Soutenez

État d’urgence: Legault pourrait dévoiler ses cartes… après les élections

Le premier ministre du Québec, François Legault / Josie Desmarais/Métro Photo:

L’administration Legault pourrait attendre la fin des prochaines élections avant de dévoiler dans le détail les mesures mises en œuvre dans la gestion de la pandémie. Si le gouvernement assure qu’il le fera avant le scrutin, l’opposition demande de la transparence de sa part et la levée de l’état d’urgence sanitaire.

Depuis mars 2020, soit le début de la pandémie, le gouvernement renouvelle l’état d’urgence sanitaire par décret, tous les 10 jours. C’est donc dire qu’il l’a fait plus d’une centaine de fois. En vertu de l’état d’urgence, le gouvernement bénéficie de privilèges exceptionnels, notamment celui d’accorder des contrats sans lancer d’appel d’offres.

Or, l’état d’urgence sanitaire vient avec un devoir: celui de déposer, lorsqu’il est levé, un rapport des événements à l’Assemblée nationale. On doit y détailler tous les pouvoirs et les mesures qui ont été utilisés grâce à l’état d’urgence. Il s’agit donc d’un morceau important pour saisir les gestes posés par le gouvernement dans la gestion de la pandémie.

La CAQ n’aura toutefois pas à déposer ce rapport avant les élections, selon la Loi sur la santé publique.

Trois mois sont accordés au gouvernement pour le faire lorsque les élus siègent. Le hic, c’est que dans trois mois, les élus quitteront l’Assemblée nationale pour la pause estivale.

Si l’état d’urgence sanitaire est levé lorsque les travaux sont arrêtés, le gouvernement dispose de 15 jours après le retour des élus pour dévoiler son rapport. Cependant, le début de la session parlementaire n’aura pas lieu en septembre, comme à l’habitude, puisqu’une période électorale sera alors entamée.

Promesse et scepticisme

La CAQ a toutefois l’intention de présenter son rapport avant les élections, assure-t-on à Métro. François Legault avait d’ailleurs promis de déposer le rapport avant les élections au Salon bleu, en février. «Comme nous l’avons déjà confirmé, nous avons l’intention de déposer un projet de loi dans les prochaines semaines pour mettre fin à l’état d’urgence sanitaire», indique le cabinet de François Legault dans un échange de courriels.

Depuis le début de la session parlementaire, les trois partis d’opposition demandent à la CAQ la levée de l’état d’urgence. «Nous demandons depuis des semaines à la CAQ de mettre fin à l’état d’urgence et de déposer le rapport d’événement prévu à la Loi sur la santé publique pour que nous puissions en débattre à l’Assemblée nationale, indique la cheffe libérale Dominique Anglade dans un échange de courriel avec Métro. Les scandales éthiques s’accumulent à la CAQ et le nombre de contrats de gré à gré aussi. François Legault doit faire preuve d’une plus grande transparence.»

L’état d’urgence sanitaire est un véritable bazooka démocratique. Pour être juste, la CAQ devra être très transparente dans son rapport des événements.

Louis-Philippe Lampron, professeur de droit à l’Université Laval

Trop peu, trop tard?

La possibilité que la CAQ remette son rapport des événements après les élections inquiète le professeur de droit de l’Université Laval Louis-Philippe Lampron. Mais le contenu potentiel du rapport l’inquiète davantage. «L’article de la Loi sur la santé publique à ce sujet est très peu contraignant: il n’y a à peu près rien d’exigé du gouvernement. Considérant le pouvoir exceptionnel que le gouvernement s’est arrogé en deux ans, il est de son devoir d’aller plus loin que ce que la loi prévoit», estime-t-il.

Selon lui, tous les détails de la gestion de la pandémie devraient être dévoilés, des membres de la cellule de crise aux discussions tenues jusqu’au détail des contrats accordés de gré à gré. «Ce n’est pas pour taper sur les doigts de la CAQ, mais bien pour émettre un diagnostic social, de constater les erreurs commises et d’apprendre», raisonne-t-il.

Révision proposée

Alors que la Loi sur la santé publique est critiquée, le Barreau du Québec propose une révision au gouvernement. Celle-ci devrait être munie d’une limite temporelle et d’un mécanisme de consultation de l’Assemblée nationale obligatoire après un certain temps. 

«Après deux ans, sommes-nous toujours dans l’urgence?», demande la bâtonnière du Québec, Catherine Claveau. «Le Barreau estime qu’un débat doit avoir lieu à ce sujet.»

Inscrivez-vous à notre infolettre et recevez un résumé, dès 17h, de l’actualité de Montréal.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.