Les victimes d’intimidation souffrent en silence
Si une grande part des Québécois considèrent que l’intimidation gagne du terrain, les jeunes qui en sont victimes, eux, gardent trop souvent leur souffrance secrète.
C’est ce qui ressort d’un sondage Léger Marketing réalisé pour l’organisme ENSEMBLE, qui lutte contre l’intimidation en milieu scolaire. Selon les données rendues publiques lundi, 56 % des victimes d’intimidation restent muettes par rapport à ce qu’elles vivent.
«Ces chiffres sont inquiétants. Ça correspond à ce qu’on constate sur le terrain, à savoir que les gens sont paralysés par la peur lorsqu’ils sont victimes d’exclusion sociale», déclare la présidente directrice-générale d’ENSEMBLE, Anne Lagacé Dowson.
Par ailleurs, l’étude révèle que quatre Québécois sur dix jugent que l’intimidation est en hausse à l’école ou dans leur quartier, un chiffre qui correspond à toutes fins pratiques au pourcentage de répondants disant avoir déjà été victimes d’intimidation (39 %).
À la lumière du sondage, le groupe ENSEMBLE, anciennement connu sous le nom de Fondation de la tolérance, prône une approche axée sur la mobilisation. «De 60 à 70 % des cas d’intimidation cessent lorsque des témoins se manifestent», relève Mme Lagacé Dowson. Selon elle, l’ensemble des jeunes sont conscients que l’intimidation est répréhensible, mais ne savent tout simplement pas comment agir.
Dans ses démarches auprès des enfants et des adolescents, l’organisme ENSEMBLE mise donc d’abord sur un accompagnement soutenu à travers le temps. Une intervention dès le primaire est efficace en raison d’une plus grande sensibilité à la justice chez les plus jeunes, rappelle Mme Lagacé Dowson. À l’inverse, la période la plus difficile se trouve à l’entrée du secondaire, de 12 à 14 ans, là où l’intimidation est «à son apogée», souligne la présidente.
«Les politiques de tolérance zéro sont presque inutiles. Ce qui est utile, c’est d’outiller les jeunes et de créer un écosystème positif en milieu scolaire. Il doivent assumer entre eux la responsabilité de dire que l’intimidation est inacceptable», indique-t-elle.
Au-delà des générations
Le sondage a été mené sur l’internet auprès de 652 Québécois de plus de 18 ans, un échantillon qui nous plonge parfois loin dans le passé de l’intimidation en milieu scolaire. «Ça met en perspective l’impression que l’intimidation est un phénomène récent», analyse Aubert Descôteaux de la firme Léger Marketing. L’enquête montre en effet que 62 % des 45 à 54 ans disent avoir déjà été victimes d’intimidation à l’école. «Malheureusement, les chiffres confirment que l’intimidation traverse les âges», constate M. Descôteaux.
Distinction
L’organisme ENSEMBLE décernera lundi soir le Prix de la tolérance Paul Gérin-Lajoie à l’humoriste et animateur Dany Turcotte.
- Remis depuis 2009, le prix souligne la contribution d’une personnalité dans la promotion de valeurs humanistes et dans la lutte contre la discrimination.