Soutenez

Soins infirmiers: des étudiants noirs victimes de discrimination?

Valérie Gazemar, infirmière clinicienne qui enseigne à l'Université de Montréal, et Barbara Augustin, microbiologiste qui enseigne au cégep. Photo: Jean Numa Goudou/Métro

Alors que le Québec fait face à une pénurie criante d’infirmières, des collèges montréalais mettraient des bâtons dans les roues à des étudiants et étudiantes des communautés noires. Certains prendraient jusqu’à deux ans de plus pour terminer leur programme de trois ans, contrairement à leurs camarades blancs.

C’est ce qui ressort des résultats préliminaires d’une étude menée par deux chercheuses et professeures en sciences de la santé pour le compte de l’Observatoire des communautés noires, une filiale du Sommet socioéconomique des jeunes noirs (SdesJ).

On pense qu’il y a un problème dans le programme de soins infirmiers. C’est déjà documenté aux États-Unis et dans le reste du Canada; c’est au Québec que ce ne l’est pas.

Valérie Gazemar et Barbara Augustin, spécialistes et professeures

La recherche, menée par les spécialistes et professeures Barbara Augustin, qui enseigne la microbiologie au cégep depuis 16 ans, et Valérie Gazemar, infirmière clinicienne depuis 20 ans et enseignante à l’UdeM, vise à collecter des données afin de soutenir une demande d’action du gouvernement en ce sens.

Québec en retard

L’étude sur la discrimination raciale au sein du programme de soins au niveau collégial dans le Grand Montréal démontre que sur le plan théorique, les apprenants réussissent bien et cheminent bien. «Mais il semble y avoir un problème lorsqu’ils vont en stage. Le fait d’avoir un échec en stage va rallonger les délais pour compléter le programme», observe Valérie Gazemar.

«Les participants interrogés disent qu’on va leur confier les patients les plus compliqués, qu’on va remettre en question leurs manipulations et qu’ils vont travailler beaucoup plus fort que les autres camarades blancs», renchérit Barbara Augustin.

Corps professoral blanc

Les étudiants se plaignent que «les profs ne répondent pas à leurs questions et qu’ils ne sont pas accompagnés par le corps professoral», soulignent les deux spécialistes. Malgré quelques avancées, le corps professoral demeure «très blanc, ce qui fait que l’approche est monoculturelle», font remarquer ces enseignantes noires.

Malgré la présence de professeurs des communautés noires, les embûches persistent, les gens qui sont dans des positions décisionnelles, les profs noirs n’ont pas accès à cela.

Barbara Augustin, professeure de microbiologie au cégep

Le travail de Mmes Augustin et Gazemar n’est pas sans difficulté. Par peur de représailles, plusieurs étudiants ont peur de s’exprimer sur le sujet. «Ils sont mal à l’aise, plusieurs ne veulent pas revenir sur cet épisode après quatre ou cinq ans et veulent juste poursuivre leur route», disent les enseignantes, qui constatent par ailleurs des signes avant-coureurs de problèmes de santé mentale chez ces personnes en majorité d’origine immigrante.

Les chercheuses reconnaissent que cela ralentit leur travail et promettent de «travailler plus fort pour obtenir les témoignages». «Notre objectif est de dire au gouvernement: regardez, il faut faire quelque chose. Il y a un problème de ce côté-là. Il faut agir», notent les deux enseignantes qui mènent l’enquête.

Les deux enquêtrices participaient au 6e sommet de SdesJ tenu à Québec à la fin janvier.

Doté d’un budget de 6 M$ sur cinq ans, l’Observatoire intervient sur quatre axes, dont la recherche visant à documenter, analyser et mieux comprendre les réalités des jeunes noirs; la mobilisation de divers acteurs et la communication pour favoriser l’accessibilité; et une circulation large de la connaissance.

Inscrivez-vous à notre infolettre et recevez un résumé, dès 17h, de l’actualité de Montréal.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.