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Un professeur de l’UQAM démissionne devant des pressions «maladroites»

Sans regrets sur sa décision – laquelle créera un vrai débat dans la communauté espère-t-il –, René-Daniel Dubois ne cache toutefois pas sa tristesse «d’abandonner des étudiants». Photo: Courtoisie

Un professeur de l’École supérieure de théâtre de l’UQAM, qui a remis sa démission il y a quelques jours, accuse la direction d’avoir obligé des étudiants et des employés à traverser les lignes de piquetage lors de la grève des employés de soutien. Il n’écarte pas la possibilité d’évaluer les «recours légaux» à sa disposition.

«Si on m’avait spécifié, quand j’ai été embauché, qu’il fallait se transformer en gardien de prison, jamais je n’aurais même envisagé d’aller travailler là-bas», explique René-Daniel Dubois en entrevue à Métro. Il était à l’emploi de l’Université depuis un peu plus d’un an.

M. Dubois répétait une pièce de théâtre en vue d’un spectacle devant public à la mi-décembre, au Collectif Les 7 doigts, sur Saint-Laurent. Ne voulant pas nuire aux manifestants, M. Dubois affirme avoir convenu, avec sa classe, de répéter chez l’un des étudiants en attendant la fin de la grève à l’UQAM. Ce que l’administration de l’École supérieure de théâtre n’a pas semblé apprécier, témoigne le principal intéressé.

«Leur approche, ça a vraiment été fait d’une manière odieuse, indique-t-il. Il y a eu du chantage exercé sur les étudiants pour que ça cesse, pour qu’on vienne sur le campus. Ils sont venus saccager notre travail, et ils ne s’en préoccupent même pas.» Le professeur a publié une lettre ouverte en ligne qui a récolté des milliers de clics depuis dimanche. Il considère avoir été embauché «sous de fausses représentations».

«Je compte étudier, dans un avenir prochain, les recours légaux qui s’offrent à moi», insiste-t-il.

«Je croyais effectuer un passage dans un lieu d’enseignement, de réflexion, de création et de recherche, alors que je tombais dans un nœud de vipères.» -René-Daniel Dubois, dans sa lettre ouverte

L’UQAM nie, le syndicat en appui

Jointe par Métro, la porte-parole de l’UQAM, Jenny Desrochers, soutient que la direction ne met pas de pression pour traverser les lignes de piquetage.

«Les lignes de piquetage sont toujours fluides et permettent la circulation des personnes. Le Syndicat est soucieux de cet aspect et l’a d’ailleurs rappelé à ses membres.» -Jenny Desrochers, porte-parole de l’UQAM

«Comme il ne s’agit pas d’un conflit de travail du personnel enseignant, il est demandé de se présenter en classe selon l’horaire prévu, de donner ses cours et d’assurer l’encadrement des activités de son ressort», insiste Mme Desrochers.

Or, pour la présidente du Syndicat des employé(e)s de soutien de l’UQAM (SEUQAM), Louisa Cordeiro, la démission de M. Dubois est «sans doute un symptôme de mauvaise gestion de la direction de l’UQAM».

«Nous le remercions pour son respect des employés en grève, qui exercent leur droit de négocier collectivement», a-t-elle indiqué à Métro.

Mardi, en début de soirée, le SEUQAM et l’UQAM sont parvenues à une entente de principe pour le renouvellement de la convention collective des employés de soutien. Si les détails du pacte ne seront présentés que jeudi aux membres, les travailleurs seront de retour à leur poste dès mercredi, a confirmé Jenny Desrochers.

Des débats à avoir

Sans regretter sa décision, le professeur ne cache pas sa tristesse «d’abandonner des étudiants». Il espère susciter un débat dans sa communauté.

Celui qui est aussi acteur, scénariste et dramaturge se dit bien conscient du risque qu’il prend à attaquer une institution. Mais il croit le geste nécessaire dans le contexte.

«J’ai de réelles craintes par rapport à l’avenir de l’École de théâtre en particulier. Il y a des choses bien pires qui pourraient se produire si les orientations ne changent pas. On vient d’avoir la preuve qu’ils ne sont pas équipés psychologiquement pour faire face à une grève», avance-t-il.

L’artiste condamne également «l’auto-censure» de certains membres du corps professoral qui sont «bien au courant» de cette réalité depuis quelques années.

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