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«Koros»: quand danse et réalité virtuelle se rencontrent

La chorégraphe Margie Gillis signe une des œuvres de «Koros». Photo: Agora de la danse

Avec Koros, l’Agora de la danse tente une première incursion dans le monde de la réalité virtuelle. La compagnie de spectacles spécialisée en danse contemporaine réunit trois œuvres en une même expérience, une proposition réussie qui risque de faire des petits.

Les grandes chorégraphes Hélène Blackburn, Andrea Peña et Margie Gillis (qui s’apprête à célébrer ses 50 ans de carrière avec un ultime solo, OLD) offrent chacune un extrait d’une dizaine de minutes tiré de leur répertoire respectif et adapté spécialement pour ce nouveau projet.

Trois œuvres, une expérience

Seule œuvre interactive du lot, The Complex Simplicity of Love de Margie Gillis est tirée d’une pièce née il y a 20 ans du désir de danser avec quelqu’un qui était absent. C’est justement ce qu’on fait en laissant aller nos bras en accord avec la créatrice et deux de ses complices, les danseuses Geneviève Boulet et Susan Paulson, qui usent de mouvements circulaires et jouent sur le vide, faisant ressortir la présence dans l’absence.

Plus provocant, l’extrait de 6.58 manifesto d’Andrea Peña puise sa force dans l’inconfort qu’il peut provoquer. On est installé au milieu d’une pièce, parfois déplacé (une sensation physique étonnante est d’ailleurs provoquée par cette illusion), toujours entouré, à 360 degrés, de huit danseur.euse.s dévêtu.e.s. Ponctuée de notes inquiétantes poussées par l’envoûtante soprano Erin Lindsay, l’œuvre est déstabilisante et profondément transformée par la réalité virtuelle, car jamais une telle relation ne pourrait se construire ainsi entre les interprètes et le public dans le vrai monde.

Notre coup de cœur demeure Allegro Barbaro d’Hélène Blackburn, expérience également à 360 degrés. Sur une scène sombre, éclairée de rares faisceaux de lumière, on s’amuse à chercher et retrouver les 10 interprètes qui circulent autour de nous, toujours dans une grande proximité. La chorégraphie est inspirée par la théorie (évacuée de la science moderne, précisons) des quatre tempéraments, soit sanguin, colérique, flegmatique, mélancolique, qui sont illustrés par les mouvements, mais aussi par les sons des pas sur le sol et les bruits décuplés de la respiration.

C’est dans des éléments comme ceux-là que l’expérience Koros est complètement inédite et ne pourrait être vécue autrement. Jamais, dans une salle de spectacle, on ne pourrait imaginer une proximité telle que chaque souffle de chaque danseur.euse est entendu et devient partie intégrante de l’œuvre.

Avis aux personnes sujettes au FOMO (fear of missing out, ou la peur de manquer quelque chose): un peu comme sur une scène où on ne peut pas voir chaque action à la fois, Koros implique qu’on fait parfois dos à l’action. On comprend cependant assez rapidement qu’il y a souvent un effet miroir: soit les mouvements se répètent devant et derrière nous, soit des interprètes sont immobiles dans un angle alors que d’autres sont en train de danser.

Cette première expérience de réalité virtuelle par l’Agora de la danse suscite déjà de l’intérêt. En plus des projections déjà prévues les 17, 18 et 19 février, des supplémentaires ont été ajoutées pour les 23, 24, 25 et 26 février, toujours à raison de plusieurs représentations par jour, à l’Édifice Wilder.

Beaucoup plus faciles à transporter en tournée qu’une troupe complète, les casques de réalité virtuelle, Koros et d’autres œuvres à venir pourraient bien ouvrir une nouvelle porte à la danse contemporaine, sans remplacer la scène.

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