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Jean-Martin Aussant: l’idée avant le parti

Photo: Denis Beaumont/Métro

Aux dernières élections, le parti souverainiste Option nationale (ON) a obtenu près de 2 % de la faveur populaire. La formation se targue maintenant d’avoir deux fois plus d’intentions de vote dans les sondages et compte près de 8 000 membres, ce, après seulement un an et demi d’existence. Pas question pour son chef, Jean-Martin Aussant, de ralentir la cadence. À l’aube du congrès national du parti, ce week-end à Montréal, M. Aussant s’est entretenu avec Métro au sujet de sa candidature dans la métropole, de l’imminence d’un scrutin au Québec et des orientations du jeune parti.

Avez-vous arrêté votre choix de circonscription à Montréal en vue des prochaines élections?
La liste se rétrécit, et la décision devrait être prise incessamment. Le plus tôt sera le mieux, en fait. Dès qu’on peut associer un visage à un comté, c’est plus facile de parler du parti et de se faire connaître. On a quelques comtés finalistes, mais je peux déjà vous dire que ça ne sera ni Westmount ni D’Arcy McGee.

Songeriez-vous à prendre la place d’André Lamy, votre candidat d’Hochelaga-Maisonneuve qui a quitté à l’automne?
Ce n’est pas impossible du tout. À Hochelaga, la population est fortement souverainiste, et M. Lamy y a très bien fait considérant les moyens qu’on avait.

Dans quel horizon prévoyez-vous que le Québec ira en élections?
Le gouvernement devrait durer encore un an, jusqu’en mars 2014, au moment du prochain budget. Il risque d’y avoir de fortes envies des libéraux ou de la CAQ de renverser le gouvernement s’ils sont bien placés dans les sondages. Mais ça pourrait arriver avant. Le PQ pourrait également décider de déclencher des élections. S’ils voient une fenêtre s’ouvrir dans les sondages, ça m’étonnerait énormément qu’ils se privent de la chance d’aller chercher une majorité.

Option nationale serait-il prêt advenant un scrutin anticipé?
Si ça avait lieu demain, nous serions sans doute le parti le plus prêt, parce qu’on vient tout juste de traverser une élection avec des candidats partout, même si on ne dispose d’à peu près aucun moyen. C’est nous qui serions les plus aptes à se débrouiller facilement dans ce contexte-là, alors que les autres partis en sont à refaire leur financement, à rebâtir leurs troupes, etc. Dans tous les cas, on serait certainement les moins nerveux!

Anticipez-vous des changements majeurs à la plate-forme d’ON en vue des prochaines élections?
L’article 1 de la plate-forme demeure clairement souverainiste. Il y a quelques propositions d’amendements, mais il n’y a pas de changement de cap à Option nationale. Un point de la plate-forme risque d’être plus longuement débattu et c’est celui du français au cégep. Sinon, il n’y a pas de crise à l’horizon! La plate-forme demeure aussi résolument souverainiste qu’elle l’est depuis le début : c’est ce qui amène le monde chez nous, donc ça m’aurait beaucoup étonné qu’on me propose d’adoucir le message.

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Est-ce que la décision d’indexer les frais de scolarité prise au Sommet sur l’enseignement supérieur influencera les discussions au congrès d’Option nationale?
Notre plateforme propose la gratuité scolaire; et il ne risque pas d’y avoir d’amendement là-dessus. Il y a une unanimité au parti, peut-être pas chez l’ensemble des membres mais chez les congressistes, que la gratuité scolaire balisée, c’est ce qu’il y a de mieux pour le Québec. Le mot balisé est important. Ça signifie que les gens qui sont mieux formés vont payer plus d’impôts en raison de leurs salaires élevés, et vont aussi faire bénéficier la société de meilleurs services car ils sont de meilleurs travailleurs. Il faut s’assurer qu’il n’y ait pas d’abus, et que les gens qui viennent se faire former gratuitement au Québec ne retournent pas à l’étranger. Si on a une vision à long terme de l’économie du Québec et de la société québécoise, il n’y a rien de mieux que la gratuité.

Votre programme ratisse large (ressources naturelles, éducation, etc); pensez-vous que votre insistance sur la souveraineté occulte une partie du message d’ON?
Certaines personnes essaient de nous dépeindre comme des extrémistes de la souveraineté, des fous furieux. Mais, je ne crois pas que ce soit un obstacle. Le principal obstacle d’ON est sa notoriété naissante. Sur les six millions d’électeurs québécois, une grande majorité ne sait pas encore exactement à quoi on correspond. Ils ont entendu le nom du parti, peut-être le mien… Ils savent peut-être que j’ai des lunettes noires… Mais les gens ne sont pas encore familiers avec la plateforme et ce qu’on représente. Ce qui est encourageant, c’est que, quand les gens nous découvrent, ils embarquent. Une grande partie de nos 8 000 membres n’avaient milité nulle part avant, ou ne voulaient rien savoir des partis. Le simple fait d’avoir politisé ces gens-là est une grande fierté.

Malgré que vous n’ayez pas été élu aux dernières élections, vous avez été sollicité sur toutes les tribunes. Votre défaite ne semble pas avoir nui à la visibilité d’ON…
Il faudrait faire l’étude, mais je pense que j’ai eu plus de couverture après ma défaite qu’avant. Nous sommes effectivement souvent appelés à réagir sur les questions qui touchent à la souveraineté, mais aussi sur les nouvelles en lien avec le Parti Québécois. Ça, j’espère qu’on va s’en détacher. Les gens qui font une revue de presse sur ON doivent penser que notre seul adversaire est le PQ. On a l’air de deux partis qui sont constamment en antagonisme l’un avec l’autre alors qu’on devrait être des frères. Or, ON n’a vraiment pas été fondé contre un parti, il a été fondé pour une cause, parce qu’on trouvait que les autres partis l’avaient délaissé. J’ai hâte qu’on soit questionné sur davantage de dossiers et surtout, sur ce que les fédéralistes disent.

L’ancien premier ministre Jacques Parizeau, qui vous a souvent appuyé dans les médias, prendra la parole durant votre rassemblement ce week-end. D’où vient cette proximité avec l’ancien leader souverainiste?

On est deux économistes, on a vécu et étudié en Grande-Bretagne, et on a tous les deux travaillé dans un autre domaine avant de faire de la politique. Je ne veux pas parler pour lui, mais je crois qu’il apprécie le fait que nous parlons clairement et fortement de la souveraineté sans aucune concession aux sondages.

M. Parizeau n’a pas toujours bonne presse en raison de ses prises de position assez tranchées. Est-ce que cette proximité vous nuit davantage qu’elle vous aide?

On ne peut pas reprocher à M. Parizeau son manque d’honnêteté. On sait toujours ce qu’il pense et j’admire ça. Je pense que les Québécois admirent ça aussi. Il dit parfois des choses qui déplaisent à certains, mais je pense que c’est à ces personnes-là de faire une introspection et de se demander pourquoi les propos les dérangent. À mon avis, M. Parizeau intervient toujours de manière constructive. Quand un homme de sa stature dit dans les journaux que ON lui donne des raisons d’être optimiste par rapport à la souveraineté, c’est gratifiant.

Est-ce possible selon vous de ramener l’appui à la souveraineté aux sommets atteints en 1995, au moment du dernier référendum?
Oui. Si on se souvient bien, ce qui avait mené à l’appui très fort à la souveraineté, c’était les suites du Lac Meech. Cela avait également mené le Bloc québécois à former l’opposition officielle à Ottawa. Quand on y pense, les conditions qui avaient mené à cet essor du souverainisme n’ont pas changé. Il n’y a pas eu de réforme depuis Meech. Les mêmes conditions sont là. Il suffirait de réexpliquer à tout le monde pourquoi, à l’époque, ça nous avait mis en rogne. Le contexte historique avait été très bénéfique, mais la souveraineté n’est pas une question de contexte historique, c’est intemporel.

La question d’une union des forces souverainistes reviendra-t-elle sur la table durant votre congrès?
Il n’y a pas de section spéciale du congrès réservée à ça, pour la simple raison que le PQ a fermé la porte. Le PQ a dit publiquement par la voie de son président qu’il n’y aurait pas d’alliance. Il a le droit de ne pas vouloir collaborer avec les autres partis. Je déplore seulement le fait qu’il n’ait pas agi avec la souveraineté en tête. Si on faisait des collaborations ponctuelles, pour s’assurer que les votes dans certaines circonscriptions prenables ne soient pas divisés, mais plutôt concentrés vers un seul candidat souverainiste, ce serait beaucoup plus intelligent que d’y aller tous la tête première.

Vous critiquez souvent le fonctionnement du système politique au Québec. Que repondriez-vous à ceux qui vous accusent de jouer le jeu du système électoral en cherchant à vous entendre avec d’autres partis?
On veut contourner le système. Dans un contexte où les sympathisants de la souveraineté se divisent et où les fédéralistes se faufilent entre les deux, c’est un peu irréaliste de se fermer les yeux et de croire que le système actuel fonctionne bien. Il fonctionne mal dans le cadre d’une réalité à cinq partis, et la dynamique au Québec va dans le sens de l’accroissement du nombre de partis. S’il y avait des primaires souverainistes, par exemple, ça créerait artificiellement un contexte où le vote souverainiste n’est pas divisé dans chaque comté. Un candidat souverainiste gagnerait la primaire dans chaque comté et les électeurs souverainistes pourraient voter pour lui.

Y a-t-il une frustration à l’heure actuelle au sein d’ON de ne pas pouvoir participer aux débats à l’Assemblée nationale?
C’est plus une déception qu’une frustration. Aux dernières élections, le seul hic pour nous a été de perdre le siège qu’on avait. Partout ailleurs, les gens partaient de rien et sont allé chercher de 500 à 1 500 voix. Dans Nicolet, comme on avait le siège et qu’on l’a perdu, on a pris ça comme une baffe. Mais ce n’est pas une frustration, seulement un désir de revenir à Québec pour faire partie des projets de loi, questionner le gouvernement, etc. C’est une tribune irremplaçable.

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