Coderre veut que Montréal soit le point central de la stratégie nationale contre la radicalisation
Denis Coderre croit que Montréal devrait devenir le point central d’une stratégie nationale contre la radicalisation.
Dans un point de presse, vendredi matin, le maire de Montréal a réagi au dernier rapport produit par le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV), réalisé à la demande du Collège de Maisonneuve.
Saluant les résultats présentés dans ce rapport, M. Coderre rappelle que le gouvernement fédéral, par la voix du ministre de la Sécurité publique, Ralf Goodale, a manifesté son intention de créer une stratégie nationale contre la radicalisation menant à la violence. Le ministre Goodale a visité le CPRMV, lundi, pour s’inspirer de ses bonnes pratiques.
«Pour moi, dans une stratégie nationale contre la radicalisation, le central devrait passer par le CPRMV [à Montréal]», a affirmé Denis Coderre.
Il estime que le centre de Montréal possède déjà tout ce qu’il faut pour devenir le bureau national de cette stratégie. «Ça devient intéressant, on est capable de travailler en ce sens», ajoute-t-il.
Le maire précise que contrairement à d’autres villes ayant une stratégie canadienne contre la radicalisation, comme à Calgary qui n’ont qu’une équipe de forces policières, le centre de Montréal possède différents intervenants: académiciens, milieu institutionnel, intervenants, en plus de travailler avec les forces policières. «Si c’est strictement policier, il peut y avoir des problèmes de relations où les gens n’ont pas l’intention de se livrer pour toutes sortes de raisons», insiste le maire, rappelant que des maires d’autres villes étrangères sont venus visiter le centre, en plus du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon.
Le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence a reçu à ce jour plus de 1000 signalements. De ce nombre, il a ouvert 350 dossiers et 15 de ceux-ci ont été transmis au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).
«Dans le fond, on peut avoir des outils communs, mais une approche différente. L’important, c’est d’atteindre la population et la communauté, et de mettre tout le monde comme partie prenante de la solution. C’est pas important la question physique et le modèle, mais à mon avis, ce qui fonctionne comme modèle pour combattre la violence extrême, c’est vraiment le centre de prévention», ajoute le maire.
Rapport
Le rapport du CPRMV recommande au SPVM de documenter les incidents et les crimes haineux «afin d’établir un diagnostic de la situation et de permettre à cette organisation de mettre en place les mesures nécessaires de prévention et de lutte à l’égard de ces phénomènes». Denis Coderre rappelle que cela a déjà été fait avec la création en mai dernier de l’escouade contre les crimes et les incidents haineux au SPVM.
M.Coderre ajoute que le SPVM travaille à mettre davantage à profit des ressources et un programme pour faire une veille sur internet et limiter les tentatives de radicalisation faites par l’intermédiaire du web. «Il faut aller chercher des ressources pour leur couper l’herbe sur le pied», a-t-il dit.
Le rapport du CPRMV fait état des éléments ayant mené à la radicalisation des jeunes du Collège Maisonneuve, dont certains ont tenté ou se sont rendus en Syrie. Essentiellement, on y fait mention que si un jeune Québécois se tourne vers les discours haineux, c’est pour trouver «une solution acceptable à leur mal-être, c’est que nos sociétés n’arrivent pas à bien comprendre leurs revendications et leurs aspirations, et à y répondre de façon à canaliser leurs besoins vers des solutions constructives». Le document présente des témoignages, notamment, de jeunes qui ont été exclus ou se sont sentis exclus de leur cercle d’amis ou de leur environnement en raison de leur religion.
«Le repli identitaire ne peut en aucun cas être considéré comme admissible, non seulement parce qu’il est le symptôme d’une exclusion sociétale intolérable, mais également parce qu’il peut être la prémisse d’une dérive dangereuse – tout à la fois pour la personne et pour la société», mentionne le rapport.
Les motifs menant à la radicalisation tournent autour de cette réalité et sont précisés par le document: quête identitaire en raison d’un sentiment d’humiliation ou de stigmatisation, désir de réalisation personnelle, envie de défendre une cause, volonté de renverser l’ordre établi et de réparer ce qui est perçu comme une injustice.
«La question de la Charte des valeurs, [des leaders] se sont servis de ça pour mettre des choses [dans la tête de certains jeunes] et leur dire que ce qui est magnifique est ailleurs, notamment en Syrie, a affirmé Denis Coderre. On a utilisé des débats à mauvais escient pour faire du bourrage de crâne et amorcer le phénomène de radicalisation en disant aux jeunes qu’ils n’ont pas leur place ici.»
Le maire rappelle pour lui l’importance de la stratégie du «vivre-ensemble», comme l’indique le rapport du CPRMV. «Il faut avoir de l’ouverture, un équilibre, mais avec un agenda de vigilance: c’est 80% de prévention et 20% d’intervention», explique le maire.
«Le vivre-ensemble, c’est de trouver une façon d’envoyer un message qu’on peut être égal et différent en même temps, que vous faites partie prenante dans cette pluralité, dans cette diversité», ajoute-t-il.
Il précise que certains jeunes qui se sont radicalisés avaient un parcours de vie plutôt normal. «Qu’est-ce qu’on a fait pour les atteindre, pour les déstabiliser, pour qu’ils puissent embarquer dans ce processus vers la Syrie?», questionne le maire.
Il rappelle l’importance donc de bien identifier les comportements anormaux chez les individus, comme des jeunes qui changeraient d’attitude, se refermeraient sur eux-même. Denis Coderre appelle la population à signaler ces comportements dès qu’un doute s’installe.
Il croit que les écoles et les milieux de travail ont un rôle à jouer et rappelle l’investissement de 500 000$ du gouvernement du Québec pour appuyer l’ensemble des interventions du CPRMV en milieu scolaire.
Numéros de téléphone pour faire un signalement au Centre de prévention contre la radicalisation menant à la violence:
Montréal : 514 687-7141
Ailleurs au Québec 24/7 : 1 877 687-7141