Des infirmières travailleront au lieu de terminer leur stage
Le manque criant d’infirmières dans le réseau de la santé a poussé Québec à annuler les stages de milliers d’étudiantes en sciences infirmières pour que celles-ci puissent travailler davantage. Une décision prise pour lutter contre la COVID-19, dénoncée par l’association étudiante provinciale.
Le 3 novembre dernier, la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann, a demandé aux neuf universités québécoises offrant le baccalauréat en sciences infirmières de permettre aux étudiantes ayant la formation collégiale d’infirmière de prêter davantage main-forte au réseau de la santé.
Pour ce faire, elle a demandé à ces universités d’annuler les stages, qui ne sont pas rémunérés, des étudiantes pour la session d’automne. Les heures supplémentaires effectuées dans le cadre de leur emploi seront reconnues pour compléter leur stage.
«Le message qu’on veut envoyer, c’est qu’on ne veut pas que la formation des infirmières soit diminuée, mais on a besoin de leurs bras dans le réseau, de leurs compétences, explique le directeur des communications du cabinet de la ministre McCann, Alexandre Lahaie. On va offrir à ces gens-là un milieu de stage qui va faire de l’aide réelle pour les employés du terrain et les Québécois.»
Cette mesure touche toutes les infirmières qui effectuent un stage parmi les 5500 étudiantes au baccalauréat qui possèdent déjà la formation collégiale d’infirmière. Celles-ci sont au baccalauréat pour acquérir plus de compétences et élargir leur champ de pratique.
Selon Québec, 98% de ces étudiantes travaillent déjà dans le réseau de la santé.
Mesure dénoncée
:L’Association étudiante en sciences infirmières du Québec (AÉSIQ) déplore une décision gouvernementale prise «unilatéralement», évoquant des conséquences sur les apprentissages des futures infirmières.
«Il y a des infirmières qui sont aux études et qui veulent se perfectionner, qui veulent devenir plus compétentes, fait valoir sa présidente, Audrey-Ann Bissonnette. Leur priorité reste leurs études et elles paient cher pour ça. On leur demande de carrément mettre ça de côté.»
L’AÉSIQ affirme avoir reçu des témoignages d’étudiantes qui doivent par exemple annuler leur stage en soins intensifs et faire reconnaître le restant des heures sur leur milieu de travail en CHSLD.
«Ce qu’on dit aux infirmières, c’est que leur apprentissage n’est pas prioritaire et qu’on veut juste qu’elles travaillent, ajoute Mme Bissonnette. C’est vraiment du mépris envers la profession d’infirmière.»
Les universités ignorées
Selon nos informations, plusieurs universités ont tenté de faire valoir au gouvernement l’importance des stages sur le plan des apprentissages et des compétences des étudiantes en sciences infirmières
Mais pour Québec, les besoins de main-d’œuvre en pleine deuxième vague sont trop criants, ce qui justifie cette mesure.
«On comprend leurs inquiétudes, exprime M. Lahaie. On bouleverse le plan d’éducation des étudiantes. Mais en ce moment, la vie de tous les Québécois et du monde entier est bouleversée par la COVID-19. On a besoin des efforts de tout le monde.»
Au printemps, le gouvernement avait également annulé les stages dans une décision plus large visant à maintenir uniquement l’enseignement théorique à distance.