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Nouveau Vic: vers une possible réconciliation entre Autochtones et institutions?

Josie Desmarais/Métro Photo: Josie Desmarais

Le vent semble tourner dans le litige impliquant les Mères mohawks, l’Université de McGill et la Société québécoise des infrastructures (SQI) depuis plus d’un an. Le 27 octobre dernier, la Cour du Québec a tranché en demandant l’arrêt de toute construction sur le site du projet Nouveau Vic jusqu’à ce que de réelles discussions soient tenues concernant les fouilles archéologiques, et ce, dans un «esprit de réconciliation».

Alors que les débuts de cette affaire semblaient montrer une occasion manquée de réconciliation à l’égard des populations autochtones, la justice invite désormais les parties à se réunir autour de la table pour aller de l’avant.

En mars dernier, six mères mohawks de Kahnawake entamaient une poursuite civile en Cour supérieure du Québec pour que cessent les travaux sur le site de l’ancien Hôpital Victoria et de l’Institut Allan Memorial pour la construction du projet par l’Université McGill. Selon elles, des vestiges archéologiques ainsi que des sépultures anonymes pourraient se trouver sur les lieux.

L’archéologue et professeur au Département d’anthropologie de l’Université de Montréal Adrian Burke a lui-même été consulté par les différentes parties impliquées. Il s’est notamment rendu avec les Mères mohawks sur les lieux pour des études de terrain. Il voit les avancées au sujet de la demande d’injonction des Mères mohawks comme une porte ouverte vers une approche de réconciliation entre les parties.

«On est rendu au moment où on pourrait voir cette injonction comme une façon de réouvrir la porte et de ne pas être obligé de passer par des avocats, dit-il. Je pense qu’il y a encore une possibilité et on pourrait voir ça comme une façon de recommencer à zéro», dit-il.

Pour l’anthropologue et interprète des Mères mohawks Philippe Blouin, ces dernières accueillent le jugement comme une réelle possibilité de dialogue qui s’inscrit dans un esprit «amical de réconciliation».

Avec le jugement, la porte est clairement réouverte. Pour une fois, il y a vraiment une opportunité de réconciliation.

Philippe Blouin, anthropologue et interprète des Mères mohawks

Une première rencontre s’est tenue mercredi dernier entre les différentes parties à Kahnawake. L’objectif était de partager une interprétation commune du jugement rendu par la Cour. Les Mères mohawks ont désormais jusqu’au début 2023 pour présenter devant le juge leur plan archéologique.

Pour le moment, elles songent à inclure des professionnels autochtones dans les fouilles, comme des archéologues et une pathologiste médicolégale, et à recourir à des chiens formés à retrouver des restes humains. Le plan pourrait aussi faire intervenir des spécialistes venant du reste du Canada ou de l’étranger qui auraient une expertise concernant les sépultures anonymes.

«Pour les Mères mohawks, c’est assez simple, il s’agit de suivre à la lettre les recommandations de l’Association canadienne d’archéologie et de la Commission de vérité et réconciliation, explique Philippe Blouin. Ça inclut tous les moyens non invasifs pour éviter de détruire des preuves médicolégales et par respect des possibles sépultures.»

Un processus de consultation désuet

La justice exige la tenue d’une consultation des peuples autochtones lorsqu’ils sont directement touchés par de tels projets. Or, ce processus de consultation serait inadéquatement appliqué.

«Supposément il y a eu des consultations […] Dans beaucoup de cas ici, au Québec, quand il s’agit du gouvernement, ces organismes gouvernementaux vont dire qu’ils ont uniquement le devoir d’informer et pas nécessairement même de consulter, explique Adrian Burke. Il y a déjà là un problème. Dans d’autres parties du Canada, comme en Alberta ou en Colombie-Britannique, quand on parle de consultation, on est au-delà de juste informer […] On s’assoit et discute avec les conseils de bande.»

Selon lui, le cas du litige autour du projet Nouveau Vic pourrait ainsi ouvrir la porte à une nouvelle façon de faire en matière de consultation des peuples autochtones.

«Peut-être que les gens auraient dû faire différemment au début; ils n’ont simplement pas compris que ce n’est pas suffisant. Même si la loi fédérale n’a pas changé, la pratique de consultation change, dit-il. On essaie [désormais] de consulter plusieurs parties prenantes au sein des communautés et pas juste de consulter directement un chef ou une personne qui est supposément dans l’organigramme défini par le fédéral.»  

En effet, les processus de consultation font principalement appel aux conseils de bande. Philippe Blouin explique que pour les Mères mohawks, ces derniers ne sont pas une partie indépendante, mais une instance fédérale basée sur la Loi sur les Indiens.

L’Université McGill n’a pas souhaité répondre aux questions posées par Métro. Elle indique cependant prendre «au sérieux les préoccupations des communautés autochtones concernant la requalification du site et cherche à mieux comprendre comment y répondre».

De son côté, la SQI dit être, depuis le début du projet, «dans un processus d’échange avec les Premières Nations» et mentionne qu’«elle entend poursuivre sur cette voie».

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