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Jugement cassé pour cause de stéréotypes

CHRISTOPHE ENA / The Associated Press Photo:
Stéphanie Marin, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — La Cour d’appel vient de casser l’acquittement d’un homme accusé d’agressions sexuelles répétées sur une fillette, la juge qui l’a déclaré non coupable ayant tenu des propos «stéréotypés» sur les agressions sexuelles commises sur des enfants.

D’affirmer que «personne ne s’est aperçu de rien» pour juger de la crédibilité d’une jeune plaignante n’est pas conforme au droit, souligne la Cour.

Le juge Simon Ruel qui a rédigé le jugement pour le banc de trois juges de la Cour d’appel reproche aussi à la juge de première instance d’avoir erronément laissé entendre que le témoignage de la petite fille devait être corroboré pour être crédible.

Par un jugement rendu jeudi, la Cour a donc ordonné un nouveau procès pour cet homme accusé de huit chefs d’agressions sexuelles.

Le magistrat rappelle aussi que le témoignage d’une enfant ne peut être traité de la même manière en cour que celui d’une adulte. Il est normal qu’elle ne puisse décrire avec précision sa douleur et certains actes posés.

Dans cette affaire, la petite fille a témoigné avoir été agressée à de multiples reprises par l’homme, entre l’âge de 6 et 12 ans, à la maison, alors que sa mère était absente pour le travail.

L’homme a tout nié. Selon sa version des faits, il n’a pu être seul avec l’enfant car il passait ses journées à couper du bois sur ses terres, du matin au soir, été comme hiver. L’homme ne peut être nommé pour protéger l’identité de la plaignante.

La juge Denise Descôteaux de la Cour du Québec n’a pas cru son témoignage, parce qu’il était «non transparent, non fiable, non sincère et non crédible», est-il rapporté dans le jugement de la Cour d’appel.

Mais elle l’a quand même acquitté. Il y avait un doute raisonnable de sa culpabilité, jugeait-elle, parce que la fiabilité de la version de la jeune fille était limitée, notamment parce qu’elle avait fourni peu de détails sur ses agressions.

Selon la Cour d’appel, la juge a évalué le témoignage de la plaignante, âgée de 15 ans quand elle a témoigné devant elle, comme s’il s’agissait d’une adulte. Elle rapporte des choses subies lorsqu’elle était enfant, et il est normal qu’elle n’ait pas tous les mots pour décrire ce qu’elle a subi, et qu’elle n’ait pas remarqué certaines choses liées aux actes sexuels.

«Par ailleurs, certains des commentaires de la juge suggèrent une attitude stéréotypée en matière d’agression sexuelle sur des enfants, particulièrement lorsqu’elle indique que « personne ne s’est aperçu de rien pendant plus de six ans et que l’accusé a commis les actes sans ne jamais être inquiété »».

L’agression sexuelle est un crime qui se commet à l’abri des regards, souligne le juge Ruel. Et lorsque ces agressions sont commises sur des enfants, elles le sont souvent dans un contexte de dépendance ou de vulnérabilité face à un adulte.

Il tranche donc que la juge Descôteaux a commis des erreurs de droit, qui ont eu une incidence sur le verdict. Il casse donc l’acquittement et l’homme subira un nouveau procès.

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