Charles Taylor n’endosse plus une de ses recommandations
Le professeur émérite de philosophie Charles Taylor, qui a coprésidé il y a 10 ans la Commission de consultation sur les pratiques d’accommodement reliées aux différences culturelles – connue sous le nom de Commission Bouchard-Taylor – n’endosse plus une des recommandations du rapport, qui refait actuellement surface.
La recommandation en question touche le port des signes religieux par des agents de l’État (dont les magistrats et les policiers).
M. Taylor a fait cette déclaration dans une lettre ouverte publiée mardi dans La Presse+.
«[J]’ai appuyé la mesure parce que je croyais que dans l’atmosphère suivant le débat sur les accommodements raisonnables, ne pas imposer ces restrictions choquerait l’opinion publique au point de mettre en danger notre proposition d’une laïcité ouverte. Mais les choses ont bien changé depuis, et ce n’est plus mon opinion», explique M. Taylor.
Le philosophe soulève que c’est principalement le changement de contexte, induit par le débat sur la Charte des «valeurs québécoises», qui l’a amené à changer d’idée. «On a constaté lors de ce débat que la proposition de restreindre les droits de certaines classes de citoyens a eu un effet secondaire de stigmatisation. Cet effet s’est entre autres fait sentir dans la multiplication des incidents d’agression, surtout envers les musulmanes portant le voile […]».
Il estime que le temps est maintenant à la réconciliation, en soulignant l’attentat dans une mosquée de Québec survenu à la fin janvier.
M. Taylor soutient en outre que la distinction faite à l’origine dans le rapport de la Commission, entre les employés de l’État qui exercent des «fonctions de coercition qui régissent le domaine du crime et du châtiment et qui décident de la condamnation et des peines» et ceux exercent d’autres fonctions (en santé, en éducation, etc.), n’a pas été retenue dans les débats.
La semaine dernière, Radio-Canada rapportait que la Coalition avenir Québec (CAQ) proposait d’appuyer le gouvernement de Philippe Couillard si celui-ci incluait dans le projet de loi 62 les recommandations de la Commission Bouchard-Taylor concernant le port des signes religieux. Le premier ministre avait plus tard déclaré, selon la société d’État, que le port des signes religieux était un «enjeu inexistant».