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Le «nationalisme» est perçu positivement au Canada

Jean-Francois Badias / The Associated Press Photo: Jean-Francois Badias/The Associated Press

OTTAWA — À l’occasion du dernier jour du Souvenir, le premier ministre Justin Trudeau avait déclaré à Paris que la perte de confiance envers les institutions publiques inciterait les citoyens à chercher des réponses faciles «dans le populisme, le nationalisme, la fermeture des frontières, la fin des échanges commerciaux, la xénophobie».

Le message était clair: si les pays se replient sur eux-mêmes et traitent les étrangers comme des menaces, on risque de revivre un autre conflit sanglant avec des fronts dans le monde entier.

Cependant, une série de sondages laissent croire que le concept de se dire nationaliste et du nationalisme en général est plutôt bien perçu par la plupart des Canadiens.

Les données semblent indiquer que les Canadiens ne perçoivent pas le nationalisme de la même manière qu’aux États-Unis, où le terme est souvent associé à des groupes nationalistes blancs, puis à la suprématie blanche et au racisme.

Pour les Canadiens, le concept réfère davantage au sentiment d’appartenance à son pays et de veiller à ce que les autres ressentent aussi ce lien d’attachement. Une vision qui n’a pas changé même si le terme est mis au pilori partout sur la planète.

«Il est utilisé de différentes manières — si les gens parlent du nationalisme de Trump, ils vont dire que c’est mauvais. Mais au Canada, ils l’acceptent parce qu’il est assimilé par plusieurs communautés et qu’ils le voient comme une manière d’aider les populations vulnérables à trouver leur place à l’intérieur du Canada», a déclaré Kathy Brock, professeure d’études politiques à la Queen’s University de Kingston, en Ontario.

«Les Canadiens se sont simplement acclimatés à la dualité de définitions du nationalisme», ajoute-t-elle.

Dans les années 1950 et 1960, les Canadiens ont souvent déclaré éprouver des liens plus forts envers leur communauté ou leur groupe ethnique que pour leur pays. Depuis, l’appartenance au pays s’est renforcée tandis que celle envers la communauté s’est affaiblie, a observé Frank Graves, président de la firme EKOS, une entreprise de sondage et d’étude de marché. Il souligne que c’est plutôt le contraire qui s’est produit en Europe au cours de la même période.

Les recherches suggèrent que le même processus s’est opéré concernant l’attachement des Canadiens à leurs groupes ethniques, qui s’est affaibli au cours des 20 dernières années au profit d’un attachement à leur pays, selon M. Graves. Et ce, même si les données montrent que la population nationale est de plus en plus diversifiée.

«Nous n’avons pas une homogénéité ethnolinguistique commune qui impose une définition du «peuple». Il s’agit plus d’un nationalisme civique», décrit le sondeur.

«Au Canada, l’identité nationale a été créée par un dialogue entre les citoyens, l’État et les institutions publiques — l’assurance-maladie, la police montée, la colline du Parlement. Elle n’est pas aussi ancrée dans l’histoire ou la race et l’identité communes, ce qui la protège probablement de certaines des manifestations les plus inquiétantes du nationalisme».

Selon des données d’enquête récemment publiées par l’Association d’études canadiennes, 60% des répondants ont une vision assez ou très positive du nationalisme, contre environ 45% aux États-Unis. Les résultats étaient similaires au Canada anglais et au Canada français.

Il semble également exister un lien entre l’opinion des Canadiens sur le nationalisme et sur le multiculturalisme.

«Contrairement à l’idée européenne de nationalisme, qui intègre une composante ethnique, la plupart des Canadiens ne voient pas le nationalisme comme un enjeu ethnique. Ils le voient plutôt comme une forme de patriotisme», estime Jack Jedwab, président de l’association. «Cela ne se recoupe pas autant que dans le contexte européen où il y a un sentiment anti-immigrants ou contre la diversité.»

Le sondage Léger Marketing, mené auprès de 1519 Canadiens sur un panel Web, a été réalisé pour l’association dans la semaine du 12 novembre. Les sondages en ligne n’ont pas de marge d’erreur, car ils ne sont pas aléatoires et ne sont donc pas nécessairement représentatifs de l’ensemble de la population.

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