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En grève de la faim pour obtenir le marqueur de sexe X sur sa carte d’assurance maladie

Photo: Drew Angerer/Getty Images

Un an après l’entrée en vigueur de la réforme du droit civil, une personne non-binaire ne parvient toujours pas à obtenir sa carte d’assurance maladie avec le marqueur de sexe X. Après plusieurs démarches infructueuses auprès de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ), Alexe Frédéric Migneault entamera une deuxième grève de la faim, le 10 juillet prochain, dans l’espoir de faire bouger les choses.

Dès les semaines qui ont suivi l’adoption du projet de loi no 2 (PL 2), en juin 2022, la législation concernée a été actualisée conformément au jugement «Moore» en rendant possible pour les personnes non-binaires de voir inscrite une mention du sexe «X» sur leurs actes de l’état civil, soit les actes de naissance et de décès.

Or, si Alexe Frédéric Migneault a réussi à modifier le marqueur de sexe sur son certificat de naissance sans problème, iel* ne parvient toujours pas à faire de même sur sa carte d’assurance maladie. «La réforme du droit civil a bien eu lieu, mais ils (les employés de la RAMQ) se demandent si ça s’applique», explique au bout du fil Alexe Frédéric Migneault, qui dénonce l’inaction de l’organisme gouvernemental à s’y conformer.

Une première grève de la faim

Après une première grève de la faim, qui a duré 8 jours, au mois de mai, Alexe Fréderic Migneault a réussi à obtenir un document temporaire de la RAMQ avec le marqueur de sexe X. Le document était similaire à celui que l’organisation remet aux personnes qui ont perdu leur carte d’assurance maladie, précise-t-iel.

Mais Alexe Frédéric Migneault déplore que lorsque utilisé, le papier transmette encore toutes ses vieilles informations, dont son sexe assigné à la naissance, le rendant donc inefficace pour les personnes non-binaires. 

«Ce que j’ai réalisé par la suite en consultant mon dossier médical, c’est que les informations qui étaient téléchargées avec cette confirmation d’inscription dans les données de la RAMQ transmettaient encore les vieilles infos même si j’avais censuré la partie du bas… et elles apparaissent maintenant dans mes dossiers là où je suis allé.e avec ce papier-là».

À ce moment, iel contacte la RAMQ pour lui faire part du problème qui persiste, mais rien ne change. «Je leur ai donc annoncé que j’allais refaire une grève de la faim parce que je ne vais pas bien. Je suis en arrêt de travail, j’ai des idées suicidaires, je suis en dépression majeure, je ne fonctionne pas. J’ai de la difficulté à tout faire…», affirme Alexe Frédéric Migneault.

Je ne vais vraiment pas bien j’ai besoin de soins de santé, mais si je n’ai pas un papier qui va m’appuyer ou qui va m’aider à aller chercher de l’aide, je n’aurai pas d’aide.

Alexe Frédéric Migneault

Des changements qui prennent du temps

Selon la RAMQ, le changement du marqueur de sexe sur les cartes d’assurance maladie ne dépend pas d’elle, mais bien de l’avancement des travaux ministériels.

En effet, un comité interministériel sur les marqueurs de genre et de sexe, où siègent 20 ministères et organismes, a été mis sur pied par le gouvernement du Québec. Supervisé par le ministère des Relations internationales et de la Francophonie (MRI), le comité s’est rencontré pour une première fois en avril 2022.

«Des changements qui ne concernent pas les documents de l’état civil, comme la carte d’assurance maladie, ne peuvent pas être mis en œuvre aussi rapidement», indique la directrice des communications et des affaires publiques du MRI, Sylvie Leclerc. 

Il faut donc attendre la fin des travaux du comité interministériel sur les marqueurs de genre. C’est seulement «au cours des prochains mois» que le comité devrait présenter aux autorités des orientations gouvernementales relatives aux marqueurs du sexe et du genre, «qui sont en cours de finalisation», assure Mme Leclerc.

Inaction volontaire?

Alexe Frédéric Migneault déplore une «inaction volontaire». Puisque «le jugement Moore date de 2021, ils auraient dû commencer à agir à ce moment, pense-t-iel. Mais le comité ministériel a été mis sur pied seulement en 2022.»

«En marge des travaux du comité, toute personne ayant déposé une demande pour ajouter un ‘X’ sur sa carte d’assurance maladie, peut utiliser sa carte actuelle pour obtenir les soins et les services dont elle a besoin», précise de son côté la porte-parole de la RAMQ, Caroline Dupont.

Or, si Alexe Frédéric Migneault peut utiliser sa carte actuelle, iel craint d’être victime de stigmatisation de la part du personnel des établissements de santé, comme ça a déjà été le cas. «On m’a crié des choses transphobes devant plein de gens», se rappelle Alexe Frédéric qui a rédigé une plainte à la suite de sa mauvaise expérience. 

Une chose est claire pour Alexe Frédéric Migneault: c’est son droit de pouvoir s’identifier comme non-binaire et «d’exister sur papier».

«Ça m’a tellement libéré.e de m’identifier comme non-binaire, mais là les obstacles auxquels je fais face, ça vient annuler le progrès immense que j’ai fait en santé mentale dans les dernières années, déplore-t-iel. C’est vraiment important pour moi et en plus il y a eu un jugement de la Cour supérieure du Québec qui dit que j’ai le droit, est-ce que ça peut suffire?»

*iel: En tant que personne non-binaire, Alexe Frédéric Migneault utilise le pronom iel.

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