Simon, le premier bébé-éprouvette du Québec, a 30 ans
Alors qu’il a fêté ses 30 ans lundi, le premier bébé québécois à avoir été conçu par fécondation in vitro (FIV) a décidé de lever le voile sur son identité. Simon Bousquet-Richard a choisi de se confier en exclusivité à TC Media pour parler de son histoire qui a bouleversé le visage des naissances au Québec.
Impossible de savoir que, dans la vie de ce trentenaire, se cache un pan de l’Histoire scientifique du Québec. «Ce n’est pas quelque chose que je révèle dès que je rencontre quelqu’un», lance, amusé M. Bousquet-Richard, né le 10 août 1985.
Pourtant, pas de secret ni de tabou dans la famille; ses parents ne lui ont jamais caché que sa conception était le résultat d’une FIV. «On me l’a expliqué avec des mots simples. À l’époque, je pensais que j’avais été un petit bébé dans un pot qu’on avait remis dans le ventre de sa mère», explique-t-il.
S’il a toujours su, le trentenaire a quand même été protégé. «Je ne voulais pas que les gens disent à mon fils: « C’est toi le premier bébé éprouvette!” Je ne m’en vantais pas, mais je ne m’en cachais pas non plus», explique sa mère, Madeleine Richard.
Faire évoluer les mentalités
Entre 2009 et 2013, au Québec, on estime «la proportion des nouveau-nés vivants issus de la procréation assistée» à près de 1,5 % chaque année, selon des données publiées dans l’Avis synthèse sur les activités de procréation assistée au Québec, rédigé par le Commissaire à la santé et au bien-être.
Or, il y a 30 ans, le phénomène était encore méconnu. «Nous avons commencé nos recherches en 1967 […]. C’est après la naissance de Louise Brown, en 1978, en Angleterre que l’on a vraiment commencé à mettre nos techniques au point», indique le docteur Jacques Émile Riou, considéré, avec son collègue Raymond Lambert, comme les «pères» de la FIV au Québec.
Mme Richard a dû répondre à beaucoup de questions afin de démêler le vrai du faux.
«On associait cela au clonage ou à toutes sortes de choses. Des gens me demandaient si je pouvais le voir dans un bocal, alors que j’étais enceinte. D’autres me questionnaient pour savoir s’il avait un nombril. Des gens d’une certaine confession religieuse m’ont appelé pour me dire que ce que l’on avait fait était épouvantable et que l’on avait offensé Dieu», raconte-t-elle.
Finalement, Mme Richard a toujours accepté d’expliquer son expérience aux personnes qui l’interrogeaient, mais a préféré laisser d’autres familles devenir les porte-voix de la FIV au Québec.
Quant à son fils, il n’a jamais subi le poids de son histoire sur ses épaules et avoue avoir «fait quelques recherches» sur la question, mais sans plus. «Je n’étais pas comme un enfant qui n’avait pas eu de parents. Et puis, les mentalités ont évolué depuis», poursuit-il.
Le bébé de la dernière chance
Incrits depuis plusieurs années sur une liste d’attente pour adopter, les parents du petit Simon, qui habite aujourd’hui Rosemont–La Petite-Patrie, ont participé au tout premier groupe québécois de FIV sous la supervision des docteurs Lambert et Riou.
Mme Richard a été la dernière des 10 femmes du programme.
«Je me souviens que c’était un vendredi de novembre. J’étais dans le bureau du médecin et tout le monde était excité. On me disait que le résultat n’était pas négatif, mais personne ne savait ce que cela voulait vraiment dire, car c’était la première fois que cela se produisait», se remémore-t-elle.
Ce moment, le docteur Riou le garde gravé dans sa mémoire, tout comme la naissance du bébé. «Dès qu’il est né, on a sauté dans notre char pour aller le voir. On était très heureux de l’avoir dans nos bras», se souvient encore le médecin, qui est à la retraite depuis 15 ans.