Saine alimentation: beaucoup d’hôpitaux en retard
72% des établissements de santé du Québec n’avaient pas terminé de mettre en œuvre, à la date prescrite du 31 mars 2013, l’ensemble des mesures pour favoriser une saine alimentation à l’intérieur de leurs murs, selon un rapport du ministère de la Santé publié le 8 octobre.
Intégrer les fruits et les légumes dans les mets de base, offrir une variété suffisante de chaque groupe d’aliments, privilégier les modes de cuisson utilisant peu ou pas de matières grasses, limiter les aliments contenant des gras trans, tout ça dans les plats offerts aux patients, aux employés et aux visiteurs des établissements de santé, cela peut sembler naturel. Pourtant, en juillet 2009, le ministère de la Santé (MSSS) a élaboré un cadre de référence établissant des dizaines de mesures semblables que les hôpitaux, CHSLD, CLSC et autres établissements de santé devaient instaurer avant le 31 mars 2013, après avoir adopté une politique alimentaire en ce sens.
De mars à août 2013, 150 établissements sur 262 ont rempli un questionnaire anonyme et volontaire élaboré par l’Institut national de santé publique du Québec. Les résultats de cette enquête, rendus publics tout récemment par le Bilan de la mise en oeuvre des politiques alimentaires dan sles établissements du réseau de la santé et des services sociaux, indiquent des degrés de mise en œuvre très inégaux. Par exemple, 85% des établissements n’avaient pas complètement éliminé la friture et 78% ne privilégiaient pas suffisamment «l’utilisation de gras insaturés pour la cuisson et pour les matières grasses d’accompagnement».
«C’est faible. Il n’y a aucune raison de ne pas éliminer les gras saturés. On connaît les gras de remplacement», a commenté Corinne Voyer, directrice de la Coalition québécoise sur la problématique du poids.
«Les établissements de santé doivent être exemplaires en matière de saine alimentation, a estimé Mme Voyer. Le gouvernement doit soutenir les établissement, par de la formation, des ressources, du financement.»
Il n’est pas possible de faire un portrait complet de la situation actuelle. Le ministère ne fait pas un suivi régulier de la situation sur le terrain. Le service des communications du MSSS a indiqué que «des réflexions ont été entamées afin d’évaluer l’élaboration d’indicateurs de suivi». Comme le cadre de référence constitue des lignes directrices et non pas une loi, le MSSS ne peut pas imposer de sanctions contre les établissements retardataires.
Portrait à Montréal
Sur les 19 établissements de santé montréalais qui ont répondu aux questions de Métro au sujet de leur politique alimentaire, 13 n’avaient pas terminé de l’implanter au printemps dernier.
«On ne sait pas où les établissements sont rendus, avait évoqué en novembre 2014 Randala Mouawad, répondante régionale pour le cadre de référence en politiques alimentaires à la Direction de santé publique de Montréal. Certains se sont démarqués positivement, comme le CHUM et Maisonneuve-Rosemont, qui n’offrent plus de friture ni de boissons gazeuses. Mais c’est certain que tous n’ont pas implanté leur politique alimentaire.»
Le Centre universitaire de santé McGill, pour sa part, n’a même pas encore adopté de politique alimentaire. Un comité de travail a été formé pour mettre en place progressivement les orientations du ministère.
Les établissements de santé évoquent plusieurs obstacles à la préparation de plats équilibrés et sains à l’intérieur de leurs murs, notamment l’impossibilité de rompre certains contrats avec des fournisseurs alimentaires.
«Les volets qu’il reste à mettre en oeuvre sont plus complexes, et certains sont même très onéreux, ce qui représente un défi de taille, surtout dans le contexte actuel, alors qu’il faut faire des choix d’autant plus judicieux», a expliqué Julie Benjamin, conseillère en communication à l’Institut Philippe-Pinel.
Au total, 66 établissements de santé montréalais étaient concernés par le cadre de référence pour une saine alimentation lors de sa création.