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Bavures policières: des familles demandent la fin de l’impunité

Familles de victimes de bavures policières
Des familles, comme celle de Tracy Wing (à gauche), se sont rassemblées devant la Fraternité des policiers et des policières de Montréal pour demander la fin de l’impunité pour des policiers qui tuent des personnes lors de l’exercice de leurs fonctions. Photo: Josie Desmarais/Métro

Pour la dixième année à Montréal, des familles se sont rassemblées devant les bureaux de la Fraternité des policiers et des policières de Montréal pour demander la fin de l’impunité pour les policiers qui tuent des personnes lors de l’exercice de leurs fonctions.

La Coalition Justice pour les victimes de bavures policières tient une vigile annuelle depuis 2010. «Neuf ans après notre première vigile, malgré l’entrée en fonction du Bureau des Enquêtes indépendantes (BEI) en 2016, force est de constater que peu de choses ont vraiment changé», indique l’organisme.

La Coalition dénonce le manque d’indépendance du BEI par le fait que les trois quarts des enquêteurs sont d’anciens policiers et qu’ils enquêtent parfois sur le corps policier pour lequel ils ont travaillé. L’organisme déplore aussi le manque d’accusations portées par le DPCP contre les corps policiers dans des cas de décès en détention ou interpellation policière. «Les policiers continuent de tuer impunément», fait-on valoir.

C’est aussi ce que croit Tracy Wing qui a déposé une plainte contre la SQ et le BEI au Commissaire à la déontologie policière du Québec. Son fils, Riley Fairholm, a été tué à seulement 17 ans. Il souffrait de dépression. Le 25 juillet 2018 à 1:48, Riley a envoyé un message texte à sa mère lui disant: «Je t’aime». Elle arrive chez lui six minutes plus tard, plusieurs voitures de police sont sur place, il est alors abattu, raconte-t-elle.

«[Les policiers] ont juste à dire qu’ils ont eu peur et c’est toujours la victime qui est blâmée pour sa mort», indique-t-elle.

Impunité pour les policiers

Depuis l’ouverture du BEI, aucune accusation n’a été portée pour la mort d’une personne sous détention ou interpellation policière par le DPCP.

Une situation que dénonce Cesur Celik, le père de Koray Kevin Celik, tué à 28 ans en 2017. Le jeune homme est décédé suite à un appel que la famille a logé, car il voulait conduire sous l’influence de l’alcool et avait pris des médicaments contre la douleur. «Il était en crise, les policiers le savaient, car on leur a dit au téléphone et lorsqu’ils sont venus», raconte-t-il au bout du fil. «Ils l’ont tabassé devant nous». Koray Kevin est mort suite aux violences qu’il a subies.

Selon Cesur Celik, le BEI n’a pas mené une enquête indépendante. «Ils nous ont caché des éléments et étaient en conflits d’intérêts à travers leur prétendue indépendance», plaide-t-il.

Comment fonctionne une plainte ?

Lorsqu’une personne meurt pendant une interpellation policière, le Bureau des Enquêtes indépendantes (BEI) a le devoir de mener une enquête sur les conditions qui ont mené au décès de la victime. Le BEI dépose ensuite son rapport au Directeur des Poursuites criminelles et pénales (DPCP). Ce dernier analyse le dossier en vertu du Code criminel et non en vertu du Code de la déontologie policière.

La famille des victimes peut porter plainte au Commissaire à la déontologie policière qui enquête sur les décès et les actions des policiers avant, pendant et après l’intervention. La plainte doit être émise dans un délai de prescription d’un an après l’incident, ce qui complique la tâche pour les familles qui reçoivent rarement des informations sur les policiers en cause et les détails du décès avant le rapport du DPCP, souvent remis plus d’un an après les faits. Une situation que déplorent les familles.

C’est seulement suite à l’aide du porte-parole de la Coalition contre la répression et les abus policiers (CRAP), Alexandre Popovic, que Tracy Wing et Cesur Celik ont su qu’ils pouvaient émettre des plaintes au commissaire. «Le BEI ne m’en avait pas informé», déplore Tracy Wing. «On ne le savait pas», martèle pour sa part Cesur Celik.

En entrevue avec Métro en mai dernier, la secrétaire générale du Commissaire à la déontologie policière, Louise Letarte expliquait que le commissaire suspend les enquêtes à son dossier lorsqu’il y a une enquête du BEI, jusqu’à ce que le DPCP remette son analyse. S’il n’y a pas d’accusations, les démarches d’enquête du commissaire reprennent, expliquait-elle. Un fait qui n’est pas connu de plusieurs familles dont les proches sont décédés aux mains de la police, déplore Alexandre Popovic.

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