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La DPJ cherche des solutions à tout prix

Photo: Métro

Que se passe-t-il lorsqu’un signalement est fait à la DPJ? Comment les intervenants décident-ils de retirer un enfant de son foyer? Pendant combien de temps la DPJ peut-elle suivre une famille? Notre journaliste Marie-Eve Shaffer a eu un accès privilégié aux coulisses de la DPJ.

Lundi matin. Les allées et venues sont continuelles dans le bureau de Renée Brassard. Et pour cause, le signalement d’un bébé de cinq jours a été reçu à la veille du week-end. Sa mère, âgée d’à peine 18 ans, manque de ressources pour répondre adéquatement aux besoins de son poupon. Délais­sée par ses parents, elle s’est réfugiée chez le père du bébé, qui réside dans un appartement surpeuplé où la drogue circule. «On essaie de trouver la meilleure solution pour aider la mère», indique la chef du service de l’évaluation et de l’orientation de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) pour le secteur sud du Centre jeunesse de Montréal-Institut universitaire (CJM-IU).

Lorsque le signalement d’un enfant négligé, maltraité ou à risque de l’être est retenu, le relais est aussitôt pris par une équipe du service de l’évaluation et de l’orientation de la DPJ. Il en existe cinq sur le territoire de Mont­réal, dont une est spécialisée dans les cas d’abus physique et d’abus sexuels. En tout, ce sont près de 80 criminologues et travailleurs sociaux qui ont la lourde tâche d’aller cogner à la porte des familles dans le besoin, et ce, sans s’annoncer.

Dès que le signalement du bébé de cinq jours a été retenu, deux intervenants de l’équipe de Renée Brassard sont allés rencontrer la mère. Cette der­nière prodiguait de bons soins à son nouveau-né. Les interve­nants ont alors évalué les capa­cités des parents, le milieu dans lequel ils vivent et la vulnéra­bilité de l’enfant. Au terme de la rencontre et après avoir fait examiné le nourrisson par une infirmière, ils ont décidé de lais­ser l’enfant à la mère et ils l’ont avisé qu’ils reviendraient la voir. Une séance de remue-méninges a alors eu lieu entre les deux intervenants et leur supérieur afin de trouver les meilleures solutions pour assurer la sécurité et le développement de l’enfant. À cette étape du traitement des signalements, aucune décision ne se prend sans de longues discussions.

«Un intervenant ne prend jamais de décision seul, fait savoir Mme Brassard. On doit toujours avoir l’approbation de la chef ou de l’adjointe parce que ce sont des décisions qui sont lourdes à porter. Des fois, on les prend à deux, et des fois, on les prend à trois. Les intervenants ne sont pas effrayés de consulter. C’est la façon de faire ici.»

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Les intervenants ont ensuite concocté un plan d’action dans lequel ont été inscrits les objectifs que les parents devront atteindre avant que la DPJ ferme leur dossier. Il peut y avoir, par exemple l’obligation de trouver un nouvel appartement, d’assurer un suivi médical de l’enfant ou de contrôler une consommation de drogue. Ce plan est ensuite présenté aux parents. S’ils l’acceptent, la DPJ mobilise ses ressources pour les aider. Sinon, les tribunaux sont saisis, ce qui est loin d’être l’option privilégiée par la DPJ, car cela favorise la confrontation.

«Dans la majorité des cas, les intervenants réussissent à rallier les parents en préser­vant leur estime d’eux-mêmes et en ne leur enlevant pas leur autorité parentale, rapporte Renée Brassard. Dans certains cas, les parents sont trop fâchés contre la DPJ pour tout ce qu’elle représente et ils ont peur qu’on parte avec leur enfant. Quand ils ne veulent pas collaborer, il faut aller en cour, et même si un juge dit aux parents de collaborer avec la DPJ, ce n’est pas dit qu’ils vont le faire par la suite.»

«On sait qu’on fait une différence dans la vie de l’enfant, ajoute-t-elle. Ici, les intervenants croient en la race humaine et ils croient en la compétence des parents.»

Dès que les parents et la DPJ conviennent des mesures à prendre pour assurer le bien-être de l’enfant, le relais est de nouveau pris par une nouvelle équipe d’intervenants, qui eux, suivent à long terme les progrès de la famille.

Série
Ceci est le deuxième reportage d’une série qui sera publié sur trois jours dans Métro.

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