Les deux faces d’Arthur H
Le chanteur Arthur H joue avec les différentes facettes de sa personnalité musicale dans Amour chien fou, un album double qui renferme une petite part de Montréal.
Côté Amour, l’homme à la voix langoureuse y va de ballades sensuelles aux rythmes vaporeux, à l’instar du premier extrait, La boxeuse amoureuse. Côté Chien fou, il opte pour des pièces plus dansantes et givrées comme Nosferatu, où l’auteur-compositeur-interprète se met dans la peau d’un «irrespectable suceur de sang».
Au total, 18 morceaux qui peuvent être dégustés ensemble ou séparément.
«Si les gens ont envie d’une atmosphère douce, mystérieuse, agréable, ils pourront écouter la première partie. S’ils ont envie de danser avec leur chien, leur amoureuse ou avec eux-mêmes, ils ont sous la main un disque avec plus d’énergie», résume l’artiste français à propos du concept derrière son 10e album.
«La musique, c’est fait pour manipuler le temps, pour le ralentir ou l’accélérer, poursuit-il. Encore faut-il donner du temps au temps. J’ai encore cette utopie qu’on puisse rentrer dans un album comme dans un voyage, comme dans un film, se perdre dans une histoire, aller de surprise en surprise. Ceux qui veulent emprunter cette voie le peuvent avec ce disque: il y a la matière sonore et poétique pour le faire. Mais ceux qui veulent prendre seulement une chanson peuvent le faire aussi.»
Ce premier album double en carrière, Arthur H a décidé de le compléter à Montréal, où il avait enregistré son opus précédent, Soleil dedans.
«J’ai une grande confiance dans les oreilles et la sensibilité du réalisateur Jean Massicotte [qui a assuré le mixage au Studio Masterkut]. C’était rassurant de l’avoir à mes côtés pour ce double album qui était quand même un projet impressionnant et dense.»
«Je trouve à Montréal un état d’esprit, des amis, un sens de la liberté, une spiritualité très naturelle qui résonne en moi, explique le poète. Je ne me sens pas étranger au Québec. Il y a certains codes que je ne possède pas, mais je sens qu’il y a des choses très intimes que je partage. C’est peut-être pour ça que je me sens bien chez vous.»
L’âme de la métropole est évidemment présente dans Sous les étoiles à Montréal, pièce dédiée à son amie et collaboratrice Lhasa de Sela, morte du cancer en 2010.
«Je n’avais aucun désir particulier d’écrire une chanson sur Lhasa. Seulement, une journée, je me suis mis à écrire au piano et cette chanson est apparue et m’a littéralement tombé dessus, paroles et musique.» – Arthur H, à propos de la pièce Sous les étoiles à Montréal
«J’ai ressenti le besoin de parler de toute cette collection d’images incroyables que j’ai eu la chance de vivre en la fréquentant: boire un thé chaud chez elle quand il neige dehors, les longues soirées à discuter avant de repartir dans Montréal enneigé, la nuit, la tête pleine de toutes les nouvelles idées qu’on avait évoquées. C’était une personne extrêmement inspirante. Dès qu’on la fréquentait, on avait tout de suite plein de nouveaux désirs, de nouvelles options qui se présentaient.»
«J’ai beaucoup pleuré en écrivant la chanson, avoue-t-il candidement. Après, c’était fini, j’étais content d’évoquer son esprit étincelant. Lhasa vit dans mon cœur et dans celui de beaucoup de gens.»
Un autre célèbre poète montréalais, «le roi» Leonard Cohen, fait également une apparition dans cette chanson.
«Ça m’a plu de les imaginer comme deux esprits qui planent dans le ciel de Montréal et qui continuent à inspirer les gens et à participer à la magnifique vie créative de la ville. Ce sont deux esprits bienveillants, qui nous ont quittés mais qui sont toujours là par la puissance de leur esprit.»
Les comparaisons entre Cohen et Arthur H, deux chanteurs à la voix d’outre-tombe, sont tentantes, mais le principal intéressé préfère jouer la carte de la modestie.
«Cohen fait partie des gens qui donnent envie d’écrire des chansons. Moi qui écris des chansons poétiques, j’ai le désir d’écrire des pièces aussi géniales que lui, des morceaux énigmatiques et populaires à la fois. C’est aussi quelqu’un qui a toujours été en mouvement, comme Lhasa d’ailleurs. Peu importe ce qu’ils font, c’est leur mouvement perpétuel qui nous inspire.»