple le plus parlant. Celle-là, si on l’échappe, il n’y aura pas de prise deux. Pour certain·e·s, tout est déjà foutu, pour 

d’autres, il est encore possible de préserver un peu de bienveillance, d’empathie, d’altruisme, et d’espérer qu’on subsistera dans un monde en déliquescence. Faire reculer les inégalités maintenant, c’est alors contribuer à l’édification de communautés solidaires où les un·e·s les autres se soutiendront à mesure que la situation s’aggravera (quand, par exemple, l’accès aux denrées alimentaires sera menacé ou que la chaleur deviendra infernale). 

À ce propos, des nouvelles tragiques nous parviennent de Madagascar. Une famine frappe le pays, plus d’un million de personnes souffrent aujourd’hui de malnutrition aiguë. Le réchauffement climatique en est la cause. Partout, les évènements désastreux nous guettent. En août dernier, des cours d’eau en Estrie, à Québec, en Mauricie, dans Lanaudière, entre autres, étaient à sec. La Ville de Québec a dû poser des restrictions pour l’utilisation d’eau potable. 

Anxiogène à souhait… 

Pour se protéger, il serait tentant de tasser les mauvaises nouvelles, de s’engourdir l’esprit dans l’espoir plus ou moins conscient de tenir la menace à l’écart. Le sentiment d’impuissance est un sédatif efficace. Mais en ce qui a trait à la crise climatique, tout déni nous rattrapera. 

Passer à l’action, donc, saisir la peur à bras-le-corps, et tout faire pour gagner de petits et de grands combats. Face au réchauffement climatique, on devrait tous et toutes être militant·e·s. 

*** 

Ce qualificatif n’a pas la cote, c’est vrai. Pour les champions de l’immobilisme, être militant·e, ce serait nécessairement être dogmatique, irrationnel·le, extrémiste. Dans l’objectif de discréditer les idées progressistes et celles et ceux qui les défendent, il est brandi comme une insulte, une infâme étiquette. On gagne à ne pas céder à ces manipulations politiques. 

Je l’aime, moi, ce qualificatif, antithèse de l’apathie. J’aime et j’admire celles et ceux qui s’affairent sans complexe à améliorer le sort du monde.

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