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Enquête sur la mort de Pierre Coriolan: une façon «inhumaine» d’annoncer le décès à la famille, selon le coroner

Pierre Coriolan
Pierre Coriolan Photo: Courtoisie - Ligue des droits et libertés

Le coroner en chef adjoint du Québec, Luc Malouin, a émis un avertissement auprès du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) quant à sa façon d’annoncer le décès d’une victime à ses proches. Mardi, il a dénoncé la façon de faire des inspecteurs, qui ont annoncé la mort de Pierre Coriolan à sa soeur par téléphone en juin 2017.

Le 28 juin 2017, moins d’un jour après le décès de M. Coriolan sous les balles de policiers de Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), un inspecteur du BEI réussit à rejoindre l’une de ses soeurs, Lizaline.

En route vers chez elle au retour du travail, Mme Coriolan reçoit la nouvelle comme un coup de poing. «Ça m’a pris toutes mes forces pour me rendre chez moi», a-t-elle confié lors de son témoignage dans le cadre de l’enquête du coroner, mardi matin.

«C’est toujours gravé dans mon coeur», a-t-elle ajouté avec émotion.

D’après Mme Coriolan, le policier en contact avec elle aurait indiqué que les policiers avaient agi pour leur propre protection. «Alors, Pierre n’a pas de vie?», aurait répondu la témoin ce jour-là.

Selon le coroner, les inspecteurs en charge de contacter les proches de la victime ont failli à leur tâche.

«Ce n’est pas une façon humaine d’annoncer un décès», a signalé Me Malouin, en marge du témoignage.

«Pas méchant»

Pierre Coriolan était un «homme sage», un «confident» qui «aimait tout le monde». C’est en ces mots que Lizaline Coriolan a décrit son fraternel, mardi.

Celle-ci avait vu son frère aussi tôt que la veille de son décès. Elle affirme ne pas avoir remarqué de changement dans ses comportements dans la dernière année.

Pierre Coriolan qu’elle voyait «à chaque deux, trois semaines» n’était «pas un homme méchant», a-t-elle martelé devant le coroner.

Mêmes échos chez son autre soeur, Yolande, entendue mardi. Si son frère était quelqu’un de «réservé», il était «toujours là» pour elle.

«C’est lui qui a sauvé ma vie après Dieu», a-t-elle raconté, faisant référence à un épisode de maladie qu’elle aurait vécu dans les années 1990. Alors chauffeur de taxi, Pierre Coriolan l’aurait accompagnée dans son véhicule jusqu’à l’hôpital.

Les avocats des policiers et de la Ville de Montréal ont pour leur part profité du passage de Mme Coriolan pour l’interroger sur sa famille, ses fréquentations. S’ils se connaissaient bien, pourquoi M. Coriolan ne parlait-il pas plus souvent de sa fille, Christelle, ont-ils demandé?

Ils ont également interrogé les témoins sur le mode de vie de M. Coriolan, sans emploi. M. Coriolan avait-il vécu une chute libre dans les mois précédant son décès qui pouvait expliquer sa détresse le soir du 27 juin, ont-ils renchérit.

Épisode de détresse

Au moment de sa mort, M. Coriolan vivait un épisode de détresse. Dans un témoignage récolté par le BEI et présenté à la cour, un intervenant de la Fédération des OSBL d’habitation de Montréal, Jean-Philippe Tremblay, affirme avoir discuté avec M. Coriolan dans les années précédent son décès. Il décrit un homme «poli et respectueux, pas agressif».

Selon lui, toutefois, des locataires de l’immeuble à logements où vivait M. Coriolan avaient précédemment déposé des plaintes pour «comportement dérangeant» de la part de l’homme de 58 ans.

L’un des voisins de M. Coriolan, Luc White, a aussi témoigné mardi. «Quand il sautait sa coche, je l’entendais», a-t-il dit de son voisin du haut. Mais quand il croisait M. Coriolan dans l’appartement, le témoin n’a jamais eu peur, a-t-il avancé.

«Il n’était pas agressif», a signalé M. White.

Lundi, une experte-toxicologue avait soutenu qu’un «taux thérapeutique élevé» de cocaïne avait été repéré dans le sang de M. Coriolan à sa mort. Lizaline et Yolande Coriolan soutiennent qu’elles n’avaient aucune connaissance de problèmes de consommation chez leur frère.

Sept détonations

Un expert en balistique, Gilbert Desjardins, avait lui aussi témoigné au Palais plus tôt mardi matin afin de reconstituer le déroulement de la scène.

Selon lui, les policiers présents ont déchargé sept tirs – de pistolet, de lance-grenades et de fusil à impulsion électrique – en 25 secondes au troisième étage de l’immeuble de la rue Robillard où Pierre Coriolan s’est fait abattre.

Parmi ces coups de feu, trois tirs de pistolet en moins d’une seconde.

Les audiences devant le coroner se poursuivront au moins jusqu’à la semaine prochaine, à Montréal.

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