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La libération conditionnelle de Paul Bernardo refusée

Greg Banning / La Presse Canadienne Photo: Greg Banning/La Presse canadienne
Colin Perkel, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

BATH, Ont. — Le violeur et tueur en série Paul Bernardo s’est rapidement vu refuser la libération conditionnelle à laquelle il était admissible, mercredi, notamment après le témoignage passionné des parents de deux de ses victimes.

Le meurtrier, désigné «délinquant dangereux» par le système judiciaire canadien, purge une peine de prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans pour l’enlèvement, le viol et le meurtre au premier degré de deux adolescentes, au début des années 1990. Après 25 ans de détention, surtout en isolement, il était admissible à sa libération conditionnelle totale depuis février; il pourra présenter une nouvelle demande dans deux ans.

Bernardo, aujourd’hui âgé de 54 ans, avait affirmé mercredi qu’il a travaillé dur pour se rétablir. «Je suis une personne très imparfaite. Je sais que je ne suis pas parfait», a-t-il admis aux deux membres de la Commission nationale des libérations conditionnelles venus entendre sa demande, à l’Établissement de Millhaven, dans l’est de l’Ontario.

«Ce que j’ai fait était si horrible. J’ai blessé beaucoup de gens. Je pleure tout le temps», avait-il plaidé plus tôt mercredi, tout en assurant qu’il ne récidiverait jamais. «Je suis si gentil avec tout le monde. Les gens ont peur, mais il n’y a aucune raison.»

Le comité de la Commission ne s’est visiblement pas rangé à ses arguments: il n’a mis qu’une trentaine de minutes pour rejeter la demande de libération conditionnelle, qu’elle soit de jour ou totale. Les motifs écrits devraient être rendus publics d’ici quelques semaines.

Les familles des victimes

Les crimes de Paul Bernardo, commis pendant plusieurs années à la fin des années 1980 et au début des années 1990 — et certains enregistrés sur vidéo —, ont suscité horreur et révulsion pendant le procès. Bernardo et son épouse d’alors, Karla Homolka, avaient enlevé, torturé et tué Leslie Mahaffy, 14 ans, de Burlington, en juin 1991, à leur domicile de Port Dalhousie, avant de démembrer son corps et d’enfouir les restes dans du ciment et de les jeter dans un lac voisin.

La mère de Leslie Mahaffy a décrit mercredi la douleur insoutenable que cette audience de libération conditionnelle avait ranimée chez elle, affirmant que les «actes indicibles et d’un sadisme brutal» commis par Bernardo étaient indescriptibles. «C’est un enfer émotionnel pour nous», a déclaré Debbie Mahaffy, étouffant ses larmes.

Bernardo avait également torturé et tué Kristen French, 15 ans, de St. Catharines, en Ontario, après l’avoir séquestrée pendant trois jours. La mère de Kristen French a soutenu que Bernardo ne devrait plus jamais recouvrer la liberté. «Comment peut-on décrire une douleur aussi incommensurable de manière à apporter ne serait-ce qu’un début de compréhension de la tristesse dévorante, du vide et de la douleur que nous ressentons, même après 26 ans?», a demandé Donna French.

La mère a également noté que la loi avait été modifiée après l’incarcération de Bernardo pour permettre des périodes consécutives d’inadmissibilité à la libération conditionnelle — donc: deux fois 25 ans, dans ce cas-ci.

Bien que son agente de libération conditionnelle ait déclaré que Bernardo avait réalisé bien peu de gains pendant sa détention, le condamné s’est décrit comme une personne dont l’estime de soi avait été jadis minée par un trouble d’élocution. Il s’est senti de plus en plus inadéquat, a-t-il déclaré, ajoutant qu’il avait peur d’interagir avec les autres. L’anxiété sociale est devenue sexuelle: il craignait constamment de ne pas pouvoir performer, a-t-il dit. «Plus je manquais d’assurance, plus j’essayais de contrôler.»

L’agente de libération conditionnelle Meagan Smith a déclaré que Bernardo présentait «un faible potentiel de réinsertion». Bien que le risque de violence en général soit faible, ce risque augmente lorsque Bernardo est en situation intime avec un partenaire, a-t-elle déclaré.

Une virginité en cadeau

Bernardo, qui a admis avoir violé 14 autres femmes, a également été reconnu coupable d’homicide involontaire coupable relativement à la mort de la soeur cadette de Karla Homolka, Tammy, en décembre 1990. L’adolescente de 15 ans avait été droguée et agressée sexuellement. Homolka a purgé une peine de 12 ans de prison, jusqu’en 2005, après avoir plaidé coupable à l’accusation réduite d’homicide — et accepté de témoigner au procès de Bernardo. Elle a expliqué qu’elle voulait offrir à Bernardo la virginité de sa jeune soeur pour Noël.

Bernardo a déclaré mercredi qu’il avait été complètement bouleversé par la mort de Tammy, ce qui n’a fait qu’exacerber sa faible estime de soi et l’a conduit à des agressions de plus en plus sauvages contre des femmes et des filles.

«J’ai fait mal à beaucoup de gens. Je l’ai fait, absolument, et c’est pourquoi je pleure.»

«Diriez-vous que vous avez utilisé les femmes comme des objets?», a demandé Suzanne Poirier, l’une des deux membres de la Commission des libérations conditionnelles.

«À cette époque: absolument», a répondu Bernardo.

Bernardo a nié être un psychopathe sadique, même s’il avoue n’avoir rien ressenti pour ses victimes au moment de commettre les crimes. Il s’agissait simplement d’affirmer son pouvoir et son contrôle pour remonter un égo fragile, a-t-il expliqué mercredi. Il a soutenu qu’il n’avait plus besoin aujourd’hui d’agir de la sorte.

Tim Danson, un avocat qui a témoigné au nom des familles French et Mahaffy, a plaidé que Bernardo est effectivement un psychopathe, incapable de toute empathie, qui n’a jamais présenté ses excuses aux proches de ses victimes.

Mme Poirier a elle aussi souligné que l’empathie de Bernardo semblait être bien récente.

L’ombre d’elle-même

Une des victimes survivantes de Bernardo a également témoigné lors de l’audience, mercredi. Elle a raconté comment elle rentrait chez elle, un soir de mai 1988, lorsqu’il a sauté sur elle, l’a traînée dans des buissons et l’a violée. Elle a soutenu ne s’être jamais remise de ce traumatisme.

«Depuis l’agression, je suis vraiment l’ombre de moi-même», a-t-elle raconté à la commission. «Il ne devrait jamais être admissible à une libération, pour le reste de ses jours.»

Son avocat, Fergus O’Connor, a déclaré que Bernardo, à 54 ans, est passé dans un groupe démographique à faible risque en ce qui concerne les crimes à caractères sexuels. Même si le point de vue des victimes doit être entendu, Me O’Connor a déclaré que leurs témoignages ne pouvaient être déterminants.

Les parents de Bernardo, qu’il a décrits comme merveilleux et qui l’ont encouragé tout au long de son enfance, lui ont rendu visite en prison et ont offert leur soutien s’il devait obtenir sa libération conditionnelle, a assuré Me O’Connor. Ils n’étaient toutefois pas présents à l’audience, mercredi.

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