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Alaclair Ensemble: Post-rigodon en évolution

Photo: Chantal Lévesque/Métro

L’analogie vient d’Ogden, alias Robert Nelson. Si quelqu’un que tu n’as pas vu depuis longtemps perd beaucoup de poids, tu auras un choc à ta prochaine rencontre avec lui. Mais pour le nouveau mince, la transition s’est fait tout doucement. La même chose est arrivée à Alaclair Ensemble durant le parcours qui a mené à son nouvel album, Les frères cueilleurs. Rencontre avec Odgen Ridjanovic et KenLo Craqnuques, du collectif rap post-rigodon bas-canadien.

Une musique moins éclatée, des rythmes plus épurés, du rap dense, mais aussi une première association avec une maison de disque (Disque 7e ciel) et un album en vente «traditionnelle». Pas de concept de contribution volontaire sur bandcamp. Deux ans après la sortie de Toute est impossible, qu’est-il arrivé avec Alaclair?

Pas grand chose, si vous demandez aux principaux intéressés. Simplement un désir de jongler avec les mots «comme dans l’temps» et de jaser au plus grand nombre possible. «C’était un choix prémédité de revenir aux reliques dans le choix des beats, explique KenLo, attablé à la terrasse de la Taverne les Torchés, avenue du Mont-Royal. On voulait laisser de la place pour les vocals.»

«Alaclair, c’est du monde qui fait du rap depuis 15-20 ans, ajoute Ogden. L’ouverture et la facilité qu’on a eues à faire de l’humour, du chant, de la pop, a mis le spotlight sur autre chose que notre zone de confort : la maîtrise du rap.»

«On n’est pas juste des gars qui font du rap “sur le side”. C’est ce qu’on est avant tout.» – Ogden, alias Robert Nelson, alias Ogden Ridjanovic, d’Alaclair Ensemble

«On conserve tout de même notre esprit “carte blanche absolue”, rassure KenLo. Il y a des moments surprenants dans l’album qui ne suivent pas la ligne directrice. Il faut que ça existe.»

Il suffit d’écouter la pièce Sauce pois – ou de regarder la superbe vidéo qui vient de sortir – pour le constater. La lettre d’amour éclatée à la bouffe créole apaisera les craintes des amateurs de la première heure.

Plus vieux et plus occupés, les membres d’Alaclair avaient besoin d’un coup main pour mener à bien leur projet. En travaillant avec une maison de disque, la gang de rappeurs espère aussi rejoindre un plus grand nombre de gens. «On avait atteint un plateau de nos rendements en terme de chiffres entre Maigre blanc d’Amérique du Noir et Toute est impossible, explique Ogden. Ceux qu’on touchait, on les touchait vraiment, mais les autres pas du tout. Sans changement, ça serait resté comme ça, ce qui est cool. On est très satisfaits. Mais si on voulait avoir une croissance, il fallait réfléchir à une nouvelle façon de fonctionner.»

Mission (presque) accomplie
KenLo et Ogden, avec leurs compères d’Alaclair, Maybe Watson, Vlooper, Eman, Claude Bégin et Mash, ont ouvert les FrancoFolies en juin. En partageant la scène avec Brown, les Dead Obies et Loud Larry Ajust, ils ont frappé un grand coup pour le hip hop d’ici. «C’était une belle porte ouverte, dit KenLo. Ç’est un signe de ce qui se passe en ce moment. Quand tu regardes la place qu’occupe le hip hop dans la société, dans le monde, c’est normal.»

Toutefois, il reste encore beaucoup de travail à faire pour que le genre ait droit au respect qu’il mérite au Québec. «Dans certaines institutions classiques (radio, télé), les réalités culturelles urbaines ne sont pas très présentes, se désole Ogden. Une fois que la musique est dans les journaux, sur internet, qu’il y a une base de fans, qu’est-ce qu’on peut faire
de plus?»

Pas grand chose en effet.

Québécitude

L’univers d’Alaclair Ensemble est composé de bien des choses, notamment d’une appropriation de la québécitude unique, où les références bas-canadiennes sont légion.
«Sans représenter aucune cause, fouetter un peu l’histoire mainstream telle qu’elle nous a été enseignée allait de soi dans notre musique, explique KenLo. C’est une forme de terrain de jeu.»

«Pour moi, l’idée du Bas-Canada et de Robert Nelson permet de parler de la spécificité socio-culturelle du Québec, avance pour sa part Ogden. Son idée de souveraineté en tant qu’entité unique, mais qui n’est pas basée sur une approche ethnolinguistique.»

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