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Toujours plus d'amendes pour les itinérants

La surjudiciarisation des itinérants continue à Montréal. Entre 2007 et 2010, et malgré les bonnes intentions des décideurs publics, le nombre d’amendes qu’ils ont reçu, dans les rues de la Ville et le réseau de la STM, a augmenté de 7%. C’est ce qui ressort d’une étude publiée mercredi par deux chercheurs.

Martin (nom fictif), 32 ans, fait partie des personnes itinérantes victimes de profilage social. Petit look punk, mais pas de chien ni de problème d’alcool. Ça fait trois ans qu’il est dans la rue. Il y a quelques mois, encore, il a eu affaire aux policiers du centre-ville. Amende de 144$ pour être assis sur la table  de pique-nique du parc (mauvaise utilisation du mobilier urbain).

D’habitude, il froisse sa contravention devant les policiers, là il décide d’aller la jeter dans la poubelle. Deuxième contravention de 144$ (avoir marché sur le gazon). Fâché, il déchire la nouvelle contravention et la jette à terre. Troisième contravention de 85$ (avoir jeté des papiers par terre). Et encore il a été chanceux, «actuellement la contravention à la mode dans le centre-ville est de 628$ : Avoir émis un bruit audible», note avec une pointe de cynisme, Isabelle Raffestin, intervenante clinique au Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM).

Quelques semaines plus tard, Martin décide de se prendre en main. Il contacte le RAPSIM et sa clinique juridique Droits Devant. Martin totalise déjà plus de 8 000$ d’amendes impayées. Il fait partie des 1749 personnes itinérantes qui ont reçu plus de dix constats, un chiffre en constante augmentation, dont la palme revient à cet itinérant qui culmine à 88 000$ d’impayés. Depuis 10 ans, le montant total des constats impayés totalise 15 M$ à Montréal.

Dans le cas de Martin, sur les 8000$ qu’il doit, le total des amendes initiales ne représente que 2 000$. La différence, ce sont les pénalités pour non présence lors des audiences de la Cour municipale (50$ par absence), les rappels d’impayés (20$ par lettre), l’huissier (38$ l’unité), les frais de mandat d’amenée devant le percepteur (35$,) etc.

«Le taux de recouvrement est très peu élevé, à peine 1% des amendes sont payées», indique Céline Bellot, co-auteure avec Marie-Ève Sylvestre de l’étude sur La judiciarisation des personnes en situation d’itinérance à Montréal. Elle souligne que les efforts dépensés en personnel policier, administratif et judiciaire n’en valent pas la peine. «Au contraire, ça empire leurs conditions de vie et nuit à leurs démarches pour participer à des programmes de réinsertion», clame Pierre Gaudreau, coordonateur du RAPSIM.

Face à ce phénomène, la Ville n’est pas restée les bras croisés pour autant. Depuis 2004, elle a mis fin aux peines d’emprisonnement pour non paiement des amendes. Elle a aussi nommé un procureur dédié aux dossiers des itinérants et elle est plus flexible dans les ententes de paiement. «Malgré tout, Montréal ne peut pas se substituer au réseau de la santé et au gouvernement du Québec», a répondu le maire Gérald Tremblay qui déplore que les demandes d’aide adressées au gouvernement aient jusqu’ici reçu une fin de non-recevoir.

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