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Cinq mensonges que Jean-François Lisée doit cesser de se raconter

Il existe une stratégie en politique comme en marketing qui consiste à marteler des messages contraires à l’opinion que les gens ont de nous afin de contrer ces vilaines perceptions. C’est la raison pour laquelle les banques font sans cesse la promotion de leurs heures d’ouvertures prolongées même s’il est probablement plus facile d’obtenir un rendez-vous avec une chirurgien bariatrique qu’avec une conseillère en placements. En scrutant la page Facebook de Jean-François Lisée, il est tentant de se demander s’il ne s’agit pas de la stratégie pour laquelle a opté le fin renard. Cependant, en politique comme en marketing, ce n’est pas parce qu’on ne cesse de répéter un mensonge qu’il finit par devenir une vérité. Voici cinq mensonges que Jean-François Lisée doit cesser de raconter, d’abord à lui-même.

1. Il n’est pas Bernie Sanders
Pour de vrai, Jean-François Lisée doit cesser cette comparaison embarrassante fondée sur très peu de choses (sa position sur le salaire minimum à 15$, son nombre de donateurs, tendance qui commence à fléchir, ses cheveux blancs et le fait que l’establishment ne l’appuie pas). Bernie Sanders se démarquait dans la course à l’investiture démocrate parce qu’il était un socialiste au royaume du capitalisme et qu’il se détachait de la langue de bois et des discours creusés par la stratégie. Dans le contexte Québécois, où la CAQ est considérée comme un parti d’extrême droite, faire des propositions sociales démocrates n’a rien de si spectaculaire.

On comprend toutefois que la comparaison soit alléchante. Bernie Sanders a su attirer l’attention des jeunes électeurs, et avec la difficulté qu’a le PQ à retenir la jeunesse, il est tentant de se présenter comme le candidat «dans le vent» malgré son âge vénérable. Mais Jean-François Lisée n’a pas l’ombre du swag de Bernie Sanders. Le fait qu’il tente désespérément de se comparer à lui en fournit un exemple, deux règles non-écrites de la coolitude étant de montrer plutôt que de dire, et de laisser aux autres le soin de nous comparer aux héros qu’ils entendent. On pourrait ajouter à ces règles celle de ne pas «essayer trop fort», parce qu’invariablement, ça paraît.

Par ailleurs, bien qu’il n’ait pas l’appui de l’establishment, ça n’empêche pas Jean-François Lisée de tenir des discours qui sentent la stratégie à plein nez. Et malgré qu’il ait obtenu l’appui (via une lettre bourrée de lapalissades teintés de beige) de quelques jeunes qui rêvent sûrement de devenir fonctionnaires, nous verrons plus tard combien ses positions sur l’axe identitaire l’éloignent des aspirations habituelles de la jeunesse. D’ailleurs, ce n’est pas parce qu’il n’a pas l’appui de l’establishment du parti qu’il n’en a pas les vieilles manies.

Oh, et en passant, Bernie Sanders, lui, n’a aucun problème à souhaiter un bon début de ramadan à ses frères et sœurs de confession musulmane.

2. Personne n’a «peur» de lui
L’une des lignes martelées par l’équipe de Jean-François Lisée est que les libéraux auraient peur de lui, notamment en raison de sa stratégie référendaire pas trop épeurante et de ses qualités de tribun. C’est vrai que le fait de proposer un référendum peut-être un jour dans un second mandat si jamais ça adonne, c’est pas trop menaçant. Pour ce qui est des qualités de tribun de Jean-François Lisée, comment dire…

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S’il y a une chose que peuvent craindre les libéraux, c’est de faire face à un Alexandre Cloutier beau et jeune comme un Justin Trudeau.

S’il y a une chose dont n’ont pas besoin de s’inquiéter les libéraux, c’est d’un candidat qui mise sur une stratégie identitaire qui a démontré être un échec dans le passé. Ce qui nous amène au troisième mensonge.

3. S’en prendre aux signes religieux n’est pas particulièrement stratégique
Difficile de dire si la position de Jean-François Lisée sur l’interdiction des signes religieux comme la burka, le niqab et le burkini dans l’espace public relève de l’opportunisme ou de l’opportunisme. Dans une course à la chefferie du PQ, parti dont les membres sont plus généralement favorables à une forme de laïcité fermée, voire à une catho-laïcité, il peut être intéressant de se positionner en faveur d’un contrôle plus serré des symboles jugés ostentatoires et de la protection des repères identitaires. Auprès de l’ensemble de l’électorat, toutefois, ça n’est pas si simple. L’enjeu divise, généralement au profit du statu quo. Ce n’est pas exactement non plus le meilleur moyen de rejoindre les jeunes, qui ont généralement une perspective plus inclusive sur ces questions.

Rappelons-nous que le PQ a déjà eu son «moment xénophobe», et que ça n’a pas marché. D’ailleurs, les commentaires à ce sujet sur la page de Jean-François Lisée peuvent difficilement être qualifiés d’emballés à l’idée.

4. Interdire le burkini n’est pas exactement «à gauche»
Burqa, burkini, niqab, Jean-François Lisée s’y oppose ou souhaite une discussion publique (qui a déjà eu lieu on s’en rappelle) à leur sujet. Son discours alimente un certain flou à cet égard, amalgamant parfois le burkini et la burqa, les dissociant commodément lorsque ça ne fait plus de sens de les mettre dans le même panier. C’est ainsi qu’il propose une «discussion» sur l’interdiction de ses trois vêtements, mais présente comme un positionnement à gauche sa position anti-burqa. Évidemment, il est plus délicat de positionner à gauche ou à droite l’interdiction de la burqa. Mais sur l’axe identitaire, l’interdiction du burkini ne se situe certainement pas à gauche. Pas nécessairement parce que Marine Le Pen y est favorable ou que Manon Massé s’y oppose, mais surtout parce qu’on ne limite pas l’autonomie des femmes au nom du progrès social. Le candidat Lisée se situe peut-être au centre gauche sur l’axe économique, de manière à peu près comparable aux autres candidats, mais qu’il assume que ses positions identitaires le situent du côté conservateur de l’échiquier.

5. Il n’est pas spécialement audacieux
Le slogan de Jean-François Lisée est «Oser réussir», ce qui vise probablement à le présenter comme un candidat audacieux. Or, on pourrait plutôt qualifier ses positions, notamment, bien sûr, sa position sur le référendum, de prudentes, dont l’antonyme, selon Antidote, est audacieuses. L’idée d’un salaire minimum à 15$ est dans l’air du temps et interdire les signes religieux est une vieille idée surtout populaire auprès des vieux membres du PQ.

6. Bonus : une personne «LGBTQ», ça n’existe pas
Personne n’est à la fois lesbienne, gai, bisexuel(le), trans et queer. Mais bien essayé, Jean-François!

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