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Taxis: une offensive «de la dernière chance» contre le projet de loi 17

Une longue ligne de taxis défilent dans une rue bordée d'arbres lors d'une manifestation contre Uber.
Les chauffeurs et propriétaires de taxi ne décolèrent pas. Photo: Archives IStock Photos

Des centaines de chauffeurs de taxis provenant d’un peu partout au Québec ont convergé vers Laval, lundi matin. Ils tenaient une «assemblée de la dernière chance», alors que le projet de loi 17 sur le transport rémunéré de personnes entamera mardi son étude détaillée à l’Assemblée nationale.

«J’avais prévu prendre ma retraite à 60 ans, mais je vais la prendre à 70 ans. Je n’ai plus aucun plan de retraite. Je voulais vendre mes permis à mes chauffeurs, mais là, avec ce projet de loi, ça ne sera plus possible», explique le directeur de Taxi 800 à Rimouski, Stéphane Dionne.

Il déplore que le gouvernement caquiste soit allé contre la volonté populaire en déréglementant toute l’industrie du taxi.

«Personne n’a demandé que nos permis soient expropriés. On peut très bien vivre avec Uber, avoir une entente entre les deux. On n’a pas de problèmes avec ça», nuance-t-il.

Même son de cloche pour le chauffeur montréalais Mostafa Benyoucef. Il rappelle que les conditions de travail des chauffeurs se sont détériorées depuis quelques années. «Ce n’est pas facile conduire un taxi de nos jours. Avant, je faisais 5 jours par semaine; maintenant, j’en fais 7, à 12 heures par jour», illustre-t-il.

«Comment on va gagner notre vie, vous pensez? Le permis de taxi nous servira à quoi? On va acheter une voiture neuve et être assis là-dedans toute la journée.» – Mostafa Benyoucef

Dans sa forme actuelle, le projet de loi 17 est tout simplement «idéaliste», ajoute Giuseppe Rucci, qui possède une flotte de 10 taxis dans la métropole. «Tout le monde doit payer le prix marchand, la valeur réelle, et non le prix comptant», argue-t-il.

En 2014, alors même que le gouvernement Couillard prenait le pouvoir, un permis de taxi valait en moyenne 200 000$. «Si vous n’avez pas d’argent, ne rentrez pas dans le magasin, illustre à ce sujet M. Rucci. Restez chez vous et laissez-nous tranquilles.»

M. Rucci compare l’acquisition de son permis à l’achat d’une maison. «On paie une maison au prix d’aujourd’hui, pas d’il y à 20 ans. N’importe quel juge va nous donner raison», estime-t-il.

Les partis d’opposition en appui aux taxis

Sur place, l’ancien ministre libéral et député de La Pinière, Gaétan Barrette, s’est rangé derrière les chauffeurs de taxi sur toute la ligne.

«C’est le projet de loi le plus injuste que j’ai vu de toute ma vie, a-t-il insisté. C’est la première fois qu’un gouvernement démantèle volontairement une industrie, sans offrir de garantie suffisante et sans suivre ses procédures en matière d’expropriation.»

«Démocratiquement, ce n’est pas normal», a-t-il scandé, avant d’être chaudement applaudi par les centaines de chauffeurs de taxi devant lui.

D’après l’élu, la CAQ joue actuellement «la carte du silence» pour faire adopter son projet de loi le plus rapidement possible, sans avoir à débattre sur la place publique.

Le député solidaire de Laurier-Dorion, Andrés Fontecilla, a pour sa part condamné ce «très mauvais projet de loi» présenté «sous couvert» de normalisation des nouvelles technologies.

«En réalité, cela ne vise rien de moins que la destruction de l’industrie du taxi telle que nous la connaissons.» -Andrés Fontecilla, député de Québec solidaire (QS)

«À terme, avec ce projet de loi, tout le monde va s’appauvrir», incluant les chauffeurs Uber, d’après le député montréalais. «Plus personne ne pourra gagner sa vie décemment dans le milieu. Au mieux, ce sera un salaire d’appoint. C’est ça, l’économie du partage promise par le ministre Bonnardel», considère-t-il.

Le chef du Parti vert du Québec (PVQ), Alex Tyrrell, a lui aussi exprimé sa «solidarité» aux chauffeurs, promettant de militer pour la préservation des droits des taxis.

Appelée à réagir, la porte-parole au Ministère des transports du Québec (MTQ), Sarah Bigras, a indiqué que «le droit de manifester est tout à fait légitime», mais que «la modernisation de l’industrie du taxi, attendue depuis longtemps, est nécessaire afin d’en assurer la pérennité».

«Notre gouvernement propose une loi juste qui permet à la fois de rembourser aux titulaires de permis la totalité de la somme payée pour leur acquisition, de remettre plus d’argent dans les poches des chauffeurs et d’améliorer le choix et le service aux usagers», a-t-elle souligné.

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