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McMurchie au tribunal

Alors que plusieurs ouvriers de la construction était en arrêt de travail forcé en début de semaine, les deux avocats du maire de Pointe-Claire tout comme ceux des journaux The Gazette et La Presse n’ont pas chômés. Durant trois jours, des témoins ont défilé en Cour supérieure à cause d’une couverture médiatique qui aurait nui à la réputation du maire Bill McMurchie, il y a trois ans. Montant de la poursuite contre les deux médias: 150 000$.

L’histoire a débuté le 15 juillet 2008, alors qu’un article écrit par le journaliste Éric Clément de La Presse compare les frais de représentation des élus municipaux des villes défusionnés de l’île de Montréal. Sous le titre «Un maire chiche, un autre prodigue», il est relaté qu’en 2007, le maire de Côte-Saint-Luc avait seulement dépensé 262,60$ tandis qu’à l’opposé le maire de Pointe-Claire avait dépensé 23 609,35$. Le montant a été corrigé à la cour par La Presse à près de 22 000$ à cause d’une erreur de calcul.

Durant cette même journée, la station de radio CJAD reprend la nouvelle, tout comme la station de télévision CFCF (CTV). Le tourbillon médiatique prend de l’ampleur à une vitesse telle que le maire se dira «dévasté» en cour. Deux jours plus tard, le 17 juillet, le cahier West Island Gazette, publie un article intitulé «Mayors spending more than most».  

Lundi, le maire a révélé que le matin du 15 juillet 2008, il jouait tranquillement au club de golf de l’île Perrot quand une joueuse de golf l’a informé au sujet de l’article paru dans La Presse. M. McMurchie est aussitôt retourné au bureau vers 9h ce matin-là. Un peu nerveux, le maire a poursuivi son témoignage en disant qu’il s’était alors questionné à savoir s’il devait tenir une conférence de presse ou envoyer un communiqué de presse pour rectifier les faits. Un premier communiqué de presse a été envoyé aux médias. Tout au cours de la journée, le bureau du maire recevra un flot incessant d’appels. Le maire ne répondra pas aux appels des journalistes durant deux jours.

Finalement, le 24 juillet, la Ville de Pointe-Claire envoie une mise en demeure aux quatre médias leur demandant de se rétracter.

Le 14 août, la station de télévision CTV présente ses excuses au maire lors des bulletins de nouvelles de midi et de 6h.                                                                                                         

Une entente confidentielle

En octobre 2009, une entente confidentielle intervient entre le maire de Pointe-Claire et la station de radio CJAD. Questionné en cour par l’avocat de The Gazette,  Mark Bantey, pour connaître le montant de cette entente, le maire McMurchie n’a pas tout de suite voulu répondre. L’un de ses avocats, Alain-Claude Desforges, non plus. Toutefois, le juge Roger Baker en a décidé autrement. Celui-ci a ordonné au maire de dévoiler le montant. Au final, CJAD a donné 19 000$ à la Ville de Pointe-Claire, soit 10 000$ en frais d’avocat et 9000$ pour des dons à la Fondation de l’hôpital du Lakeshore et à la Résidence de soins palliatifs de l’Ouest-de-l’Île. De plus, CJAD s’est rétracté cinq fois en onde le 14 octobre 2009. La station de radio s’est donc vu retiré de la poursuite. Le réseau CTV n’a pour sa part jamais été poursuivi en cour, puisqu’il s’est rétracté après la mise en demeure.    

The Gazette se défend

«Notre défense au journal The Gazette c’est que notre article était véridique et dans l’intérêt public. On n’a pas commis d’erreur. M. McMurchie reproche à CTV et CJAD d’avoir affirmé qu’il avait dépensé 23 000$ sur des repas. Effectivement, c’était une erreur de la part de CJAD et de CTV. Ils ont mal lu l’article de La Presse. La Presse n’a pas dit que M. McMurchie avait dépensé 23 000$ sur des repas. Il avait dépensé un total de 23 000$. The Gazette n’a pas dit non plus que M. McMurchie a dépensé 23 000$ sur des repas. On a tout simplement fait état que le total de ses dépenses était de 23 000$ et que c’était le plus élevé des maires de l’île de Montréal, à part le maire de Montréal. S’il y a une erreur qui a été faite, c’est par CJAD et CTV. Ils se sont corrigés. CJAD a diffusé une correction et CTV a fait la même chose», a souligné l’avocat du journal The Gazette, Mark Bantey au Cités Nouvelles. Aucun témoin n’a été assigné en cour pour le journal anglophone.   

Réplique de la Ville de Pointe-Claire

«Nous on prétend que les articles étaient diffamatoires à l’égard de M. McMurchie et eux prétendent qu’ils ne l’étaient pas», souligne l’un des avocats de la ville de Pointe-Claire, Yvon Denault. Celui-ci ajoute «Ils ne sont pas d’accord avec le fait que dans le titre ils ont mis qu’il était prodigue. Selon nous, selon le dictionnaire, ça veut dire quelqu’un qui fait des dépenses inutiles. Eux disent, non ce n’est pas que ça veut dire. Ça veut dire quelqu’un qui dépense le plus. Celui qui dépense le plus ça ne veut rien dire… Notre prétention c’est que l’erreur de CTV et CJAD vient de la lecture qu’ils ont fait de l’article de La Presse». M. Denault a avoué au journal Cités Nouvelles avoir au réclamé plus d’argent, mais s’attend à en avoir moins. Les avocats de M. McMurchie ont fait témoigner: le principal intéressé et la trésorière de l’époque, Lyne Goulet. De plus, Tommy Schnurmacher (CJAD), Egbert Gay (CJAD à l’époque), Murray Sherriff (CJAD), Robert Lurie (CTV) et Barry Wilson (CTV) ont aussi témoigné sur des faits.    

Du côté de La Presse, le journaliste Éric Clément et le chef pupitre, adjoint au directeur à l’information, Simon Kretz ont témoigné. Le journaliste a souligné s’être rendu dans 13 des 15 villes défusionnées (exception de Senneville et l’île Dorval) pour mener son enquête. Des demandes d’accès à l’information ont au préalable été envoyées aux différentes villes pour connaître les dépenses des élus. M. Clément a aussi souligné s’être déjà rendu à deux reprises couvrir des séances du conseil de Pointe-Claire par le passé. Le journaliste disait également avoir établi un bon contact avec la porte-parole de la Ville, Ginette Brisebois. Un peu plus tard, celui-ci a été questionné par l’avocat Claude Desforges et le juge à savoir pourquoi il n’avait pas appelé le maire McMurchie pour connaître sa position. «Pour le maire McMurchie, pour la ville de Pointe-Claire, il n’y avait rien (des dépenses) qui sortait de l’ordinaire», a mentionné Éric Clément.     

Des frais en partie payé par les contribuables

Rappelons que le 22 septembre 2008, le conseil municipal de Pointe-Claire a adopté le règlement PC-2753 qui indemnise les élus en cas d’atteinte à leur réputation. «Sur demande, le conseil peut autoriser le paiement d’une indemnité à toute personne qui a subi un préjudice matériel en raison de l’exercice de ses fonctions de membre du conseil», peut-on lire dans le règlement entré en vigueur le 1er octobre 2008. Les frais légaux encourus dans le cas d’une atteinte à la réputation peuvent donner lieu au paiement d’une indemnité, est-il précisé dans le texte. Ainsi donc, les frais d’avocat du procès sont partiellement remboursés par les contribuables de Pointe-Claire grâce au règlement municipal.

Le 17 août 2009, le maire McMurchie affirmait au journal Cités Nouvelles que «le coût des frais d’avocat (pour sa requête) s’élève à près de 25 000$». Le montant a depuis augmenté a révélé le maire mercredi.

À noter que le maire Bill McMurchie et le journaliste Éric Clément ont assisté aux trois jours du procès même s’ils n’ont comparu qu’une journée chacun. 

Le juge Roger Baker a six mois pour rendre son verdict.

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