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Et nos matières recyclables?

Montréal
Gabrielle Brassard-Lecours - Métro

Le groupe TIRU, qui exploite quatre centres de tri à Montréal, à Châteauguay et à Saguenay, vient de déclarer faillite, après avoir annoncé qu’il cesserait ses activités au Québec. Voilà une belle occasion de réfléchir à la gestion de nos déchets.

La «crise du recyclage» que traverse le Québec n’est pas nouvelle. À la suite de la menace de fermeture du centre de tri Saint-Michel en 2018, la Ville avait allongé 29 M$ pour que le groupe TIRU, filiale de la multinationale française Électricité de France (EDF) qui mène ses activités au Québec par l’entremise de Rebuts solides canadiens, continue d’exploiter le centre.

Deux ans plus tard, Montréal ne veut plus investir, et TIRU se place sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers et les compagnies (LACC). L’administration Plante avance que plusieurs autres partenaires sont prêts à prendre la relève des centres de tri, mais qu’il faut revoir leur modèle d’entreprise.

Ça paraît évident, mais le problème est plus profond: pourquoi la gestion de nos déchets est-elle gérée par des groupes privés? Ne serait-ce pas à la Ville d’assumer cette responsabilité? Et pour réduire les coûts du tri, ne devrions-nous pas aussi mieux trier, ou autrement?

La base de la gestion des déchets

Pour me faire une idée sur ce dossier, j’ai discuté avec Mario Laquerre, du Centre universitaire de formation en environnement et développement durable de l’Université Sherbrooke. Je lui ai fait part de mes interrogations. Pourquoi la gestion de nos déchets n’est-elle pas du ressort public? Pourtant, les installations pour le tri appartiennent à la Ville. Ça coûte cher, me dit-il, et c’est vrai que c’est important d’inclure des partenaires qui utilisent les produits issus du recyclage, comme Cascades.

Je me demande aussi comment ça se fait que seulement les centres gérés par TIRU vont mal, alors que cette société n’exploite que 4 des 25 centres qui existent au Québec. Une mauvaise gestion, peut-être? «Poser la question c’est y répondre», me rétorque Mario Laquerre.

Il m’explique que d’autres sociétés, comme Tricentris ou Société Via, deux entreprises d’ici qui exploitent plusieurs centres de tri dans la province, ont rapidement conclu des partenariats avec des entreprises utilisant leurs produits. Ce que TIRU n’a jamais fait, basant plutôt ses affaires sur un marché international qui a fermé ses portes aux produits du groupe.

Montréal pourrait facilement se hisser au rang de ville modèle en matière de gestion des déchets.

Dans mes nombreuses lectures sur le sujet, la notion de «réduction à la source» revient souvent. D’après Mario Laquerre, le volontariat ne suffit plus comme incitatif pour recycler ou composter. Il faut que le fait de ne pas poser ces gestes ait de vraies conséquences. J’ai tendance à être d’accord avec lui. Il me confie aussi que même lui se pose la question de ce qui va, ou non, dans le bac de recyclage. Encore aujourd’hui, 30 ans après l’instauration du recyclage à domicile. Il est loin d’être le seul.

«Ça n’a pas de bon sens de se le demander encore, en 2020. Si on veut que ça vienne aussi des citoyens, il faut des consignes claires», martèle-t-il. Il a raison.

Moi aussi, malgré les chiffres apparaissant sur certains produits, je ne suis pas toujours sûre de ce qui se recycle.

«C’est vraiment la base. Si on commençait par indiquer de façon évidente à même les produits s’ils se recyclent ou non, ce serait déjà bien», ajoute l’expert, qui observe d’ailleurs que les gens sont de plus en plus conscientisés à la gestion des déchets. C’est le temps d’en profiter pour bien nous orienter, donc, vers une gestion des déchets mieux organisée.

Ailleurs, toujours ailleurs

Parce que j’aime bien me donner l’illusion qu’on pourrait et qu’on devrait s’inspirer de modèles qui fonctionnent, j’ai aussi demandé à Mario Laquerre s’il y avait des initiatives inspirantes ailleurs. Il y en a, bien sûr. Drummondville, par exemple, a rendu obligatoire la collecte des matières organiques pour l’ensemble de ses industries, de ses commerces et de ses institutions, en plus d’augmenter la fréquence de collecte des déchets.

Résultat: même McDonald’s s’est mis au compost! La ville de San Francisco récupère 80% de ses déchets grâce à des initiatives éducationnelles et municipales.

Par conséquent, si tout le monde y met du sien au lieu de se lancer la patate chaude, Montréal pourrait facilement se hisser au rang de ville modèle en matière de gestion des déchets. Qu’est-ce qu’on attend?

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