Enquêtes sur la construction: C'est reparti!
La fuite du rapport Duchesneau portant sur l’industrie de la construction a embrasé l’opinion publique. Preuve que tout cela couvait un peu comme une braise prête à s’enflammer, le climat de doute envers le gouvernement Charest s’est réinstallé plus vite qu’il n’en faut pour dire : «Marteau.»
Juste avant cette bombe lancée par Marie-Maude Denis de Radio-Canada, le taux de confiance à l’égard du gouvernement remontait. On pouvait presque croire que les Québécois étaient passés à autre chose. À l’occasion, on entendait bien un commentateur réclamer une commission d’enquête publique, mais la pression était retombée. Avec les déboires du PQ, Jean Charest semblait reparti pour une bonne période.
Les mots «collusion», «construction» et «financement des partis politiques» sont revenus hanter le premier ministre. Après avoir tenu une conférence de presse en grande pompe pour finalement avouer
qu’il n’avait pas lu le rapport, celui qui a toujours été vu comme un fin stratège politique n’a pas mesuré l’ampleur de la colère des Québécois. Cette semaine, il a maladroitement tenté de se reprendre en tournant la situation en dérision à l’Assemblée nationale en disant : «Ça a été avantageux pour moi de lire le rapport», pour ensuite en citer un extrait.
Il a tout de même compris qu’il ne pourrait s’en sortir indemne. Il a consenti à ce que Jacques Duchesneau, directeur de l’Unité anticollusion, présente son rapport en commission parlementaire. Si les partis d’opposition et les députés indépendants se concertent et que l’auteur du rapport décide de livrer l’essentiel des 2 500 heures d’entrevues, cette bonne idée pourrait virer au cauchemar pour
le gouvernement.
Ce qui paraît être une façon de lâcher du lest ne pourrait être que le mirage d’une bouée. Il en va de même pour les arrestations annoncées. Elles ne parviendront pas à apaiser la grogne. Bien au contraire, elles laisseront un goût amer à la population. On dira que bien des gros poissons auront été épargnés.
Certains évoquent le coût important d’une commission d’enquête. Pourtant, rétablir la confiance de la population envers ses institutions n’a pas de prix. Le rapport Duchesneau est accablant et n’a pas fini de faire couler beaucoup d’encre. Il peut aussi engendrer des dérapages. La preuve, son auteur ira à Tout le monde en parle avant de rencontrer les députés de l’Assemblée nationale, en début de semaine prochaine. Est-ce vraiment la meilleure approche pour rendre crédible un rapport?
En refusant une enquête publique, le premier ministre est le premier responsable d’un climat politique qui dégénère. Tous les ingénieurs, les travailleurs de la construction et les politiciens ne sont pas coupables. Il n’y a toutefois pas de fumée sans feu et il est temps de dissiper la boucane pour séparer le vrai du faux.
– Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.