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La PrEP, une pilule qui protège du VIH, n’est toujours pas gratuite ici

Photo: iStock

La prophylaxie préexposition (PrEP ou PPrE), est un antiviral qui permet de réduire considérablement les risques d’infection par le VIH. Alors que cette petite pilule sauve des vies et qu’elle est gratuite en France et à Vancouver, elle n’est pas remboursée entièrement par la Régie de l’assurance maladie du Québec. Bien que son utilisation soit en croissance, son coût peut être un frein pour certaines personnes.

L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), qui suit l’utilisation de la PrEP dans la population, remarque que le nombre de personnes la prenant a été multiplié par quatre entre 2016 et 2020. Sur cette même période, il a augmenté de 1800 % chez les 18-24 ans. En 2020, 35 % des personnes qui l’utilisaient avaient entre 25 et 35 ans.

Un outil «extrêmement important»

Ce traitement a une «efficacité incroyable», peu d’effets secondaires, et c’est un outil indispensable contre le VIH, selon le médecin, directeur général et fondateur de la clinique l’Actuel, le Dr Réjean Thomas.

La PrEP, c’est notre vaccin du VIH, c’est aussi simple que ça […]. On n’a toujours pas de traitement, on n’a toujours pas de vaccin, donc c’est un outil extrêmement important.

Dr Réjean Thomas, directeur général et fondateur de la clinique l’Actuel

Dans sa clientèle, ce sont principalement des hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HARSAH) entre 30 et 40 ans qui consultent pour cela. Cependant, toute personne peut avoir accès à la PrEP.

«On a une cohorte de près de 4000 patients sous PrEP depuis 2014. On n’a pas eu un cas de [patient infecté par le] VIH», explique le Dr Thomas.

La PrEP se prend sous forme d’un médicament composé d’antiviraux (anti-VIH). Elle peut être utilisée quotidiennement par les personnes plus actives sexuellement. Elle peut se prendre aussi à la demande, au minimum deux heures avant un rapport à risque. S’ensuivent deux prises 24 heures après, sur deux jours. Ce traitement vise les personnes séronégatives et son taux d’efficacité dépasse 90 %.

Elle se distingue de la prophylaxie post-exposition (PPE) qui, elle, se prend après qu’une personne a récemment été exposée au VIH. L’efficacité de la PPE est de plus de 80 %.

À quand la PrEP gratuite?

Le coût relatif de la PrEP au Québec est de près de 90 $ par mois lorsque le médicament est couvert par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ). Il grimpe à plus de 200 $ pour les personnes sans aucune assurance, comme les réfugiés et les personnes sans statut.

Je ne comprends toujours pas que ce ne soit pas gratuit. […] Environ 15 % de notre clientèle cesse de prendre la PrEP pour des raisons financières.

Dr Réjean Thomas, directeur général et fondateur de la clinique l’Actuel

Selon lui, la pandémie a aussi joué un rôle dans l’abandon de la PrEP par certaines personnes. Elle est devenue un poids financier pour les gens qui ont perdu leur emploi ou leur assurance.

«Au cours de la pandémie, 29 % (de nos clients) on arrêté de prendre la PrEP […]. On a eu des cas d’infection chez ces gens-là», dit-il.

«Comme les jeunes ont souvent les assurances de leurs parents, ils ne prendront pas la PrEP», ajoute le Dr Thomas. En outre, «il y a des assurances (privées) qui cessent d’assurer les gens qui sont sous la PrEP».

Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) reconnaît qu’elle constitue une «stratégie hautement efficace pour réduire le risque de transmission du VIH». Il explique par contre qu’il «n’est actuellement pas prévu de rembourser 100 % du prix» de la PrEP.

«Si on veut atteindre les objectifs de l’Organisation mondiale de la santé (pour lutter contre le VIH), il faut avoir un meilleur accès à la PrEP, sinon on n’y arrivera pas», poursuit le Dr Thomas, qui ajoute que cela doit s’accompagner d’un accès gratuit à la trithérapie.

Si les politiciens faisaient des calculs mathématiques bien simples, ils verraient que c’est tout à l’avantage du système de santé d’offrir la PrEP à tous ceux qui sont à risque […], même d’un point de vue financier; et ça se justifie encore plus facilement d’un point de vue humain.

Dre Cécile Tremblay, microbiologiste, infectiologue et professeure à l’Université de Montréal

Optimiser le traitement

De nouvelles molécules et l’implantation de nouvelles médications seraient à l’étude. L’arrivée de médicaments à action de longue durée, à prendre aux deux mois ou chaque six mois, est espéré.

Deux enjeux actuels de la recherche sont l’implantation et l’observance des traitements. C’est ce qu’explique la Dre Cécile Tremblay, microbiologiste et infectiologue au CHUM et professeure titulaire au Département de microbiologie, infectiologie et immunologie de l’Université de Montréal.

Elle a effectué une étude de coût-efficacité sur une cohorte d’HARSAH à haut risque d’être infectés. Les résultats ont montré que l’arrêt de prise de la PrEP était associé à l’argent et à la santé mentale.

«On voyait que les gens les plus socialement instables étaient les plus à risque d’arrêter de prendre la PrEP, ou même qu’ils avaient de la difficulté à y accéder, dit-elle. Plus on intervient au niveau du gouvernement pour soutenir ces populations très vulnérables, plus on va contribuer à empêcher la dissémination de la maladie.»

Il est nécessaire de voir un médecin pour se procurer la PrEP. Un suivi régulier est aussi requis. À Montréal, différentes cliniques offrent la PrEP; c’est le cas des cliniques l’Actuel, La Licorne, SIDEP+ ou encore la clinique du Quartier latin.

Du 29 juillet au 2 août a lieu la Conférence internationale sur le SIDA (AIDS 2022) à Montréal. Les dernières connaissances scientifiques seront exposées et différents sujets seront abordés, tels que les vaccins, la réponse autochtone au VIH ou encore l’innovation en santé.

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