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Justice: les réformes conservatrices contestées

Sean Kilpatrick / La Presse Canadienne Photo: Sean Kilpatrick
Jim Bronskill, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Les réformes adoptées par les conservateurs pour se montrer fermes face aux criminels ont exercé des contraintes sur le système judiciaire et donné lieu à de multiples contestations, une réalité dont la ministre de la Justice devra tenir compte dans sa propre réforme globale de la détermination des peines, indique une note interne.

Le ministère de la Justice doit composer avec une centaine de contestations sur la seule constitutionnalité des peines minimales obligatoires, indiquent les notes préparées par les hauts fonctionnaires pour la ministre Jody Wilson-Raybould.

Dans sa lettre de mandat, le premier ministre Justin Trudeau a demandé à Mme Wilson-Raybould de revoir les changements apportés depuis dix ans au système de justice pénale, afin d’accroître la sécurité des collectivités, d’utiliser au mieux l’argent des contribuables et de combler toute lacune.

La dernière grande réforme des dispositions relatives à la détermination de la peine a été réalisée il y a 20 ans, mais les conservateurs, élus en 2006, ont procédé à des modifications à la pièce, sans véritable stratégie à long terme, indique la note ministérielle obtenue par La Presse canadienne grâce à la Loi sur l’accès à l’information.

Ces modifications visaient essentiellement à tenir les contrevenants «responsables de leurs actes», afin de rassurer une population qui estimait que les criminels s’en tiraient parfois à bon compte, indique la note rédigée en mars dernier. En retirant aux juges leur pouvoir discrétionnaire, les conservateurs auraient aussi voulu rendre le processus de détermination des peines plus transparent.

Mais ces réformes ont exercé des contraintes sur le système judiciaire et mené à une hausse des contestations en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés, observent les hauts fonctionnaires.

Contestations judiciaires

La note rappelle qu’on a ainsi contesté devant les tribunaux la constitutionnalité des peines minimales obligatoires, du temps alloué pour la détention préventive, des amendes supplémentaires destinées aux victimes, et de la possibilité moins grande pour les juges d’imposer d’autres peines dans des cas particuliers — comme pour les Autochtones, les personnes souffrant de maladie mentale ou autrement vulnérables.

Au 30 novembre 2015, le ministère fédéral de la Justice devait se défendre dans 102 contestations judiciaires relatives aux peines minimales obligatoires seulement, que ce soit lors d’un procès ou devant une Cour d’appel, indique la note.

Dans un rapport préparé pour le ministère, le professeur de droit Yvon Dandurand recommande d’adopter des exemptions aux peines minimales obligatoires, comme cela se fait dans plusieurs pays. Une exemption pourrait s’appliquer par exemple à un jeune contrevenant, lors d’un plaidoyer de culpabilité rapide ou lorsqu’un accusé apporte une contribution importante à l’État.

Un criminologue britannique de l’Université d’Oxford recommande quant à lui une «clause discrétionnaire générale», qui permettrait aux tribunaux de surseoir à la peine minimale obligatoire lorsque les intérêts de la justice le réclament.

Le porte-parole des conservateurs en matière de Justice, Rob Nicholson, qui a été ministre de la Justice de 2007 à 2013, a déjà indiqué que son parti se battrait bec et ongles pour bloquer toute tentative des libéraux d’éliminer la peine minimale obligatoire.

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