Le racisme systémique s’invite dans la course à la chefferie du PQ
Les candidats à la chefferie du Parti québécois (PQ) s’affrontent sur la question du racisme systémique depuis quelques jours, alors que la position du parti demeure floue. Si Sylvain Gaudreault soutient la définition du racisme systémique au Québec, Frédéric Bastien, lui, refuse d’y croire.
«Pour moi, ça n’existe pas au Québec. C’est une invention, un fantasme, une espèce d’ennemi imaginaire. Ça ne veut pas dire pour autant qu’il n’y a pas de gens racistes, comme il y en a dans toutes les sociétés», explique à Métro celui qui est aussi professeur d’histoire au Collège Dawson. Il affirme que la grande majorité des Québécois sont «tolérants et accueillants», faisant ainsi écho aux propos du premier ministre François Legault.
«Nous ne sommes pas des Américains. Nous n’avons pas l’historique de ségrégation raciale, d’esclavage, de lynchages, du Ku Klux Klan que les États-Unis ont. Pour moi, si une chose distingue le Québec, c’est la question raciale.» -Frédéric Bastien, candidat à la chefferie du PQ
M. Bastien reconnaît par ailleurs que «tout n’est pas parfait», et qu’il y a encore beaucoup de chemin à faire. «Je ne dis pas qu’il n’y a rien à redire, au contraire. Mais il reste qu’on a des relations beaucoup plus harmonieuses, dans tous les domaines, sur cette question», dit-il.
Selon lui, tous les aspirants-chefs péquistes «doivent défendre le Québec quand il se fait pointer du doigt», et affirmer «haut et fort» qu’il n’y a pas de racisme systémique au Québec. «On voit très bien ce qui s’en vient. Ça va revenir à dire que la loi 21 est raciste, que la loi 101 est raciste. C’est déjà commencé. On ouvre la porte à calomnier le Québec, et à viser nos lois identitaires. Ce n’est certainement pas la position qu’on doit défendre au PQ», ajoute-t-il.
Des candidats qui s’opposent
L’historien de profession dénonce que Sylvain Gaudreault, lui aussi candidat à la chefferie, «croit au racisme systémique chez nous». Le week-end dernier, le député de Jonquière avait effectivement reconnu l’existence du racisme systémique, ou du moins endossé sa définition officielle.
Celle-ci provient de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ). Sur son site, l’organisme affirme que le racisme systémique est «la somme d’effets d’exclusion disproportionnés qui résultent de l’effet conjugué d’attitudes empreintes de préjugés et de stéréotypes, souvent inconscients», mais aussi de politiques qui excluent les groupes visés par la discrimination. Vendredi, le cabinet de M. Gaudreault n’a pas souhaité réagir davantage.
Pour Paul St-Pierre Plamondon, le racisme systémique comporte des risques. «À mon avis, ça amène plus de problèmes que de solutions. Le problème est qu’on racialise ainsi les rapports sociaux. Je pense qu’on fait une erreur si on valide le concept de race dans notre société», explique-t-il à Métro. Il reconnaît toutefois que le racisme «institutionnel» existe, avec la Loi sur les indiens par exemple, et qu’il faut tout faire pour lutter contre l’intolérance par des mesures «concrètes».
«L’aspect systémique n’est pas la bonne façon. On risque d’exacerber les tensions entre les groupes ethniques, et se retrouver avec plus d’extrême-droite et d’extrême-gauche.» -Paul St-Pierre Plamondon, candidat à la chefferie du PQ
Un enjeu de chefferie?
Jusqu’ici, les troupes péquistes n’ont toujours aucune ligne précise sur l’existence, ou non, de racisme systémique au Québec.
«C’est rendu pour nous un débat de course à la chefferie.» -Mathieu Lavigne, directeur des communications du Parti québécois
Mercredi, la députée de Joliette, Véronique Hivon, n’a pas voulu se prononcer, soulignant que «les gens qui sont neutres» dans la course à la chefferie «ne se prononcent pas sur cet enjeu, en ce moment».
Le chef par intérim du parti, Pascal Bérubé, s’est pour sa part fait clair la semaine dernière. «Est-ce qu’il y a du racisme au Québec ? Oui. Est-ce qu’il y a des actes racistes au Québec ? Oui. […] Est-ce qu’il y a du racisme systémique au Québec ? Je n’y crois pas», a-t-il dit.