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Il y a une crise à Val-d'Or dit un chef autochtone

Une voiture de la Sûreté du Québec
Un véhicule de la SQ Photo: Archives Métro
Magdaline Boutros et Stéphanie Marin - La Presse Canadienne

Il y a une crise réelle à Val-d’Or, a déclaré le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, qui somme le premier ministre Philippe Couillard de s’y rendre d’ici 24 heures pour une rencontre.

Le chef Ghislain Picard a lancé cet ultimatum au terme d’une réunion d’urgence des leaders autochtones qui a eu lieu mardi dans cette ville de l’Abitibi.

Il répondait ainsi au directeur général de la Sûreté du Québec (SQ), Martin Prud’homme, qui soutenait exactement le contraire en déclarant plus tôt en journée qu’il n’y avait pas de crise.

Pour M. Picard, la situation est telle qu’elle doit interpeller le gouvernement du Québec au plus haut niveau, c’est-à-dire le premier ministre de la province.

«Il n’a pas le choix. Il doit prendre ses responsabilités et rencontrer les Premières Nations», a tranché le chef Picard.

«L’odieux leur revient pour la suite des choses», a-t-il ajouté.

La semaine dernière, l’émission «Enquête» de Radio-Canada levait le voile sur des allégations de plusieurs femmes autochtones qui disent avoir été victimes de violence policière ou de sévices sexuels commis par des policiers de la Sûreté du Québec à Val-d’Or.

La réunion de mardi a été fort émotive et marquée par la colère, a précisé le chef Picard. «Personne d’autre ne semble considérer, à part nous, que nous sommes en situation de crise, a-t-il martelé. Il ne faut pas que cela en reste là.»

Il a de plus souligné que le lien de confiance est brisé entre les communautés autochtones et la SQ, la GRC et le Service de police de la ville de Montréal (SPVM).

C’est pourquoi il dit s’attendre à ce que l’enquête sur les policiers de la SQ de Val-d’Or, présentement menée par le SPVM, soit transférée à une commission indépendante.

Les plaintes des femmes pourront continuer à être déposées auprès du SPVM, mais devraient être sous la supervision d’une entité policière autochtone, juge-t-il.

De plus, il souhaite que l’enquête fédérale nationale sur les femmes autochtones disparues ou assassinées soit tenue dans les meilleurs délais. Il demande au premier ministre désigné, Justin Trudeau, de donner suite à sa promesse électorale de tenir cette enquête au plus tard 30 jours après l’assermentation de son cabinet. Son prédécesseur, Stephen Harper, avait refusé de déclencher pareille enquête.

M. Picard dit que les chefs se sont entendus pour mettre à la disposition des femmes autochtones de Val-d’Or un soutien continu. La communauté est mal outillée pour répondre à leurs besoins et manque de ressources, soutient-il.

Plus tôt en journée, le directeur général de la SQ, Martin Prud’homme, avait tenu des propos évacuant l’état de crise.

«Ce que j’entends, c’est qu’il y a des gens qui sont préoccupés, il y a du questionnement. Mais de là à dire qu’on est en crise, non, je ne le pense pas, mais on doit faire quelque chose», avait-il dit en point de presse à Val-d’Or.

M. Prud’homme est en Abitibi pour discuter directement avec ses policiers, mais aussi avec des représentants de la communauté autochtone.

«Je n’ai pas peur (que la situation dérape), mais je suis préoccupé par la situation. Je veux m’assurer qu’on va faire face à la situation correctement», a-t-il mentionné.

M. Prud’homme avait reconnu que le corps de police devait revoir la formation offerte aux agents qui travaillent dans le centre-ville de Val-d’Or où prévaut une situation particulière.

«Je crois qu’avoir une équipe de réponse mieux formée par rapport à la situation du centre-ville, ça peut juste aider», a laissé tomber M. Prud’homme, parlant «d’une clientèle qui est vulnérable et qui a besoin d’aide».

Il s’est toutefois empressé d’ajouter que les policiers du poste 144 avaient «bonne réputation» et étaient «professionnels».

Le grand patron de la SQ a annoncé la mise en place de deux projets-pilote. Toutes les autopatrouilles à Val-d’Or seront désormais équipées de caméras de surveillance et des travailleurs sociaux se joindront aux forces policières pour patrouiller les rues du centre-ville.

Parmi les huit policiers toujours suspendus au poste de Val-d’Or, aucun n’est visé par des allégations d’inconduite sexuelle, a précisé M. Prud’homme. Ils font plutôt l’objet d’enquêtes pour voies de fait et abus de pouvoir.

Deux allégations d’agression sexuelle ont été traitées. Elles touchent un policier qui est aujourd’hui décédé et un autre dont l’identité n’a pu être établie, a-t-il indiqué.

Les policiers qui ne sont pas rentrés au travail depuis la diffusion du reportage de l’émission «Enquête» effectueront un retour au travail progressif.

«Il faut comprendre que les policiers et les policières ici, dans une ville comme Val-d’Or, ont été pointés du doigt, les familles, les enfants, les conjointes», a fait remarquer M. Prud’homme.

«On est capable de leur laisser du temps», a-t-il ajouté.

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