Confinement: des ressources familiales à bout de souffle
Dans l’ombre des CHSLD, d’autres types d’hébergements pour personnes vulnérables peinent à traverser la crise. C’est le cas des ressources familiales, qui ont vu certains de leurs employés partir pour obtenir de meilleurs salaires dans les centres d’hébergement.
Comme pour tous les Québécois, le confinement est venu perturber les habitudes de Guy Chevalier.
Depuis trois décennies, l’homme de 69 ans et sa conjointe accueillent chez eux des personnes aux prises avec des handicaps physiques, psychologiques ou mentaux.
«On est en train de se brûler.» Hugo Légaré, président du Regroupement des ressources résidentielles adultes du Québec
Depuis la mi-mars, il est confiné «24 heures sur 24, 7 jours sur 7», avec ses deux pensionnaires, qui souffrent de déficience intellectuelle et de problèmes de santé mentale.
«C’est intense, explique-t-il. On a beaucoup de difficultés et plus aucune possibilité d’avoir de l’aide et du répit. Les membres de notre famille qui venaient nous aider en temps normal ne peuvent plus le faire. Il faut faire attention de ne pas s’épuiser, parce que la route est longue.»
M. Chevalier fait partie des 2 500 ressources de type familial (RTF) au Québec, qui accueillent des adultes de tous âges avec une déficience intellectuelle, mentale ou physique.
Cette alternative au réseau public se fait le plus souvent dans des résidences privées, qui peuvent abriter jusqu’à neuf usagers.
«C’est difficile pour nos résidents de comprendre la situation et pourquoi on les empêche de sortir. On intervient beaucoup pour tenter d’alléger le tout. Ce n’est pas tout le temps facile», soutient Hugo Légaré, président du RESSAQ, le Regroupement des ressources résidentielles adultes du Québec, qui représentent 650 RTF sur le territoire québécois.
M. Légaré héberge chez lui neuf résidents. Il est à même de constater les effets du confinement sur sa clientèle.
«On a remarqué chez certains de la désorganisation, de l’auto-mutilation et des conflits entre amis. Ça demande une présence beaucoup plus grande de notre part», dit-il.
«Normalement, les seuls moments où on a du répit, c’est lorsque les résidents vont à l’extérieur en activité de loisir ou d’apprentissage. Tout ça est à l’arrêt en ce moment. Pour nous, ça représente évidemment une surcharge de travail. On est en train de se brûler.»
Appel à l’aide
Pour compliquer la situation, certaines RTF ont vu leurs employés déserter vers les CHSLD. Alors qu’ils font sensiblement le même travail qu’un préposé aux bénéficiaires, les employés des RTF ne sont pas admissibles à la prime horaire de 4$ versée par le gouvernement provincial.
Les ressources familiales espèrent également obtenir les primes promises par Québec pour compenser leurs difficultés actuelles.
Le RESSAQ s’est déjà adressé au ministère de la Santé, mais ses revendications sont laissées lettre morte pour l’instant.
«On nous a dit qu’on avait droit à l’aide promise. Mais sur le terrain, l’argent ne se rend pas. On ne sait pas pourquoi ça bloque ainsi, explique Hugo Légaré.
«Pourtant, on a très peu, voire aucun cas de COVID dans nos maisons. C’est la preuve que notre réseau fonctionne bien, et qu’on maintient une bonne qualité de soins et qu’on a la capacité de faire les choses correctement.»